Il y a de l’argent sale derrière la transition verte

Par Max Wilbert
22 avril 2023
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Je m’appelle Max Wilbert, co-auteur de Bright Green Lies, fondateur de Protéger Thacker Pass, et organisateur d’une communauté bio-centrée. J’utilise ce site pour partager des stratégies et explorer des domaines comme la durabilité, l’effondrement, l’empire, la résistance, l’activisme, le greenwashing [laver plus vert] et la justice. Merci de me lire.

Un criminel qui glisse quelques billets à un officier de police et repart libre. Un homme d’affaires qui achète un politicien avec une valise d’argent liquide. Nous concevons souvent la corruption dans ces termes évidents, et comme quelque chose qui se produit dans les pays pauvres, ailleurs.

Mais la corruption se présente souvent différemment.

Aux Etats-Unis, où je vis, la corruption est courante. Elle est aussi presque légale.

En fait, l’argent sale est devenu partie intégrante du tissus politique de notre nation. Ça a été normalisé, institutionalisé et même régulé. Et pourtant, les effets de cette corruption sont aussi insidieux et destructifs que les pots-de-vin les plus voyants.

La corruption est quelque chose de pourri dans notre système politique, et elle s’étend.

Cet article concerne la corruption américaine, mais l’histoire sera racontée en examinant une compagnie minière canadienne appelée Lithium Americas, qui travaille aux Etats-Unis par l’intermédiaire d’une succursale entièrement possédée par les Etats-Unis, Lithium Nevada Corporation.

Depuis deux ans et demi, je lutte contre Lithium Nevada pour l’empêcher de détruire Thacker Pass – un site crucial de biodiversité et un site sacré pour des Autochtones, site connu comme Peehee Mu’Huh dans la langue Paiute, qui se trouve dans le nord du Nevada, juste à côté de la frontière avec l’Oregon. Lithium Nevada, comme vous l’avez probablement deviné, veut transformer ce lieu en une mine de lithium à ciel ouvert.

C’est un lieu spécial. Thacker Pass abrite le tétra des armoises [sorte de sauge] en voie de disparition, l’antilope d’Amérique [seule et dernière représentante des antilocapridés], le cerf mulet et des aigles royaux. C’est un corridor de migration et un refuge climatique. C’est le bassin hydrologique des communautés locales et le site de deux massacres de Paiutes, dont celui du 12 septembre 1865, au cours duquel des soldats de l’Armée Américaine ont tué entre 30 et 50 hommes, femmes, enfants et vieillards, dans une attaque surprise à l’aube. Il a été reconnu par le Gouvernement Fédéral comme « District Culturel Traditionnel », un paysage d’une importance exceptionnelle pour l’histoire des Autochtones et leur identité culturelle.

Et en ce moment même, pendant que vous lisez ceci, c’est en train d’être détruit par une compagnie corrompue et un gouvernement corrompu. Des bulldozers roulent dessus, et des buissons de plusieurs siècles, des vestiges de milliers d’années et les vies de précieuses créatures du désert sont écrasés sous le métal.

Comment est-ce possible ? Comment, dans une démocratie où les gens ont le droit de protester, de se faire entendre, de commenter, de faire des pétitions, d’engager des poursuites en justice, comment est-il possible de voir un tel déni de justice ? Et, plus largement, comment est-il possible que notre système de gouvernement soit incapable de faire quelque chose face à la catastrophe écologique à laquelle nous sommes confrontés : la 6ème extinction de masse de la vie sur Terre ?

Une partie de la réponse est la corruption, que nous pouvons diviser en cinq catégories : le lobbying, la rédaction des lois, la politique de la « porte tournante », les contributions aux frais de campagnes, et la corruption de la communauté. Examinons-les l’une après l’autre, en utilisant Lithium Americas et Thacker Pass comme exemple.

Le lobbying : Comment les Grandes Compagnies y Gagnent un Accès Disproportionné Aux Élus

Le lobbying est fondé sur un principe simple : les officiels du gouvernement devraient écouter leurs électeurs.

Transparency International définit le lobbying comme « Toute activité entreprise pour influencer un gouvernement ou la politique et les décisions d’une institution en faveur d’une cause ou d’un résultat spécifique. »

« Même lorsqu’elles sont autorisées par la loi, » disent-ils, « ces actions peuvent devenir perturbatrices [nuisibles à la démocratie et la justice] si des niveaux d’influence hors de proportion existent – de la part de compagnies, d’associations, d’organisations et d’individus. »

Le lobbying d’aujourd’hui n’est pas la simple pratique de gens s’adressant à leurs élus. En fait, c’est une industrie à 3,73 milliards de dollars, étroitement régulée, dominée par des initiés et les plus grandes compagnies, mûrie par la corruption de la « porte tournante » et soutenue par au moins 3 ou 4 milliards de dollars de « lobbying de l’ombre » qui n’est ni régulé ni révélé au public de quelque manière que ce soit.

La régulation du lobbying est essentielle pour son propre fonctionnement en tant que méthode de corruption. Comme dit Ben Price, Directeur Organisationnel National au Fonds de Défense Juridique Environnementale de la Communauté, « la régulation n’est pas vraiment un moyen de réduire la corruption, mais plutôt, les règles légalisent la corruption en en définissant les limites au-delà desquelles elle ne serait plus permise. »

« Ce faisant, » ajoute-t-il, « le principal effet des règles est de protéger les dessous-de-table de la responsabilité légale en légalisant assez pour servir les buts des influenceurs législatifs des grandes compagnies. »

Comme la publicité, les grandes compagnies utilisent le lobbying parce que ça marche.

Des études ont montré que dépenser plus d’argent en lobbying et contributions aux campagnes électorales résultaient en des réductions immédiates d’impôts fédéraux, d’impôts d’état et en plus de contrats fédéraux. Une analyse, étudiant seulement les 200 compagnies les plus « actives politiquement », a découvert qu’elles avaient dépensé 58 milliards de dollars en lobbying auprès du gouvernement fédéral et en « contributions aux campagnes » entre 2007 et 2012, mais avaient reçu 4400 milliards en subventions fédérales, contrats, et autre soutien pendant la même période. C’est un retour sur investissement de 7580%.

Une autre étude a découvert un retour encore plus grand : « en moyenne, pour chaque dollar dépensé pour influencer la politique, les compagnies les plus actives politiquement ont reçu 760 dollars du gouvernement » – un profit de 76000%.

Les Grandes Compagnies Écrivent Nos Lois

Les grandes compagnies utilisent des lobbyistes parce que leur richesse leur permet d’avoir un accès disproportionné au gouvernement, ce qui signifie qu’ils peuvent établir des relations avec des politiciens et leurs équipes, influencer la politique, échanger des idées et même écrire la législation. Ils peuvent aussi corrompre des juges, comme le récent scandale autour de Clarence Thomas l’a montré. Mais ça va plus loin. Comme le note un rapport de la NPR [Radio Publique Nationale], « Il semble évident que les lobbyistes influencent la législation. Mais il est peut-être moins évident qu’ils écrivent souvent les lois – même mot à mot. »

Nos lois sont écrites par les grandes compagnies.

Ce n’est pas seulement un problème fédéral. Une enquête de USA Today de 2012 révéla que plus de 10 000 propositions de lois introduites dans les 50 états sur une période de 8 ans avaient été « presqu’entièrement copiées de textes écrits par des intérêts spéciaux. » Le rapport dit aussi que leur enquête avait détecté ces textes en utilisant des techniques automatisées, et que « le nombre réel est probablement bien plus élevé. »

Nos politiciens écrivent rarement des lois. En fait, les grandes entreprises et les lobbyistes écrivent des lois ; le Congrès vend les lois au public ; puis les lobbyistes paient leurs membres du Congrès en contributions à leurs campagnes, aux Comités d’Action Politique [Super PAC] et aux possibilités d’emplois dans la politique de la « porte tournante. »

La « Porte Tournante »

Un autre moyen de corruption devenu endémique dans le gouvernement de Etats-Unis est ce qu’on appelle la « porte tournante. »

La porte tournante fait référence à une pratique courante chez les employés des grandes compagnies, qui quittent leur emploi pour travailler au gouvernement, et vice versa. Il est tout à fait courant pour des employés du gouvernement et des élus de quitter ou terminer leurs mandats et d’obtenir immédiatement des emplois dans les industries qu’ils sont supposés réguler.

Pourquoi, demandez-vous ? L’Argent. Comme le dit un titre de presse « quand un membre du Congrès devient lobbyiste, il a, en moyenne, 1452% d’augmentation.

À l’occasion, on trouvera des histoires de lobbyistes que se sont fourvoyés dans la corruption pure et simple – Jack Abramoff, par exemple – mais ces histoires sont rares, pas parce que la corruption n’est pas courante, mais parce qu’il faut vraiment violer une loi en tant que compagnie : elle a écrit les lois. Et elle l’a fait délibérément pour rendre sa corruption et son influence sur les campagnes électorales légales.

Dès 2016, environ la moitié des Sénateurs et un tiers des Représentants sont devenus lobbyistes pour toucher leurs chèques. C’est aussi courant chez les Démocrates que chez les Républicains.

Les Activités de Lobby de Lithium Nevada Corp. (au moins celles que nous connaissons)

Lithium Nevada a dépensé au moins 310 000 dollars en lobbying depuis 2016, par l’intermédiaire d’une compagnie de lobby appelée Harbinger Strategies.

Harbinger est « une firme de premier plan pour le gouvernement fédéral et les affaires politiques » qui a été fondée par, et employé des ex aides au Congrès et opérateurs politiques Républicains de haut niveau. Ils sont parmi les principaux lobbyistes à Washington D.C.et ont gagné au total 10,9 millions de dollars en 2021, d’une liste de clients parmi lesquels se trouvaient l’industrie aérienne, les grandes banques et firmes d’investissements, des compagnies minières, de biotechnologie, le complexe militaro-industriel, Facebook, des services d’électricité, General Electric, et l’industrie du pétrole et du gaz.

« Nous utilisons notre expérience d’anciens membres éminents des équipes des Principaux Dirigeants au Congrès et de l’Exécutif pour placer nos clients à la table où les décisions sont prises, » écrivent-ils sur leur site. Ils ajoutent : « [Harbinger est] fondé sur la conviction que chaque client mérite un partenaire expert des questions législatives » – un « modèle de boutique » – qu’ils utilisent pour une raison simple : ça donne des résultats. »

Dans l’état du Nevada, Lithium Nevada Corporation a loué au moins 4 lobbyistes depuis 2017, de deux firmes : Argentum Partners, une firme de communications pour tous services stratégiques… avec une équipe de lobbyistes avides, énergiques et expérimentés, » et Ferrato Corporation, « une firme bipartisane pour tous services d’affaires publiques. »

En particulier, parmi les lobbyistes d’Argentum pour Lithium Nevada, on trouve Mike Draper, qui « était à la tête des relations et des affaires publiques pour la planification, l’autorisation, la construction et l’ouverture du Gazoduc Ruby, le plus grand gazoduc d’Amérique du Nord. » Des Tribus et des écologistes se sont farouchement battus contre le gazoduc Ruby en 2009 et 2010.

Contributions aux Campagnes Électorales

Une autre technique de légalisation de la corruption sont les « contributions aux campagnes », également nommées dons aux politiciens candidats.

Beaucoup de pays dans le monde ont mis des limites strictes à la somme d’argent que les gens peuvent donner aux candidats, ou ont même des campagnes politiques financées par le gouvernement, ce qui supprime presqu’entièrement l’influence de l’argent. Les Etats-Unis ne font pas partie de ces pays.

Les élus aux Etats-Unis ont désespérément besoin d’argent. Le Sénateur moyen doit trouver 14 000 dollars par jour, juste pour rester en place – et cela dès qu’il a été élu une fois. C’est aussi vrai pour les Démocrates que pour les Républicains, raison pour laquelle les grandes compagnies, directement ou par l’intermédiaire de leurs lobbyistes ou employés, misent généralement sur les deux en donnant aux deux partis politiques.

Par exemple, Jonathan Evans, PDG de Lithium Americas Corporation, a donné au moins 10 250 dollars aux candidats entre 2021 et 2022, parmi lesquels Catherine Cortez Mastow (Sénatrice Démocrate du Nevada) et Mark Amodei (Gouverneur Républicain du Nevada). George Ireland, Président de Lithium Americas, a donné au moins 19800 dollars à des candidats depuis 2011, dont 500 dollars pour la campagne de Trump et 6600 à John Hickenlooper. Les données de OpenSecret.org montrent que 7 autres employés, membres du Conseil d’Administration et parties associées ont donné au moins 10819 dollars de plus aux candidats entre 2018 et 2022.

Ces montants ne comprennent pas les contributions BEAUCOUP plus importantes, données par des employés et des membres de la famille de Harbinger Strategies, qui ont donné 392 842 dollars aux candidats pour la seule élection de 2020.

Beaucoup de ces gens donnent un montant équivalent à la limite légale, ce qui implique que si la limite était plus haute, ils donneraient plus – et peut-être essaieraient de trouver des moyens pour contourner les limites des contributions par l’intermédiaire des « Super PACs » et d’autres techniques d’argent caché.

Souvenez-vous que moins d’1,5% des Américains ont donné plus de 200 dollars aux candidats ou aux partis au cours de n’importe quelle année. C’est le domaine des riches.

Les Dessous de Table

L’argent de Lithium Americas est bien employé.

Dans ce qui semble être une contrepartie pour leur lobbying et leurs contributions aux campagnes, Lithium Americas Corporation a obtenu 8 637 357 dollars en réductions d’impôts de l’état du Nevada, entre autres un abattement partiel de taxes sur les ventes de 5 millions, un abattement de l’impôt sur la propriété de 3,3 millions et environ 225000 dollars d’abattements sur la taxe sur la masse salariale. Cet argent n’est plus disponible pour les écoles, la santé, les services sociaux, l’assistance aux petites entreprises, les programmes environnementaux, etc.

Par le Gouvernement Fédéral, Lithium Nevada a reçu un prêt du “Programme de Prêt pour la Fabrication de Véhicules à la Technologie Avancée » (ATVM) du Département de l’Energie, qui couvrira probablement « jusqu’à 75% des coûts de construction à Thacker Pass.

Ce programme de prêts offre des conditions extrêmement favorables équivalant à une subvention de 3 milliards de dollars US.

Selon une estimation très prudente, pour des dons de, disons, 400 000 dollars en lobbying et contributions des employés aux campagnes électorales, Lithium Americas peut espérer un retour sur investissement de 2100 % – et cela sans même considérer l’énorme valeur financière du prêt ATVM.

Corruption au niveau local

La corruption politique va souvent de pair avec la corruption au niveau local.

Le projet de Lithium Americas de détruire Thacker Pass a créé une sérieuse opposition dans la communauté de fermiers et ranchers des zones rurales les plus proches de Thacker Pass, parmi les habitants de la ville proche de Winnemucca, de la part de groupes écologistes préoccupés par les effets sur la vie sauvage, les plantes, l’air et l’eau, et parmi les Tribus Autochtones inquiètes pour leurs sites sacrés et culturellement importants, leurs animaux et leurs plantes médicinales.

La réaction était prévisible. Dans son livre Unearthing Justice : How to Protect Your Community From The Mining Industry, la militante anti-extractivisme Joan Kuyek décrit les mythes incessamment répétés par Lithium Americas et presque toutes les compagnies minières :

  • « La mine créera des centaines d’emplois et enrichira les gouvernements. »
  • « La mine peut enrichir les membres de la communauté et résoudre leurs problèmes sociaux et économiques. »
  • « Les techniques modernes assureront que la mine n’endommagera pas l’eau, l’air ou la vie sauvage. »

Quand ces mythes se révèlent faux, ils recourent à la corruption légalisée. À Thacker Pass, ça prend la forme d’un paiement par Lithium Americas d’une nouvelle école pour la communauté de Orovada, et la signature d’un accord avec un Membre d’un Conseil Tribal local pour la construction d’un centre culturel. Un membre de la tribu, mon amie Shelley Harjo, a répondu : « La promesse de quelques bâtiments et d’un centre culturel ne peuvent l’emporter sur la responsabilité que nous avons envers les ancêtres d’avant nous, ni nos obligations envers ceux encore à naître après nous. » Un autre dirigeant Tribal de la région dit des compagnies minières « Ils profitent de notre pauvreté. »

Cette pauvreté donne un puissant moyen de pression aux compagnies minières. Dans la communauté de Fort McDermitt, les rumeurs de corruption sont courantes.

L’Implication de Lithium America dans des Violations des Droits Humains Outremer

Lithium Americas a des relations d’affaires et personnelles qui recoupent celles de la compagnie Ganfeng Lithium (la plus grande compagnie de lithium au monde), propriété de l’Etat Chinois. En fait, Ganfeng et Lithium Americas sont copropriétaires d’une compagnie minière de lithium en Argentine, appelée Minera Exar.

Le projet minier de Minera Exar est situé dans les Andes, dans le « triangle du lithium », une région aride près des frontières du Chili et de la Bolivie. Au cours des années depuis lesquelles Minera Exar a des activités dans la région, elle a – comme d’autres compagnies d’extraction de lithium dans la même zone – été critiquée pour de graves violations des droits humains et de l’environnement.

Le Washington Post, en enquêtant sur ces violations, écrivit :

« Les compagnies minières ont extrait depuis des années des milliards de dollars de lithium de la région d’Atacama… Mais les Atacama pauvres n’ont pas vu beaucoup de ces richesses… une compagnie de lithium, une entreprise commune Canadienne-Chilienne appelée Minera Exar, a passé des accords avec six communautés aborigènes pour ouvrir une nouvelle mine. L’opération devrait rapporter environ 250 millions par ans en ventes, tandis que chaque communauté recevra un paiement annuel – de 9000 à 60000 dollars – pour des droits étendus sur la surface et l’eau.

L’article ajoute :

« Yolanda Cruz, une dirigeante du village en Argentine, dit qu’elle avait signé [les accords de bénéfices de la communauté avec Minera Exar], mais que maintenant, elle le regrette. À l’époque, elle appréciait la possibilité de créer des emplois pour son village. Mais maintenant, elle s’inquiète, ‘nous allons nous retrouver sans rien’, dit-elle. ‘Le fait est que les compagnies nous mentent – c’est la réalité. Et parfois nous nous contentons de ne rien dire’ dit-elle. ‘Nous ne disons rien mais nous serons ceux qui en pâtirons quand le temps aura passé.’ »

Pendant ce temps, Ganfeng Lithium a annoncé récemment des projets de mines pour les métaux de batteries dans la région de Xinjiang, en Chine, où le Gouvernement Chinois détient et emprisonnent des Ouïghours et d’autres Musulmans pour des travaux forcés et de l’endoctrinement dans des camps.

Gaspillage de Fonds Gouvernementaux

On nous dit que le principal objectif de l’extraction de lithium à Thacker Pass est de réduire l’émission de gaz à effets de serre. C’est un mensonge de plus, un nouveau type de laver plus vert pour les grandes compagnies, qui devient de plus en plus commun. En fait, de nombreuses analyses montrent qu’en réalité, les réductions d’émissions par le passage aux véhicules électriques sont mineures.

La production d’un seul véhicule électrique produit des émissions de gaz à effets de serre – en moyenne 9 tonnes. Cette moyenne s’élève à mesure que la taille des véhicules électriques augmente fortement. Plus ont produit de véhicules électriques, plus il y a d’émissions de gaz à effets de serre. Ainsi, alors que les véhicules électriques réduisent les émissions, comparés aux véhicules à essence, les plus gros véhicules électriques ne les réduisent pas beaucoup. Une analyse du Centre Interdisciplinaire Pour la Justice Environnementale dit que l’électrification des véhicules aux Etats-Unis ne réduira les émissions au niveau national que de 6%.

De plus, la production de lithium à Thacker Pass exigera 700 000 tonnes par an de produits du raffinement du pétrole – du souffre, peut-être largement fourni par les Sables Bitumineux d’Alberta. Tandis que Thacker Pass reçoit des milliards en subventions du gouvernement, les émissions de carbone continuent à augmenter.

Le militant écologiste Paul Hawken, autre exemple, ne met pas les véhicules électriques dans ses 10 meilleures solutions pour le climat. En fait, c’est la 24ème de sa liste, avec dix fois moins d’effet que de réduire le gaspillage alimentaire, près de six fois moins d’effet que l’élimination de l’utilisation de réfrigérants, qui sont de puissants gaz à effets de serre, et derrière des solutions comme la restauration des forêts tropicales (environ 5 fois plus efficace que les véhicules électriques) et la protection des tourbières (plus de 2 fois plus efficace).

La corruption et le gaspillage vont la main dans la main. Les données montrent clairement que si notre but est de réduire les émissions de gaz à effets de serre, donner des subventions pour la mine de lithium de Thacker Pass n’est pas un bon usage des fonds gouvernementaux. C’est du gaspillage.

Si on veut vraiment donner des fonds gouvernementaux pour arrêter efficacement le réchauffement climatique, donner de l’argent aux industries minières est exactement ce qu’il ne faut pas faire.

Plutôt, commencez par les droits des femmes, l’éducation des filles, et rendez disponibles la contraception et le planning familial. Commencez par des initiatives de relocalisation économique. Commencez par isoler les logements convenablement, ce qui pourrait avoir le plus grand effet immédiat sur l’impact du carbone. Commencez par des initiatives de réduction de la demande.

Cessez de gaspiller l’argent des contribuables en subventions pour des entreprises de destruction de la Terre, et commencez par des actions qui comptent vraiment.

La Banalité du Mal

La corruption de Lithium Americas me rappelle ce que la philosophe politique Hannah Arendt appelait « La Banalité du Mal. » À propos d’Eichmann, un officier Nazi qui fut l’un des principaux organisateurs de l’Holocauste, Arendt explique qu’Eichmann ne ressentait pas la culpabilité ; en fait, il n’avait jamais pensé que ce qu’il faisait pouvait être mal : « Il faisait son ‘devoir’… ; il n’obéissait pas seulement aux ordres, il obéissait aussi à la ‘loi’. »

[…]

Lithium Americas n’extermine pas les gens, ce n’est même pas la « pire » des compagnies minières. Ils peuvent même avoir agi entièrement dans les limites de la loi. Et pourtant, ils sont complices d’un génocide culturel, de la destruction écologique pour des gains personnels, et, ce qui pourrait être un crime encore plus grand contre le futur : faire passer pour verte et positive leur destruction, créant ainsi plus d’incitations financières et politiques pour d’avantage de cette folie.

Ils croient que ce qu’ils font est bien et ils « suivent les règles. »

Et Maintenant ?

La corruption à Thacker Pass n’est pas unique. Le lobbying, les contributions aux campagnes électorales, le ‘laver plus vert’, et les pots-de-vin à la communauté sont courants aux Etats-Unis et dans la plupart des pays du monde. Je crois qu’il est vraisemblable qu’il y ait encore plus de corruption dont nous ne savons rien. Peut-être qu’il y a vraiment des échanges de valises pleines de billets. Nous ne pouvons que faire des conjectures. Et, cet article n’a même pas commencé à parler de la complicité du gouvernement dans la violation des lois, la corruption et les violations éthiques à Thacker Pass – une histoire, par certains aspects, encore plus sordide.

Tout cela explique en partie pourquoi les analyses universitaires des Etats-Unis tendent à montrer la « domination de l’élite économique » plutôt qu’une vraie démocratie électorale ou du pluralisme. Les riches dirigent notre pays (et le reste du monde). Notre gouvernement est corrompu, les multinationales sont omniprésentes, et notre monde est détruit.

Pour beaucoup, la situation dans laquelle nous nous trouvons est paralysante. Que pouvons-nous faire face à cela ?

Quand j’ai commencé à protéger Thacker Pass et établi un camp de protestation sur le site où la mine doit être creusée, en plein hiver 2021, je n’avais pas d’illusions. Je savais que les tribunaux n’allaient pas nous sauver. Rappelez-vous, les lois ont été écrites par les grandes entreprises. Je savais que les commentaires publics ne marcheraient pas ; les règles sont écrites pour favoriser les intérêts des grandes entreprises. Je savais que le gouvernement ne serait d’aucune aide, vu que les politiciens sont pour la plupart achetés et payés. Je savais même que les façons standard de protester ne seraient probablement pas efficaces, vu les tactiques de répression et les stratégies de diviser-pour-régner qui ont été depuis des siècles celles des grandes entreprises et des colonisateurs.

En tant que société, nous nous trouvons au cœur de la 6ème extinction de masse, d’une catastrophe climatique et apparemment, d’un dépassement terminal. Et, comme mouvement écologiste, malgré notre action courageuse et inspirée, nous avons été insuffisants.

C’est pourquoi, depuis des années, j’appelle à une révolution écologique – une transformation fondamentale de la société – et m’organise pour faire qu’elle se produise.

Que vous pensiez que c’est nécessaire ou non, nous sommes tous d’accord sur le fait que ce que nous faisons ne marche pas. Je n’ai pas toutes les réponses. Mais je sais qu’il est temps d’aller plus loin.


Le communiqué de la compagnie est dans un charabia encore plus illisible qu’un texte de loi. Il faut souligner cependant que la compagnie n’a pas convenablement consulté les tribus concernées, une rencontre avec quelques membres – favorables – en a tenu lieu. Et surtout, le projet comprend la construction d’une usine d’acide sulfurique et une autre usine de produits chimiques. Les batteries électriques sont le prétexte pour Laver Plus Vert! Et Thacker Pass se trouve au coeur d’une région encore sauvage, qui héberge des espèces rares et menacées.

Christine Prat

Introduction par Brenda Norrell
Communiqué de presse de Lithium Americas
Publié sur Censored News
2 mars 2023
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Lithium Americas a organisé une réunion – baptisée ‘consultation’ – avec des Paiutes de Fort McDermitt, dans leur communauté, dans le nord du Nevada, en février dernier. Auparavant, le président tribal et des membres de sa famille avaient été reçus par Lithium Americas lors de l’ouverture d’un établissement à Reno, en 2022. Des membres de la communauté Paiute de Fort McDermitt dirent qu’on ne leur avait jamais dit qu’un accord avait été passé avec Lithium Americas par quelques membres. Des Paiutes et des Shoshones avaient protesté devant la cour fédérale en janvier, mais la cour n’a pas suspendu la mine de lithium. Trois Nations Amérindiennes ont déposé une nouvelle plainte pour l’interrompre – la Colonie Indienne de Reno-Sparks, la Tribu Paiute de Burns [Oregon] et les Paiutes de Summit Lake. Mercredi, une cour d’appel fédérale a refusé de déclarer une injonction d’urgence pour suspendre la mine de lithium, qui est soutenue comme ‘énergie verte’ par le gouvernement Biden.
Censored News

LITHIUM AMERICAS COMMENCE LA CONSTRUCTION À THACKER PASS
Communiqué de presse de Lithium Americas
2 mars 2023 – Vancouver, Canada : Lithium Americas Corp. (TSX : LAC) (NYSE : LAC) (‘Lithium Americas’ ou la ‘Compagnie’) a le plaisir d’annoncer le commencement de la construction de son projet de lithium à Thacker Pass (‘Thacker Pass’ ou le ‘Projet’), projet dont elle est propriétaire à 100%, dans le Comté de Humboldt, Nevada, suite à la réception de l’autorisation de continuer, du Bureau de Gestion du Territoire (‘BLM’).
« Commencer la construction est une étape décisive pour Thacker Pass, sur laquelle nous travaillons depuis plus d’une décennie » dit Jonathan Evans, Président et PDG. « Nous sommes enthousiastes à l’idée d’engendrer la croissance économique dans le nord du Nevada et de jouer un rôle majeur dans la fourniture nationale de lithium pour véhicules électriques. »
Thacker Pass a le but de produire 80 000 tonnes par an de carbonate de lithium pour batteries (‘Li2CO3’) en deux phases de 40 000 tonnes par an (‘Phase 1’ et ‘Phase 2’). La production de la Phase 1 devrait commencer au cours de la deuxième moitié de 2026. Le Projet devrait créer 1000 emplois pendant la construction, et 500 emplois pendant les opérations. On peut trouver plus d’informations dans le rapport technique intitulé ‘Étude de faisabilité, National Instrument 43-101 Rapport Technique pour le Projet Thacker Pass, Comté de Humboldt, Nevada, USA’ avec une date effective du 2 novembre 2022 (le ‘Rapport Technique’), classé à SEDAR dans le profil de la Compagnie le 31 janvier 2023.
AGENDA DE LA CONSTRUCTION : la construction, y compris la préparation du site, le forage géotechnique, le développement d’une canalisation d’eau et l’infrastructure associée, a commencé.
Des contrats pour les principaux travaux de terrassement ont été attribués, pour des activités qui devraient commencer dans la deuxième moitié de 2023.
Dans le Q4 2022, Bechtel Corporation a obtenu le contrat de l’ingénierie, la gestion de la passation de marchés et de la construction (‘EPCM’) pour la construction de la Phase 1 de Thacker Pass, avec le détail de l’ingénierie à venir.
Des contrats de construction importants ont été attribués, parmi lesquels Lithium Carbonate et Purification. Le contrat pour les usines chimiques de sulfate de magnésium et de carbonate de lithium ont été attribués à Aquatech International LLC (‘Aquatech’). Établi en 1981 et ayant son siège à Philadelphie, Aquatech est leader dans la technologie de purification de l’eau pour les marchés industriels et d’infrastructure, en particulier la désalinisation, le recyclage et la réutilisation de l’eau et la décharge de liquide zéro (‘ZLD’).
L’usine d’Acide Sulfurique. Le contrat pour l’ingénierie, la passation de marchés, le support à la construction, la mise en service et les services de start-up pour l’usine d’acide sulfurique, a été attribué à EXP Global Inc. (‘EXP’). Établi en 1906 et ayant son quartier général opérationnel à Chicago, EXP est leader pour le pétrole, le gaz et les produits chimiques. Le contrat pour la licence technologique, l’ingénierie et l’équipement pour maîtriser la perte de chaleur et produire de la vapeur qui finalement sera convertie en électricité sans carbone pour l’usine, a été attribué à MECS Inc. (‘MECS’) pour leur système de pointe de récupération de la chaleur.
La sélection a commencé, pour un contrat et l’ingénierie d’un Centre de Main-d’œuvre (logement pour les contractants de la construction) et un centre de transbordement dans la région de Winnemucca.
La construction à Thacker Pass a commencé, suite à une décision favorable de la Cour de District US, District du Nevada (‘Cour Fédérale) pour l’émission d’un procès-verbal de décision (‘ROD’), dans lequel la Cour Fédérale confirme que le processus d’autorisation pour Thacker Pass a été mené complètement et de manière responsable. La Cour Fédérale a refusé d’annuler le ROD et a ordonné au BLM de prendre en considération un problème relevant de la loi minière concernant la zone désignée pour le stockage de déchets et n’a pas imposé de restrictions qui pourraient impacter l’agenda de la construction. La Compagnie travaille en étroite collaboration avec le BLM pour effectuer le suivi exigé et ne s’attend pas à ce que ça influence l’agenda général de la construction.

Nord du Nevada, sud de l’Oregon, tribus concernées par la dernière poursuite en justice.


Par Max Wilbert
17 février 2023
Également publié par Censored News
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Pour les lieux cités, voir carte en bas de l’article

RENO, Nevada – Trois tribus Amérindiennes ont déposé une nouvelle plainte contre le Gouvernement Fédéral à propos d’un projet de mine de lithium à Thacker Pass de la compagnie Lithium Nevada Corporation. C’est la dernière action en date de ce qui est maintenant une lutte de deux ans contre l’extractivisme, le ‘laver plus vert’ et pour les terres sacrées du Nord du Nevada.

La plainte, déposée par la Colonie Indienne de Reno-Sparks, la Tribu Paiute de Burns et la Tribu Paiute de Summit Lake à la Cour de District Fédérale jeudi soir, comprend trois principales allégations.

Premièrement, les tribus affirment que le Bureau de Gestion du Territoire (BLM) a gardé secrètes des informations cruciales du Bureau de Préservation Historique de l’état du Nevada et a menti sur la portée de la consultation tribale afin de s’assurer un acquiescement légal sur les propriétés historiques de Thacker Pass.

Deuxièmement, les tribus affirment que Lithium Nevada, avec la complicité du BLM, a menti sur l’abandon d’une série de vieux permis pour des activités minières à Thacker Pass. De plus, les tribus disent que le BLM, sans notifier les tribus ou le public, a étendu des dizaines de fois les autorisations de permis précédents, permettant à Lithium Nevada d’entreprendre des activités préliminaires à la construction d’une mine, qui endommagent les propriétés culturelles traditionnelles de Thacker Pass.

Troisièmement, la plainte avance que le BLM a menti sur une consultation avec les Tribus avant de publier leur Rapport de Décision et que l’agence a continuellement refusé d’admettre les faits historiques oraux et écrits présentés par les Tribus, concernant le caractère sacré et l’importance culturelle de Thacker Pass.

Au total, la plainte affirme que le BLM a violé la Loi sur la Politique Fédérale du Territoire, la Loi Nationale sur la Préservation Historique et la Loi de Politique Nationale Environnementale, et est aussi coupable de Rupture de Contrat.

Cette plainte vient juste une semaine après que la Juge Miranda Du ait tranché largement en faveur de Lithium Nevada et du BLM, dans une affaire précédente concernant des plaintes déposées en 2021 par des groupes environnementaux, un rancher local, et deux tribus Amérindiennes (la Colonie Indienne de Reno-Sparks et la Tribu Paiute de Burns).

Cependant, cette affaire ne portait que sur le évènements et les informations d’avant le 15 janvier 2021, jour où le BLM a publié son Rapport de Décision (ROD) – principal permis fédéral – pour le projet de mine de lithium de Thacker Pass. Les plaintes des tribus ont été restreintes par cette limite, qui a empêché des preuves cruciales d’être entendues – preuves qui figurent intégralement dans la nouvelle plainte.

La nouvelle plainte est renforcée par la participation de la Tribu Paiute de Summit Lake, une des Tribus que le BLM prétend avoir consultée avant de publier son Rapport de Décision. Summit Lake et les deux autres tribus que le BLM prétend avoir consultées (la Colonie Indienne de Winnemucca et la Tribu Paiute-Shoshone de Fort McDermitt) contestent l’assertion du BLM qu’une quelconque consultation ait eu lieu. (La Colonie Indienne de Winnemucca avait déposé pour intervenir dans l’affaire précédente, mais avait été empêchée d’y prendre part par la Juge Du, pour avoir cherché à intervenir trop tard.)

Les trois tribus considèrent Thacker Pass, ‘Peehee Mu’Huh’ en Paiute, comme sacré et comme site culturel important qui est utilisé pour cueillir des plantes comestibles et médicinales, chasser et pêcher, tenir des cérémonies, camper, et pour le mode de vie quotidien des Paiutes et Shoshones. Beaucoup d’histoires orales, transmises de génération en génération parmi les communautés Autochtones de la région, en disent long sur l’importance de cette zone.

Thacker Pass est aussi le site de deux massacres de Paiutes – l’un qui s’est produit avant la colonisation, au cours d’un raid intertribal, et le second qui a eu lieu le 12 septembre 1865, au cours duquel des troupes fédérales ont massacré entre 31 et 50 Paiutes, hommes, femmes et enfants, dans une attaque-surprise à l’aube.

Une grande partie de cette histoire a été rassemblée pour la première fois dans un rapport ethnologique extensif commandé par la Colonie Indienne de Reno-Sparks et la Tribu Paiute de Summit Lake, et intitulé « Thacker Pass/Peehee Mu’Huh : Un Monument Vivant à l’Histoire et la Culture Numu. » Les tribus ont soumis ce rapport au Département de l’Intérieur le 3 février dernier, dans le cadre d’une demande de placer le site du massacre de 1865 et tout Thacker Pass, que les tribus appellent le « District Culturel Traditionnel de Thacker Pass, dans le Registre National des Lieux Historiques. (Numu est le nom que se donnent les Paiutes du Nord.)

Arlan Melendez, Président de la Colonie Indienne de Reno-Sparks :

« Quand la décision sur l’affaire précédente a été rendue publique, la semaine dernière, nous avons dit que nous continuerions à défendre notre site sacré PeeHee Mu’Huh. Un lieu où, avant la colonisation, tous nos ancêtres Paiutes et Shoshones vivaient depuis d’innombrables générations. Et à cet endroit même, ils ont été massacrés (et jamais inhumés convenablement pour reposer) par la Cavalerie des Etats-Unis. C’est un lieu où tous les Paiutes Shoshones continuent à prier, cueillir des plantes médicinales et comestibles, à honorer nos parents non-humains, à honorer notre eau, à honorer notre mode de vie, à honorer nos ancêtres.

Nous avons un contentieux avec la plus grande mine de lithium du pays et l’expansion de plus de 40 autres concessions de lithium envisagées pour l’état du Nevada. Ils auraient dû le notifier aux Tribus plus tôt. La procédure d’attribution de permis pour Thacker Pass n’a pas été faite correctement. Le BLM prétend avoir le droit de décider à son gré qui informer et qui consulter. Ils n’ont contacté que 3 des 22 tribus qui ont des liens importants avec Thacker Pass.

L’une des premières actions du Gouvernement Biden, lorsqu’il est entré en fonctions, a été de rendre prioritaire ‘la consultation régulière, significative et solide’ avec les Tribus. Ça ne s’est pas produit pour Thacker Pass, et il faut que le Gouvernement Fédéral corrige cela. Notre histoire, notre culture, notre peuple et nos sites sacrés doivent être protégés. »

Diane Teeman, Directrice du Département de la Culture & de l’Héritage, Présidente du Conseil Tribal, Tribu Paiute de Burns :

« Thacker Pass est connu comme un lieu spirituellement puissant, à cause de la présence des dépouilles d’Ancêtres tribaux et de leurs esprits. Notre histoire orale Paiute nous dis que nous, les Paiutes, vivons dans cette région depuis avant la formation des Montagnes Cascade. Notre peuple suit les lois tribales traditionnelles non-écrites et une philosophie de la vie qui exige que nous respections toutes les autres choses vivantes, entre autres les plantes, les animaux, les minéraux, etc. Nos voies traditionnelles demandent que nous vivions en réciprocité avec toutes les autres choses et ne nous mettions jamais, en tant que faibles humains, au-dessus des autres. Pour cette raison, notre loi tribale traditionnelle non-écrite exige que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir pour les protéger. Seule la Tribu et ses membres peuvent parler de l’importance d’une région pour la Tribu. »

Will Falk, avocat représentant la Colonie Indienne de Reno-Sparks et la Tribu Paiute de Summit Lake :

« Le BLM a accéléré son étude du Projet de Mine de Lithium de Thacker Pass et a été si vite qu’il a commis plusieurs erreurs, entre autres ne pas avoir cité le site du massacre du 12 septembre 1865, bien qu’il soit en possession de descriptions de ce massacre dans ses propres fichiers du Bureau Général du Territoire. Les Tribus ont notifié au BLM l’importance culturelle, spirituelle et historique de Thacker Pass, mais le BLM continue à refuser d’admettre ces informations. Le fait que le BLM n’ait pas reconnu les informations que les Tribus ont fournies sur l’importance de Thacker Pass n’a pas été pris en compte par le tribunal lors de la précédente affaire. Le BLM a commis plusieurs violations de la loi fédérale depuis la première plainte déposée en 2021. Mes clients et moi-même attendons de pouvoir dénoncer les artifices que le BLM a employé contre les Tribus pour le Projet de Thacker Pass. »

Michon Eben, Agent de la Préservation Historique Tribale de la Colonie Indienne de Reno-Sparks :

« L’une des responsabilités du Gouvernement Fédéral est de déterminer si un projet de mine peut affecter négativement des propriétés historiques. Les propriétés historiques incluent les sites de massacres d’Amérindiens. Le BLM a failli à sa responsabilité envers les tribus et maintenant le lieu de repos final de nos ancêtres est en train d’être détruit à Peehee Mu’Huh. Comment se fait-il que, quand les tombes de nos ancêtres sont menacées, c’est du ‘business as usual’ ? Nous exigeons le respect mutuel pour nos parents morts et leur lieu de repos éternel. Le BLM et les archéologues non-Autochtones n’ont pas les connaissances pour déterminer si une propriété a une importance religieuse ou culturelle pour une tribu. Les tribus Amérindiennes sont les experts spécifiques de notre culture et Peehee Mu’Huh/Thacker Pass est important pour les tribus de la région et pour l’Histoire Américaine. »

Shelley Harjo, Membre de la Tribu de Fort McDermitt :

« Sommes-nous prêts à sacrifier des sites sacrés, notre santé et l’équilibre interne pour des gains économiques à court terme, alors que des compagnies gigantesques créent une richesse incommensurable, épuisent les ressources et laissent nos générations futures supporter le désordre que la mine de Thacker Pass laisserait derrière elle ? Je ne croirai jamais que ce soit la meilleure méthode pour une vie plus verte et beaucoup d’autres Autochtones dans notre région ne le croient pas non plus. Mes parents âgés qui sont allés pêcher ou cueillir des plantes médicinales à Thacker Pass ont été suivis et harcelés par la sécurité privée de Lithium Nevada, et disent maintenant qu’ils ne se sentent plus en sécurité dans leur propre terre ancestrale. C’est une tactique brutale inacceptable contre des femmes âgées par une compagnie minière étrangère qui n’a rien à faire ici. »

Max Wilbert, Protect Thacker Pass :

« Le réchauffement climatique est un problème sérieux et nous ne pouvons pas continuer à brûler des carburants fossiles, mais détruire des montagnes pour du lithium est aussi désastreux que détruire des montagnes pour du charbon. Vous ne pouvez pas faire sauter une montagne et dire que c’est ‘vert’. »

Le projet de mine de Thacker Pass est devenu emblématique de ce que les critiques appellent une transition précipitée vers « l’énergie verte » qui reproduit beaucoup des problèmes posés par l’industrie des carburants fossiles, qui conduisent à des dommages environnementaux énormes et frappent les communautés en première ligne. Les opposants de Thacker Pass disent qu’ils ne défendent pas les carburants fossiles, mais sont en faveur de la protection de la Terre. Lithium Nevada affirme que sa mine de lithium sera essentielle pour produire des batteries pour combattre le réchauffement climatique, et le gouvernement Biden avait déjà montré un certain soutien pour Thacker Pass. Les opposants au projet appellent cela « laver plus vert », et soulignent que le projet affecterait un habitat important pour la vie sauvage et créerai une pollution importante, entre autres des gaz à effet de serre. Ils disent que les voitures électriques sont dangereuses pour la planète et qu’une approche différente est nécessaire pour faire face à la crise climatique.

General Motors a récemment passé un accord d’écoulement avec Lithium Americas, la compagnie mère de Lithium Nevada, pour acheter pour 650 millions de dollars d’actions et acheter le lithium produit à Thacker Pass. Des médias ont déclaré que l’accord dépendait des résultats de la poursuite en justice précédente. Pour le moment, il n’est pas clair quel sera l’effet de la nouvelle plainte sur l’accord de General Motors.

Devant la Cour Fédérale de Reno, en janvier 2023


« Nous nous attendions à cette décision depuis quelque temps, » dit Arlan Melendez, Président de la Colonie Indienne de Reno-Sparks. « Ça ne veut pas dire que la consultation n’a pas été faite correctement, et ça ne veut pas dire que ce combat est terminé. Nous continuerons à défendre ce site sacré. »

Par la Colonie Indienne de Reno-Sparks
Contacts : Bethany Sam, Will Falk, Max Wilbert
Publié par Censored News
le 8 février 2023
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

RENO, Nevada – Lundi [6 février 2023], la Juge Miranda Du a prononcé sa décision dans les affaires concernant Thacker Pass, entre autres la poursuite en justice de la Colonie Indienne de Reno-Sparks et de la Tribu Paiute Burns contre le Bureau de Gestion du Territoire.

La Juge Du s’est prononcée contre la Colonie Indienne de Reno-Sparks et tous les autres plaignants, à part sur un argument limité. Elle a trouvé que le Bureau de Gestion du Territoire (BLM) n’avait pas vérifié si Lithium Nevada possédait des droits valides sur les minéraux pour 527 hectares sur les 7300 que la mine devrait couvrir. La Juge a autorisé les travaux pour le reste de la mine, tandis que le BLM vérifie si Lithium Nevada possède ces droits.

« Nous nous attendions à cette décision depuis quelque temps, » dit Arlan Melendez, Président de la Colonie Indienne de Reno-Sparks. « Ça ne veut pas dire que la consultation n’a pas été faite correctement, et ça ne veut pas dire que ce combat est terminé. Nous continuerons à défendre ce site sacré. »

L’avocat de la Colonie Indienne de Reno-Sparks, Will Falk, dit au cours d’une déclaration « La loi est une tactique limitée – spécialement dans les affaires de mines sur des terres publiques, où la loi présume que les entreprises minières ont un droit d’extraction. Si nous voulons vraiment protéger Thacker Pass, nous allons devoir faire plus que des poursuites en justice et plaider au tribunal. Nous ne pouvons pas compter sur le gouvernement ou un juge pour protéger Thacker Pass. Nous devrons le faire nous-mêmes. »

Will Falk est co-fondateur de Protéger Thacker Pass, qui a dirigé un camp de protestation sur le site pendant presque toute l’année 2021.

Thacker Pass, Peehee Mu’Huh en Paiute, est un site sacré pour les tribus de la région dont les ancêtres ont vécu là depuis des milliers d’années, et y ont été massacrés au XIXème siècle. C’est aussi un habitat vital pour la vie sauvage, entre autres des antilopes d’Amérique, des tétras des armoises [grouses], des aigles royaux, des cerfs mulets et une espèce menacée d’escargots d’eau appelée Pyrg de King’s River.

Lithium Nevada affirme que sa mine de lithium sera essentielle pour produire des batteries, afin de combattre le réchauffement climatique, et le gouvernement Biden avait déjà indiqué soutenir dans une certaine mesure le projet de Thacker Pass. Les opposants au projet appellent cela « Laver plus vert », soulignant que le projet endommagerait un habitat sauvage important et créerait une pollution significative. Ils disent que les véhicules électriques sont toujours nocifs pour la planète.

Jeudi 5 janvier, une coalition d’opposants à un projet de mine de lithium dans le Nevada, devaient plaider au tribunal de Reno l’illégalité du projet. Le même jour, des soutiens ont manifesté dans les rues de Reno. La décision du tribunal ne sera connue que dans quelques mois. En principe, cela aurait dû bloquer le projet jusqu’à la décision, mais la compagnie a déjà commencé à détruire le paysage : le 8 janvier, Max Wilbert a constaté que les bulldozers avaient déjà commencé, illégalement. Deux jours avant la session du tribunal et la manifestation à Reno, Protect Thacker Pass avait publié un communiqué de presse qui expliquait la position des opposants et les dégâts que la mine pourrait causer. Communiqué de Presse 3 janvier 2023 Contacts: John Hadder, Great Basin Resource Watch Kevin Emmerich, Basin and Range Watch Katie Fite, Wildlands Defense Greta Anderson, Western Watersheds Project Des Groupes de Conservation et de Responsabilité Publique devaient plaider l’illégalité du projet de mine de lithium à Thacker Pass (Nevada) RENO, Nevada – Jeudi 5 janvier 2023, une coalition de groupes de conservation et de responsabilité publique, des Tribus et un fermier de Thacker Pass, présenteront des arguments oraux en opposition à la Déclaration Finale d’Impact Environnemental et au Registre de Décision du District du Nevada, et attaquant l’approbation par le Bureau de Gestion du Territoire de la Mine de Lithium de Thacker Pass. Le processus a été accéléré par le gouvernement Trump et a terminé son examen environnemental en moins d’un an, en dépit de l’énorme impact environnemental sur les 7000 hectares de terres publiques qui seraient affectées par l’opération. Les plaignants citeront les violations de lois fédérales par le Bureau, entre autres la Loi de Politique Environnementale Nationale et la Loi Fédérale de Politique et de Gestion du Territoire, lorsqu’il a approuvé les Plans d’Opération de la Mine de Lithium de Thacker Pass, le 15 janvier 2021. Thacker Pass est d’une importance vitale pour la vie sauvage, parce qu’il relie les Montagnes Double H aux Montagnes Montana. Le col constitue aussi un habitat de basse altitude dont la vie sauvage a besoin pour survivre en hiver. Ça va éliminer des milliers d’hectares d’habitat des plus importants pour les tétras des armoises [une variété de grouses], et deux couloirs de migration pour les antilopes à longues cornes. Les aigles royaux qui font leurs nids dans les falaises proches, y trouvent de quoi nourrir leurs petits. Les sources locales sont le seul endroit dans le monde où le pyrg, une sorte rare d’escargots d’eau, vit encore. Il y a d’autres espèces menacées par la mine de Thacker Pass, sur la liste de la Loi sur les Espèces menacées, comme la truite fardée Lahontan, le mouflon d’Amérique et les lapins pygmées. « Le paysage des Montagnes Montana sont depuis longtemps considérées comme zone vitale pour la protection de la biodiversité dans le Nevada » dit Katie Fite, Directrice des Terres Publiques pour la Défense des Terres Sauvages. « Avec les terres sauvages de l’Oregon voisin, elles constituent l’un des derniers grands blocs d’armoise préservés du développement. Des lapins pygmées, des oiseaux migrateurs et autre vie sauvage ont déjà subi un coup dur à cause d’un incendie, il y a une décennie et l’habitat n’est pas encore reconstitué. Maintenant, cette méga-mine va oblitérer le reste vital d’armoise. L’empreinte régionale de la mine va porter un coup fatal aux espèces sauvages qui luttent pour survivre et causera un nouveau déclin. » Les plaignants feront valoir aussi que le BLM n’a pas fait son devoir de protéger les ressources publiques en autorisant une min qui sera une source de pollution des eaux souterraines pour au moins 300 ans et en n’exigeant pas d’assurances de financement à long terme. « La permission irresponsable de la mine de lithium de Thacker Pass constitue un mauvais précédent pour la Transition Energétique. » dit John Hadder, Directeur de la Surveillance des Ressources du Grand Bassin. « Nous nous trouvons maintenant dans une situation dans laquelle le BLM a précipité, avant l’état du Nevada, la procédure d’autorisation, avec comme résultat un permis fédéral qui autorise la contamination de l’eau souterraine par le puits de mine, qui avait été rejetée par l’état du Nevada. » Le Bureau de Gestion du Territoire [BLM] doit gérer Thacker Pass et les montagnes de passage pour préserver l’habitat essentiel de la grouse d’armoise, l’armoise ancienne, les nids d’aigles royaux, les escargots d’eau locaux et autre vie sauvage » dit Kevin Emmerich, Cofondateur de la Surveillance du Bassin et de la Chaîne. « Le panorama unique et les cieux sombres devraient être gérés de façon à préserver le caractère existant du paysage. Le puits ouvert, les déchets de roches, le bruit et l’utilisation d’eau nécessaire à la Mine de Lithium de Thacker Pass causeraient des dégâts irréparables à ce qui reste de bastion pour la vie sauvage locale, et le panorama serait saccagé pour toujours. » « Nous avons besoin d’une énergie intelligente pour le futur, qui fait la transition des carburants fossiles vers du renouvelable, sans sacrifier des espèces rares, » dit Greta Anderson, sous-directrice du Projet des Bassins Aquifères de l’Ouest. « Nous ne pouvons pas résoudre la crise climatique en accentuant la crise de la biodiversité. » L’extractivisme moderne à grande échelle est très destructeur des écosystèmes naturels et préjudiciable pour les communautés proches. Le Panel International des Ressources des Nations Unies estime que « 90% de la perte de biodiversité et de la crise de l’eau sont causés par l’extraction et le traitement des ressources. » Et le Panel note aussi qu’ « Annuellement, l’extraction de métaux et de minéraux a augmenté de façon significative, de 11,6 milliards de tonnes en 1970 à 53,1 milliards de tonnes en 2017, causant 20% des impacts climatiques. » C’est pourquoi il est essentiel que l’examen d’opérations minières soit fait avec soin, judicieusement, et de manière à permettre que toutes les conséquences du projet de mine soient complètement explorées et solutionnées. Il n’y a jamais de temps pour ‘expédier’ l’autorisation d’une mine, même pour du lithium et autres métaux de « transition énergétique ». Accélérer est un pas en arrière, qui fera accepter des projets de mine incomplètement analysés qui permettront sans nécessité des dégâts pour l’environnement et s’effectueront en passant sur les inquiétudes des communautés directement affectées. La procédure d’autorisation du projet de mine de lithium à Thacker Pass sert d’exemple de ce qu’il ne faut pas faire et a donc provoqué ces poursuites. Selon les Plans d’Opération de la Corporation Lithium Nevada, la mine impliquerait :
  • Excavation d’un grand puits à ciel ouvert long d’environ 3,7 km et au plus large de 800 m.
  • Extraction de 17, 2 millions de tonnes de roche et de minerai par an (phase 2)
  • La perturbation directe de 2300 hectares de surface (le projet total serait de 7260 hectares)
  • Une usine d’acide sulfurique sur place – 5800 tonnes d’acide par jour pendant la phase 2
  • Pomperait jusqu’à 6,4 milliards de litres d’eau par an
  • Durée estimée de 41 ans et 5 ans de réparation
Les avocats de Western Mining Project et Western Watersheds Project représentent Western Watersheds Project, Great Basin Resource Watch, Basin and Range Watch, et Wildlands Defense. Western Watersheds Project – Projet des Bassins Aquifères de l’Ouest – est une organisation à but non lucratif d’intérêt publique qui travaille avec les communautés pour protéger leur santé, leur sol, leur air, leur eau et la vie sauvage du Grand Bassin des effets négatifs de l’extractivisme. Basin and Range Watch est une association à but non lucrative selon 501(c)(3) qui s’efforce de préserver les déserts du Nevada et de Californie et d’informer le public de la diversité de vie, de culture, et d’histoire des écosystèmes et des terres sauvages du désert. Wildlands Defense s’inspire et soutient la préservation des terres sauvages, de la vie sauvage et de la biodiversité dans l’Ouest [au cinéma, Far West]. *Le Pyrg de Kings River est une espèce vitalement menacée d’escargots d’eau, connue seulement dans 13 sources isolées de Thacker Pass. Une mine de lithium assurer sans aucun doute la perte de cette espèce pour toujours.



Christine Prat, CSIA-Nitassinan
13 novembre 2022
Photos Max Wilbert

Les photos de la région de Thacker Pass sont de ©Max Wilbert et sont utilisées avec sa permission. Utilisation commerciale interdite, diffusion du message fortement encouragée.

Les médias publics français ne parlent que rarement des Autochtones d’Amérique du Nord, et toujours au passé : ils ont été exterminés, c’est triste mais on n’y peut rien. Lorsqu’ils doivent parler des plus de 1000 tests de bombes atomiques dans le Nevada, ils précisent que c’est dans un désert inhabité ! À seulement quelques dizaines de kilomètres de la région la plus peuplée du Nevada… Evidemment, ils ne parlent jamais du projet de site d’enfouissement profond de déchets hautement radioactifs, au même endroit, ça rappelle trop Bure. Même chose pour le projet de mine de lithium à Thacker Pass, dans le nord du Nevada, la France veut en creuser dans le Massif Central.

Hélas, j’ai remarqué que même les Français qui s’intéressent aux Autochtones d’Amérique du Nord, s’intéressaient beaucoup moins aux menaces de mines de lithium qu’aux autres problèmes. Croient-ils ce que dit France-Culture ? Ou comptent-ils déjà acquérir un véhicule électrique et préfèrent ne pas savoir que ça pollue autant que les voitures à essence ?

Les mines de lithium polluent et détruisent l’environnement. Le lithium est en soi toxique, et l’extraction de quelque minerai que ce soit se fait en utilisant des produits dangereux. L’extraction du lithium et le traitement du minerai exigent l’utilisation de milliards de litres d’eau – dont une partie reste polluée pour au moins 300 ans – et ça laissera un tas de déchets gigantesque, selon un article du New York Times de 2021. Le fonctionnement de la mine devrait brûler plus de 98000 litres de diesel par jour. Ça exige aussi la construction de routes pour le transport, l’utilisation de camions au diesel, etc. C’est autant de territoire détruit pour une faune et une flore rares et menacées. L’article du New York Times dit : « Les voitures électriques et l’énergie renouvelable pourraient ne pas être aussi vertes qu’elles paraissent. La production de matériaux comme le lithium, le cobalt et le nickel, qui sont essentiels pour ces technologies, est souvent désastreuse pour le sol, l’eau, la vie sauvage et les gens. »

Thacker Pass est un site sacré et historique pour les Paiutes de la région, en 1865 la Cavalerie y a commis un massacre. Les compagnies explorent la région depuis 2007 et maintenant, l’autorisation du projet est accélérée. Les habitants n’ont pas été consultés convenablement. Des Autochtones, des groupes écologistes et un rancher de la région sont allés en justice. Ils ont besoin de soutien. Faire connaître le problème au maximum est déjà un moyen de pression. Pour plus de détails sur Thacker Pass et les mines de lithium, voir l’article de Max Wilbert, écologiste, auteur et photographe, traduit en français sur ce site.

Cartes des régions citées:

 



Par Max Wilbert
Protect Thacker Pass
12 octobre 2022
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan
Photos et article Max Wilbert, utilisés avec autorisation

À Thacker Pass, la « Sécurité Nationale » est utilisée abusivement pour couvrir des horreurs

J’étais encore un gamin quand les invasions de l’Iraq et de l’Afghanistan ont commencé, mais je comprenais ce qui se passait. Des grandes entreprises se faisaient de l’argent par tous les moyens possibles : vendre des haricots, des balles et des pansements, signer des contrats lucratifs pour la construction de nouvelles bases militaires, remplacer les employés du service publique par des contractants privés, d’unités de combat à l’hôpital des vétérans, et capitaliser sur les occasions de gains énormes dans la reconstruction et le pétrole.

Maintenant, en tant qu’écologiste militant et auteur, j’applique la même logique à la crise climatique.
Il y a des parallèles surprenants entre la « guerre au terrorisme » en Iraq et en Afghanistan et le changement climatique. Ils se caractérisent par la peur du public, des risques existentiels, des luttes de pouvoir géopolitiques, des manipulations de l’opinion publique, et d’énormes sommes d’argent.

Tandis que le réchauffement s’intensifie, des milliers de milliards de dollars en subventions gouvernementales et en dépenses du consommateur se déversent sur les fabricants de « technologie verte ». Les constructeurs d’automobiles, de Ford à Volkswagen, ont annoncé leurs projets d’arrêter de fabriquer des voitures à essence ou diesel, et de ne plus produire que des véhicules électriques. Et comme des sources intermittentes comme l’éolien et le solaire sont ajoutées aux réseaux d’électricité, les services publiques investissent dans des banques de batteries grandes comme des entrepôts pour stabiliser la fourniture de courant.

Tout cela conduit à une demande vertigineuse de matières premières comme le lithium, le graphite, le cobalt, le nickel et les métaux rares. L’Agence Internationale de l’Energie, par exemple, estime que la demande de lithium va augmenter de 4200% au cours des 20 prochaines années. Les prix du lithium ont quintuplé rien que dans l’année écoulée, étant donné que la demande dépasse très largement l’offre. Et cette demande croissante pousse les compagnies minières à explorer et développer des nouvelles mines partout dans le monde.

Le Nevada est une zone sensible, où il y a actuellement 17 375 concessions minières pour du lithium et environ 50 projets de mines en développement. Le plus grand est à Thacker Pass, situé au nord de l’état. Mais c’est là qu’il y a conflit : à part une riche source de lithium, Thacker Pass est aussi l’habitat d’une importante biodiversité, hébergeant des espèces rares, et est culturellement important comme site de deux massacres de Paiute du Nord et de Shoshone de l’Ouest.

Je me bats contre l’industrie des carburants fossiles et je fais des reportages des lignes de front du chaos climatique depuis des décennies, et pour moi il est clair que nous devons arrêter immédiatement de brûler des carburants fossiles. Cependant, je mets en doute l’idée que la technologie est la solution. Sur au moins un plan important, la « technologie verte » ne diffère pas des carburants fossiles : c’est le monde naturel qui fait les frais de son extraction et de son développement.

L’importance environnementale et culturelle de Thacker Pass, et les questions sur l’efficacité du lithium comme panacée contre la crise climatique, ont catalysé un sérieux mouvement de résistance pour « Protéger Thacker Pass », mouvement fait de manifestations, de batailles sur les règlements, d’une occupation du site prévu pour la mine pendant un an, et de poursuites en justice.

Devant un tribunal fédéral, contre deux Tribus Indiennes, quatre groupes écologistes et un rancher local, qui sont allés en justice pour empêcher l’ouverture de la mine de lithium de Thacker Pass, l’avocat de la Lithium Nevada Corporation a récemment écrit que « Le projet [à Thacker Pass] est important […] pour assurer que les Etats-Unis ne dépendent pas de sources étrangères pour des matières premières cruciales ceci étant une question de sécurité nationale. »

Je ne marche pas.

Peut-être parce que je suis assez vieux pour me souvenir d’un monde d’avant l’invasion des téléphones portables, mais pour moi il est évident que le lithium n’est pas plus « crucial » que Hummers ou TikTok. Ce qui est vraiment crucial sont les besoins de base : la nourriture, l’eau, un abri, de l’air pur, et une planète vivante.
Quand les avocats de Lithium Nevada et le gouvernement des Etats-Unis affirment que le lithium est une « matière première cruciale » et que faire exploser une face de montagne, détruire l’habitat de la vie sauvage et des sites sacrés Amérindiens, et polluer plus de 18 millions de litres d’eau par jour, n’est pas important parce qu’ouvrir une mine de lithium est « une question de sécurité nationale » qui pourrait « avoir des conséquences importantes pour l’économie, » j’appelle ça de la merde.

Leur logique, selon laquelle nous devons « concurrencer » d’autres nations sur la scène mondiale pour établir notre domination, est une triste relique de l’héritage colonial impérialiste de ce pays.
En février 1948, George Kennan – chef du Département d’Etat pour le Planning Politique, et l’une des personnes les plus influentes du gouvernement – écrivit un extraordinaire rapport Top-Secret, qui ne devait être déclassifié qu’au bout de 26 ans. « [Les Etats-Unis possèdent] environ 50% de la richesse du monde, mais seulement 6,3% de sa population, » écrivait Kennan dans le mémorandum PPS23. « Notre véritable tâche est de créer un schéma de relations qui nous permettra de maintenir cette position de disparité sans détriment pour notre sécurité nationale. »
Ceci, peut-être plus qu’aucune autre citation, révèle crument les buts de l’appareil de sécurité nationale : pas de protéger des vies, mais de « maintenir cette position de disparité. »
Kennan poursuivait : « Pour ce faire, nous devrons nous dispenser de toute sentimentalité et de rêverie ; et notre attention devra être concentrée partout sur nos objectifs nationaux immédiats. Nous ne devons pas nous faire d’illusions, nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de l’altruisme et de la bienfaisance mondiale. »

Aujourd’hui, les matières premières sont le nouvel or blanc, et un « Partenariat pour la Sécurité des Matières Premières » a été formé entre les Etats-Unis, le Canada, l’Australie, la France, l’Allemagne, le Japon, la République de Corée, la Suède, le Royaume-Uni et la Commission Européenne. Reuters appelle ça un « OTAN Métallique » – bien vu, si on considère qu’une guerre contre le territoire et la guerre moderne sont impossibles sans l’extractivisme. Le Président Biden l’a reconnu en mars dernier, quand il a amendé la Loi de Production pour la Défense, une loi du temps de la Guerre Froide, pour autoriser la Défense à promouvoir l’extractivisme domestique.

De gros profits, tandis que le pays est détruit. C’est de cette soi-disant sécurité nationale que parle Lithium Nevada. Ça n’a rien de nouveau. Les riches et les puissants abusent depuis longtemps de la notion de sécurité nationale pour déguiser leurs buts égoïstes.
Par exemple, considérez les attentats du 11 septembre contre le World Trade Center, qui a conduit aux guerres en Afghanistan et en Iraq mentionnées plus haut, 900 000 morts, surveillance de masse illégale, extraditions extraordinaires [vers d’autres pays où les droits humains comptent moins – NdT], « interrogatoires poussés », et 8000 milliards de dollars de coûts – dont beaucoup sont allés à des compagnies comme Halliburton (dont le Vice-Président Dick Cheney avait été le PDG avant d’entrer au gouvernement).
Ou pensez à la guerre du Vietnam, où une décennie de bataille a résulté en des millions de morts Vietnamiens, 300000 morts des Etats-Unis et des troupe alliées, un pays entier empoisonné par l’Agent Orange, et des profits spectaculaires pour des firmes « de Défense » comme KBR, Boeing et Dow Chemical.

On peut même remonter plus loin, aux guerres de colonisation, quand les militaires des Etats-Unis ont commis des massacres, de Sand Creek aux Swamp Cedars, au service de la « Destinée Manifeste », puis ont pris possession de terres précieuses pour l’agriculture, les mines, l’exploitation forestière et les villes.
La militante et écrivaine Paiute du Nord, Sarah Winnemucca, avait écrit, dans son livre de 1884 ‘Vie Au Milieu des Paiutes : les Torts et Réclamations’, que les profits de guerre et l’avidité étaient les principaux moteurs de la Guerre du Serpent, la guerre Indienne la plus sanglante de l’Ouest et contexte du Massacre de Thacker Pass, le 12 septembre 1865, devenu un point central dans les protestations contre la mine de lithium.
« [Durant l’été 1865] des soldats ont été envoyés de Californie, » écrivait S. Winnemucca, « et de très nombreuses compagnies sont arrivées. Ils poursuivaient mon peuple dans tout le Nevada. Des histoires ont été fabriquées partout dans le pays par les colons blancs, disant que les diables rouges tuaient leur bétail, et grâce à ce mensonge des colons blancs, la piste marquée du sang de mon peuple a commencé, de colline en colline, de vallée en vallée. Les soldats ont poursuivi mon peuple de cette manière pendant un an, et les Paiutes de Queen’s River ont été amenés au Fort Churchill, dans le Nevada, et durant cette campagne le pauvre Général [sic] McDermitt a été tué. Ces histoires n’ont été fabriquées par les colons blancs que pour pouvoir vendre leur grain dont ils ne pouvaient pas se débarrasser autrement. La seule façon pour les éleveurs et les fermiers de faire de l’argent était de provoquer une guerre Indienne, pour que les troupes puissent venir et acheter leur bœuf, leur bétail, leurs chevaux et leur grain. »

Est-ce vraiment différent maintenant, avec les milliards de dollars en jeu à Thacker Pass ? Ce qui est la sécurité nationale pour un peuple est un génocide pour un autre – et un écocide pour le territoire.
Ce qui a changé depuis 1865, c’est que les problèmes sont plus profondément enracinés. Avec l’escalade technologique, les profiteurs de guerre sont devenus des adjoints permanents du gouvernement, avec un personnel tournant entre les emplois privés grassement payés et des rôles au gouvernement, ce qu’on appelle une « porte pivotante. » Dans la plupart des pays, on appelle ça de la corruption.

[…]

Avec l’influence des Etats-Unis qui s’érode dans le monde et les fournitures de lithium qui dépendent de la Chine, la richesse et la puissance de ce pays est vraiment en jeu. Pour alimenter cette richesse, la mine de Thacker Pass est enfoncée de force malgré une opposition déterminée.

Sur le plan technique, la transition vers des véhicules électriques posera des défis extrêmes. Ça exigera une énorme expansion des centrales électriques et des réseaux de transmission. Il pourrait même ne pas y avoir assez de lithium accessible économiquement dans le monde entier pour fabriquer des batteries remplaçant les 1,5 milliards de voitures du monde. Et certaines analyses montrent que les véhicules électriques ne réduiront les émissions que d’environ 6% – mieux que rien, mais ce ne sera pas une bonne utilisation de l’énergie et des ressources, et bien loin de la suppression de 100% des émissions que des scientifiques disent nécessaires pour éviter un réchauffement catastrophique.
Les véhicules électriques sont une fantaisie. Ils permettent aux gens de croire que la culture de l’automobile – en fait la civilisation industrielle – peut être rendue durable avec de simples changements techniques. C’est un mensonge. Nous ne pouvons pas nous contenter d’échanger ce qu’il y a sous le capot de nos voitures et espérer atteindre une situation durable. En ce sens, se fixer sur les véhicules électriques est dangereux parce que ça cache la véritable étendue des changements nécessaires. Stopper et inverser le réchauffement climatique demandera des changements de notre société beaucoup plus importants et radicaux.
Récemment, on m’a dit que je « délirais » parce que je dis ce que la plupart des gens savent mais sont trop polis pour le dire : les automobiles ne sont pas écologiques, et si nous voulons une vie saine et durable, nous n’aurons pas d’automobiles. Le fait qu’une vérité soit dérangeante et inacceptable politiquement pour certains, ne la rend pas moins vraie. On ne peut plus disputer les lois de l’écologie, pas plus que celles de la physique. Si je suis délirant, Galilée l’était aussi.

Les cadres des compagnies d’énergie et les dirigeants politiques ne veulent pas imaginer un monde où les Etats-Unis ne domineraient plus la planète économiquement et militairement, un monde où nous ferions des choix délibérés de vivre dans les limites de la planète plutôt que de l’exploiter et la détruire pour un pouvoir et une richesse temporaires, un monde où nous choisirions de vivre avec moins volontairement, un monde où les sites sacrés Amérindiens seraient respectés, un monde sans économie qui détruit la Terre. Après tout, cela signifierait la fin de leur richesse et de leur pouvoir.

Mais je peux imaginer ce monde et je pense que vous le pouvez aussi.
Ils peuvent dire que nous délirons tant qu’ils veulent, mais nous continuerons à lutter pour lui jusqu’à notre dernier souffle.

article et photos Max Wilbert, utilisés avec permission. Utilisation commerciale interdite. Diffusion du message fortement encouragée.


Reno, Nevada, juillet 2022

Par Shelley Barjo
Commentaire Nevada Current
Publié sur Censored News
Le 17 août 2022
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Le projet de mine de lithium à Thacker Pass sera la pire profanation et le viol d’un site connu de massacre d’Autochtones dans notre région. Je crois que l’absence d’opposition des élus officiels de la Tribu Paiute-Shoshone de Fort McDermitt est une sérieuse injustice envers notre peuple.

Je ne peux pas ne pas réagir quand Lithium Nevada, une compagnie Canadienne, et des politiciens comme le Gouverneur Steve Sisolak, entreprennent, de façon concertée, de convaincre le public que le soutient complaisant actuel de la Tribu de Fort McDermitt pour la mine de lithium à ciel ouvert de Thacker Pass implique que la plupart des membres de la Tribu et d’autres Autochtones approuvent. Comme d’autres membres de tribus, je m’oppose à la profanation de Thacker Pass. À mon avis, ça va changer ce qui reste de mes terres ancestrales en une zone de sacrifice pour des batteries de voitures électriques. Mes terres ancestrales ne s’arrêtent pas à la limite de la réserve et je refuse de simplement voir les membres de la tribu être les pions du service de relations publiques de Lithium Nevada.

Malgré les tentatives de Lithium Nevada de dépeindre une bonne relation de voisinage avec les Autochtones en incluant des membres tribaux de Fort McDermitt dans la cérémonie d’inauguration du Centre de Développement Technique du Lithium, la réalité est bien différente. Cette mine dresse les membres de la tribu les uns contre les autres. Nations Tribales contre Nations Tribales. Des membres d’une même famille, des amis de longue date et de jeunes adultes doivent choisir un côté – pour ou contre la mine – sur la base de la propagande de viabilité économique, pour une des Tribus les plus pauvres du Nevada.

Le fait que les grandes compagnies puissent détruire le peu qui nous reste de notre histoire sur le dos de nos générations futures, avec une façade de stabilité économique, est inexcusable !

Lithium Nevada et le Bureau d’Aménagement du Territoire (BLM) affirment avoir consulté les trois tribus les plus proches (La tribu Paiute et Shoshone de Fort McDermitt, la tribu Paiute de Summit Lake, et la Colonie Indienne de Winnemucca), avant de publier le permis fédéral, le 15 janvier 2021. En avril 2021, les trois tribus ont envoyé des courriers au BLM disant qu’aucune consultation n’avait jamais eu lieu.

En fait, ma tribu, la Tribu Paiute et Shoshone de Fort McDermitt, a écrit au BLM en mai 2021 que sa décision détruisait des terres et des ressources culturelles sacrées pour Fort McDermitt, vu que la mine de Thacker Pass « a été développée et approuvée sans aucune contribution tribale ni consultation de gouvernement à gouvernement… » Ils ont aussi écrit que le projet de disposer de ressources culturelles Amérindiennes à Thacker Pass ne « reflétait en aucune manière les valeurs Tribales que nous avons de nos ressources culturelles, historiques et religieuses dans la zone de Thacker Pass, maintenant destinées à être effacées et détruites – avec l’approbation du BLM – par le Projet de Lithium Nevada. »

La Colonie Indienne de Winnemucca a été plus directe et a écrit : « Nous nous inquiétons de ce que [le projet officiel du gouvernement pour la ressource culturelle de Thacker Pass] déclare qu’une consultation a eu lieu avec la Colonie Indienne de Winnemucca début 2017 et continue à ce jour. Je crois que ce n’est pas vrai, et que le BLM n’a PAS consulté la Colonie Indienne de Winnemucca en ce qui concerne ce projet. »

En plus de Fort McDermitt, Summit Lake et la Colonie Indienne de Winnemucca, la Tribu Paiute de Burnes, la Tribu Paiute de Pyramid Lake, et la Colonie Indienne de Reno-Sparks ont aussi envoyé des lettres questionnant le BLM sur le manque de consultation tribale pour la mine de Thacker Pass.

Quand le BLM et Lithium Nevada ont refusé de ralentir le projet pour qu’une vraie consultation tribale puisse avoir lieu, en juillet 2021, la Colonie Indienne de Reno-Sparks et la Tribu Paiute de Burns ont porté plainte. En février 2022, la Colonie Indienne de Reno-Sparks et la Tribu Paiute de Burns ont été rejointes au tribunal par la Colonie Indienne de Winnemucca. Pour information, six tribus du Nevada se sont officiellement plaintes de ce que le BLM n’avait pas consulté les tribus à propos de Thacker Pass. Ça inclut ma chère Tribu Paiute Shoshone de Fort McDermitt. Bien qu’elle n’ait pas formellement exprimé son opposition, les membres désapprouvent aussi.

Le public doit comprendre à quel point ça peut être effrayant pour les tribus. Nous nous souvenons des atrocités commises par le gouvernement américain contre nous tous aussi – y compris des services gouvernementaux comme le BLM !

Il faut savoir que toutes les tribus n’ont pas la chance d’avoir une équipe de politiciens ou administrateurs professionnels, mais la plupart du temps, ce sont des membres de la communauté qui se sentent concernés et essaient simplement de faire ce qu’il y a de mieux pour leurs communautés respectives. Combattre des projets fédéraux comme la mine de Thacker Pass peut coûter cher et exiger beaucoup de travail des conseils tribaux, spécialement si ces conseils tribaux sont responsables de la gestion des affaires gouvernementales courantes de la réserve. La loi américaine ne donne pas aux tribus de droit de consentement sur des projets sur des terres publiques. Elle ne leur donne qu’un droit de consultation.

Ainsi, même quand les services du gouvernement « consultent » les tribus, ces services ne sont pas obligés de suivre les recommandations des tribus, en particulier sur des questions Autochtones importantes comme la préservation historique et des sites sacrés. Et parce que les protections légales américaines pour les sites sacrés Amérindiens sont si faibles, beaucoup de conseils tribaux se demandent : « Quel est l’intérêt de forcer les agences gouvernementales à nous écouter, alors qu’elles n’ont pas à satisfaire nos demandes ? »

Malgré l’appauvrissement que nous vivons dans les réserves, beaucoup d’entre nous, comme l’ont fait nos ancêtres massacrés avant nous, continuent de résister à l’expansion des mines sur nos terres traditionnelles, parce que nous savons que les mines polluent l’air, l’eau et le sol, et tuent des membres des tribus par des cancers. Les mines détruisent aussi des non-humains, y compris certains des nos frères et sœurs les plus sacrés comme l’aigle doré et le Tétras des armoises.

‘Symbolisme de la pire espèce’

Pour beaucoup d’entre nous, Peuples Autochtones, la destruction de la terre qui nous donne la vie, à nous et à nos générations à naître longtemps après les mines, est l’une des plus grandes atrocités des temps modernes commises contre nous. Je crois que, pour quelques maigres coups de pouce financiers, les compagnies soient prêtes à faire des milliards de la destruction de notre terre, est inacceptable et injuste !

Les tentatives de Lithium Nevada de dépeindre mon conseil tribal comme représentant tous les Autochtones est du symbolisme de la pire espèce. Il est important que les non-Autochtone comprennent que les réserves et les conseils tribaux sont des pures inventions du gouvernement américain. Les réserves ont été créées pour déporter les Autochtones sur les terres les moins désirées économiquement, alors que de plus en plus de colons arrivaient. Les conseils tribaux ont été créés par le gouvernement américain dans une tentative de fabrication d’une légitimité pour le vol systématique des terres Autochtones par le gouvernement. Avant les années 1860, il n’y avait pas d’entités comme la Tribu Paiute et Shoshone de Fort McDermitt ni de réserve de Fort McDermitt – en ces temps-là, les Autochtones n’avaient pas de frontières.

Notre histoire orale nous parle du massacre de Thacker Pass du 12 septembre 1865, et nous dit que c’est le lieu de dernier repos pour jusqu’à 70 de mes ancêtres qui ont été massacrés par des soldats fédéraux, dans le cadre de ce que les historiens appellent la Guerre du Serpent. La Guerre du Serpent a été combattue entre 1864 et 1868 par des Autochtones de la région, entre autres Paiutes et Shoshone, contre des colons et surtout des prospecteurs qui envahissaient nos terres. La Guerre du Serpent a été la plus sanglante des soi-disant « Guerres Indiennes » menées par le gouvernement américain à l’ouest du Mississippi.

Ainsi, les descendants de ceux qui ont été massacrés à Thacker Pass vivent maintenant un peu partout dans l’ouest des Etats-Unis et sont adoptés comme membres de dizaines de tribus. Alors que la tribu de Fort McDermitt comprend les descendants de ceux qui ont été tués au cours du massacre de Thacker Pass, et des descendants de ceux qui vivaient dans la région depuis des temps immémoriaux, beaucoup de ces descendants sont membres d’autres tribus disséminées dans ce grand pays. Ça inclut des membres de tribus comme la Colonie Indienne de Reno-Sparks, la Tribu Paiute de Burns, et la Colonie Indienne de Winnemucca – qui ont toutes attaqué la légalité du projet de Thacker Pass dans un tribunal fédéral.

Certains membres de tribus peuvent ne pas connaître leurs ancêtres de cette époque. Cependant, beaucoup savent toujours. Mon histoire n’est peut-être pas connue de mon voisin, et je peux ne pas connaitre leur histoire, mais c’est parce que notre histoire, en tant qu’Autochtones, a été transmise de génération en génération et de famille à famille par des histoires orales. Ce qui peut être écrit dans les livres d’histoire comme « Histoire Américaine » n’inclut pas toujours toute la vérité, mais plutôt ce qui peut être corroboré par les colons blancs ou ces « historiens » pourvus de diplômes universitaires. C’est généralement orienté et unilatéral.

Ne vous laissez pas abuser par les tactiques publicitaires de Lithium Nevada aujourd’hui. Ma réserve est pauvre et a désespérément besoin d’opportunités économiques. Beaucoup de membres de la tribu sont forcés de choisir de travailler dans les mines parce qu’ils n’ont pas d’autres options. De plus, beaucoup quittent la réserve pour trouver leurs propres solutions permanentes pour leurs familles.

Ainsi, le simple fait que la tribu de Fort McDermitt cherche des solutions économiques auprès de Lithium Nevada, ne signifie pas que la plupart des Autochtones soutiennent la profanation de Thacker Pass. Ça ne signifie même pas que la majorité des membres tribaux de Fort McDermitt la soutiennent. Tout ce que ça signifie, c’est que le conseil tribal actuel de Fort McDermitt est prêt, peut-être inconsciemment, à sacrifier la santé de la terre pour quelques emplois temporaires pour quelques membres de la tribu.

La promesse de quelques bâtiments et d’un centre culturel ne peut pas remplacer la responsabilité que nous avons vis-à-vis de nos ancêtres ni notre obligation envers ceux à naitre après nous. La pauvreté qui règne à Fort McDermitt pourrait rendre difficile de blâmer mon conseil tribal, mais si vous y réfléchissez bien, sacrifier la terre pour un peu d’argent est exactement comment nous en sommes arrivés à l’état environnemental dans lequel nous vivons actuellement.

Sommes-nous prêts à sacrifier des sites sacrés, la santé et l’équilibre interne pour des gains économiques à court terme, pendant que des compagnies géantes créent une richesse incommensurable, épuise les ressources et laisse nos générations futures supporter le désordre que la mine de Thacker Pass laisserait derrière elle ? Je ne croirai jamais que c’est le meilleur moyen de vivre plus vert, et beaucoup d’autres Autochtones dans notre région ne le croient pas non plus. Creuser la mine à ciel ouvert de Thacker Pass sur une terre sacrée ouvrira beaucoup de portes à encore plus de destruction de notre Mère la Terre.

Shelley Harjo

Shelley Harjo est membre de la Tribu Paiute Shoshone de Fort McDermitt, née et élevée dans la réserve. Elle vit actuellement à Reno et est mère de 5 enfants et fière grand-mère de deux petits-enfants. Ses enfants sont aussi membres de la tribu Paiute Shoshone de Fort McDermitt.


Will Falk
Censored News
9 août 2022
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

ORVADA, Nevada (9 août 2022) – Depuis plus d’un an, des tribus Indiennes du Nevada et de l’Oregon ont accusé le Bureau d’Aménagement du Territoire (BLM) de bâcler la consultation des tribus pour le projet de mine de lithium de Lithium Nevada Corp à Thacker Pass, et de ne pas prendre en considération des sites sacrés pour les Autochtones et le site d’un massacre de 1865.

Ces allégations se révèlent exactes, vu que le BLM informe maintenant les tribus de la zone de ce qu’ils ont « découvert » cinq « nouveaux » sites historiques à Thacker Pass, y compris le site du massacre. Le BLM doit maintenant légalement rouvrir la consultation tribale à propos des nouveaux sites, ce qui pourrait suspendre la construction pour des mois.

Entretemps, dans une lettre récente à la Colonie Indienne de Reno-Sparks, le Groupe de Recherche Anthropologique du Far West (Farwestern, responsable de l’étude archéologique à Thacker Pass) révèle qu’ils « étaient absolument conscients de ce terrible évènement (le massacre de 1865) dès le début de [leur] travail d’étude. »

Cependant, ni le BLM ni le Groupe du Far West n’ont inclus le massacre dans des documents publiques tels que la Déclaration d’Impact Environnemental, ce qui se révèle être une violation flagrante de la loi. Le massacre n’est devenu publique que quand la Colonie Indienne de Reno-Sparks a découvert que le BLM possédait des fichiers sur le massacre dans son propre Bureau des fichiers du Pays [General Land Office records], qui sont exigés par la loi pour étude avant d’accorder des permis pour la mine.

Les Tribus ont appelé ça une « dissimulation » et de possibles violations de la Loi sur la Protection et le Rapatriement des Tombes Autochtones, de la Loi Nationale de Préservation Historique, et de la Loi de Politique Environnementale Nationale.

Des membres des tribus ont comparé la destruction de Thacker Pass avec la destruction au bulldozer du Cimetière National d’Arlington.

« Le BLM, Far Western et Lithium Nevada étaient au courant du massacre du 12 septembre 1865, mais l’ont caché au public » dit l’avocat Will Falk, qui représente la Colonie Indienne de Reno-Sparks dans une plainte contre le BLM pour avoir autorisé la mine. « Nous soupçonnons que le BLM s’est aperçu de la controverse autour de la décision de détruire les lieux de dernier repos de dizaines de Paiutes assassinés par des soldats fédéraux, et a espéré pouvoir introduire la mine en douce avant que les tribus ou le public ne s’en aperçoivent. »

Le projet de mine à Thacker Pass couvrirait au moins 7000 hectares et les populations locales, les tribus de la région et les écologistes s’y opposent farouchement. La mine à ciel ouvert couperait les trajets de migration des antilopes d’Amérique, perturberait la reproduction de l’aigle d’or, passerait au bulldozer l’habitat du tétras des armoises [greater sage grouse] menacé, et pomperait plus de 18 millions de litres d’eau par jour. Les résidents s’inquiètent des effets de la pollution et de l’affluence de travailleurs venus d’ailleurs qui pourraient amener des drogues et des agressions sexuelles dans la communauté.

Le 12 septembre 1865, l’Armée US a lancé une attaque surprise sur un camp Paiute du Nord, à l’est de Thacker Pass, tuant entre 30 et 70 hommes, femmes, enfants et vieillards Autochtones qui s’enfuyaient vers des abris. Un survivant est connu d’après des récits écrits, et deux autres par des histoires orales. Ils ont fui vers le nord-est, plus près du site du projet de mine. Aucun soldat de l’Armée US n’a été tué.

La Colonie Indienne de Reno-Sparks, la Tribu Burns Paiute d’Oregon, et la Colonie Indienne de Winnemucca ont tous témoigné devant une cour fédérale qu’ils n’avaient jamais été consultés sur le projet de mine de Thacker Pass, en dépit de connexions culturelles, historiques et spirituelles fortes avec le site. Les tribus ont affirmé qu’à cause des manques de consultation du BLM, Lithium Nevada allait détruire des propriétés culturelles et historiques traditionnelles si la compagnie construisait la mine.

Du fait de la forte concentration d’objets archéologiques Amérindiens, de camps traditionnels, d’un ancien site de récolte d’obsidienne, de sites sacrés, et du site du massacre de 1865, la Colonie Indienne de Reno-Sparks a demandé au BLM de classer tout Thacker Pass comme district historique éligible pour être inscrit au Registre National des Sites Historiques. Cette désignation pourrait forcer le BLM à engager des consultations plus substantielles avec les tribus Indiennes et à réévaluer la zone du projet à Thacker Pass.

Les Autochtones du Nevada, déjà décimés par plus de 1000 tests de bombes atomiques, sont maintenant menacés par la « ruée vers le lithium » déclenchée par les fausses promesses des batteries électriques. Ils veulent attirer l’attention sur leur situation. C’est particulièrement important en France, où les médias officiels ne cessent de faire croire que le Nevada est un désert quasiment inhabité.
Christine Prat

COURSE-PRIÈRE JUSQU’À WASHINGTON POUR PROTÉGER PEEHEE MU’HUH (THACKER PASS)

Par Protect PeeHee Mu’Huh (Tacker Pass)
Course-prière jusqu’à Washington D.C.
Publié par Censored News
le 16 avril 2022
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Le 8 avril 2022, un groupe de coureurs prieurs conduits par Gary McKinney et Ky NoHeartInWar, ont quitté la région de la Nation Paiute près de Fort McDermitt, dans le nord du Nevada, à Thacker Pass (PeeHee Mu’Huh – Lune Pourrie) avec comme destination finale le Ministère de l’Intérieur et la Maison Blanche, à Washington D.C.

Le but de leur course est de faire prendre conscience à tous du projet de destruction de ce site cérémoniel et culturel, situé au cœur des Nations Paiute et Shoshone de l’Ouest. Non seulement des cérémonies ont lieu sur ce site, mais c’est aussi le lieu de multiples massacres impliquant non seulement la Cavalerie des Etats-Unis, mais aussi d’autres tribus Autochtones voisines, ce qui a conduit à ce que ce lieu devienne une terre de sépultures.

La Lithium Nevada Corporation, par l’intermédiaire du Bureau d’Aménagement du Territoire, est en passe d’obtenir cette terre pour une mine à ciel ouvert, qui doit devenir une des plus grandes mines à ciel ouvert du monde. Grâce à la Loi sur la Production de Défense, passée au début de l’année, ils ont obtenu des permis, et une approbation dans un délai adéquat, ce qui a porté un coup dévastateur aux actes juridiques conçus pour protéger notre passé, notre présent et notre avenir en tant que nation culturelle. La compagnie et les entités gouvernementales ont choisi d’ignorer la Loi de 1990 sur la Protection des Tombes Amérindiennes et de Rapatriement [NAGPRA], la Loi de Rapatriement, la Loi sur la Liberté Religieuse de 1978 promulguée par le Président Carter, et la Loi sur les Antiquités ; toutes sont conçues pour nous protéger en tant que nations souveraines.

De plus, non seulement cette compagnie cherche à détruire ce site sacré, mais elle a aussi l’intention de détruire les habitats des aigles chauves et des aigles royaux au cours de ce projet. Nous ne pouvons pas laisser faire cela sans faire prendre largement conscience de leurs intentions.

En tant que peuple culturel, c’est notre façon de tracer la voie de 7 générations derrière nous. Ceci étant dit, nous ne pouvons pas autoriser les pouvoirs gouvernementaux à empiéter sur des frontières officiellement reconnues, et c’est au peuple de préserver les lois du territoire, des traités et des accords entre ces deux nations souveraines.

C’EST UNE TERRE SACRÉE

Veuillez agréer…,

Les Coureurs Prieurs de PeeHee Mu’Huh

***

projets de mines de lithium dans le sud-ouest des USA