LETTRE OUVERTE AUX MILITANTS D’OCCUPEZ WALL STREET
Par John Paul Montano, Anishinabe
Traduction Christine Prat (Original article in English below)
Samedi 24 septembre 2011
Merci pour votre courage. Merci pour votre tentative d’améliorer la situation dans ce qui s’appelle maintenant les Etats-Unis. Merci pour votre attachement à la paix et la non-violence. Merci pour vos sacrifices. Merci.
Juste une chose. Je ne fais pas partie des 99% dont vous parlez. Et çà m’attriste. S’il vous plait, ne vous méprenez pas. Je voudrais faire partie des 99%… mais vous avez choisi de m’exclure. Peut-être n’en aviez vous pas l’intention, mais vous m’avez exclu. En fait, des millions d’entre nous, peuples autochtones, ont été exclus du mouvement de protestation Occupez Wall Street. Sachez, s’il vous plait, que je me doute que cette exclusion n’était pas volontaire de votre part. C’est pourquoi je vous écris. Je crois que vous pouvez réparer cette erreur. (J’espère que vous avez encore le sourire.)
Il semble que depuis que nous, les Autochtones, avons découvert les Européens et les avons invités à nous rendre visite ici, sur notre terre, nous avons dû subir d’innombrables « -ismes », religions, programmes sociaux et autres, destinés à nous « réparer ». Le Protestantisme, le Socialisme, le Communisme, la Démocratie Américaine, le Christianisme, les Pensionnats et autres écoles… bref, vous comprenez. Et il s’avère aussi que ces stratégies soit disant « éclairées » ont presque toujours été mises en pratique et imposées sans notre consentement. Et je suppose que vous savez comment çà a fini pour nous. Oui. Horriblement.
Ce qui me ramène à vos activités, par ailleurs très intéressantes, d’Occupez Wall Street. Le 22 septembre, j’ai lu avec beaucoup d’enthousiasme votre déclaration d’ « Une revendication ». J’espérais, je croyais que des gens « éclairés » comme vous, combattant pour la justice et l’égalité, et pour la fin de l’impérialisme, etc., etc., mentionneraient le fait que le territoire sur lequel vous protestez ne vous appartient pas, que vous êtes des hôtes sur des terres indigènes volées. J’espérais que la nation indigène dont c’est le territoire serait mentionnée. J’espérais que vous traiteriez la question de l’histoire de tous ces siècles pendant lesquels, nous les autochtones avons subi les innombrables « -ismes » de tous les « bienfaiteurs » prétendant construire une « société plus juste », un « monde meilleur », un « pays de la liberté » sur nos sociétés indigènes, sur nos terres indigènes, en détruisant et/ou ignorant nos modes de vie. J’espérais que vous reconnaîtriez tout cela, vu que vous êtes des colons sur un territoire indigène et avez besoin de – et devriez vouloir – notre consentement pour construire quoique ce soit sur notre territoire – qui plus est, toute une société. Vous voyez où je veux en venir ? J’espère que vous gardez le sourire. Nous sommes toujours amis, donc ne vous énervez pas. Je crois que vos cœurs sont à la bonne place. Je sais que toute cette histoire de génocide et de colonialisme crée parfois beaucoup de confusion pour nous tous. Mais il me semble que vous êtes inconsciemment en train de faire ce que tous les colonialistes ont fait avant vous : faire des choses sur notre territoire sans nous demander la permission.
Mais n’ayez pas peur, chers amis. Nous les indigènes avons le sens de l’humour. Donc, je pense que je peux vous soumettre quelques suggestions amicales pour aider à sortir de la position colonialiste dans laquelle (involontairement, j’espère) vous vous trouvez. [Jeu de mots difficilement traduisible – NdT].
Soit dit en passant, je ne suis qu’un individu indigène. Je ne représente que moi-même. C’est une initiative isolée d’écrire cette lettre. Peut-être qu’aucun de mes compatriotes Anishinaabe ne me soutiendront. Peut-être que certains le feront. Je respecte leurs opinions de toutes façons. J’aimerai toujours mon peuple Anishinaabe. J’essaie juste de faire quelque chose de bon, tout comme vous dans le mouvement Occupez Wall Street dans ce qui est maintenant appelé New York.
Donc, ce que je propose. (Vous souriez toujours, n’est-ce pas ?)
1) Reconnaissez que les Etats-Unis d’Amérique sont un pays colonial, un pays de colons, construit sur les territoires de nations autochtones ; et/ou…
2) Exigez la libération immédiate du prisonnier politique indigène Leonard Peltier ; et/ou…
3) Exigez du gouvernement colonial des Etats-Unis d’Amérique qu’il respecte tous les traités signés avec toutes les nations indigènes dont les territoires sont appelés collectivement « Etats-Unis d’Amérique » ; et/ou…
4) Mentionnez d’une manière ou d’une autre que vous êtes conscients d’être des colons et que vous n’avez pas l’intention de répéter les erreurs de tous les colons bien intentionnés qui vous ont précédé. En d’autres termes que vous êtes prêts à obtenir le consentement des peuples autochtones avant de faire quoique ce soit en territoire indigène.
Espérant que cette liste peut vous être utile, j’attend votre réaction avec impatience, mes amis.
Miigwech ! ( « Merci ! »)
JohnPaul Montano
http://twitter.com/jpmontano
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Saturday, September 24, 2011
An Open Letter to the Occupy Wall Street Activists
Thank you for your courage. Thank you for making an attempt to improve the situation in what is now called the United States. Thank you for your commitment to peace and non-violence. Thank you for the sacrifices you are making. Thank you.
There’s just one thing. I am not one of the 99 percent that you refer to. And, that saddens me. Please don’t misunderstand me. I would like to be one of the 99 percent… but you’ve chosen to exclude me. Perhaps it was unintentional, but, I’ve been excluded by you. In fact, there are millions of us indigenous people who have been excluded from the Occupy Wall Street protest. Please know that I suspect that it was an unintentional exclusion on your part. That is why I’m writing to you. I believe that you can make this right. (I hope you’re still smiling.)
It seems that ever since we indigenous people have discovered Europeans and invited them to visit with us here on our land, we’ve had to endure countless ‘-isms’ and religions and programs and social engineering that would “fix” us. Protestantism, Socialism, Communism, American Democracy, Christianity, Boarding Schools, Residential Schools,… well, you get the idea. And, it seems that these so-called enlightened strategies were nearly always enacted and implemented and pushed upon us without our consent. And, I’ll assume that you’re aware of how it turned out for us. Yes. Terribly.
Which brings me back to your mostly-inspiring Occupy Wall Street activities. On September 22nd, with great excitement, I eagerly read your “one demand” statement. Hoping and believing that you enlightened folks fighting for justice and equality and an end to imperialism, etc., etc., would make mention of the fact that the very land upon which you are protesting does not belong to you – that you are guests upon that stolen indigenous land. I had hoped mention would be made of the indigenous nation whose land that is. I had hoped that you would address the centuries-long history that we indigenous peoples of this continent have endured being subject to the countless ‘-isms’ of do-gooders claiming to be building a “more just society,” a “better world,” a “land of freedom” on top of our indigenous societies, on our indigenous lands, while destroying and/or ignoring our ways of life. I had hoped that you would acknowledge that, since you are settlers on indigenous land, you need and want our indigenous consent to your building anything on our land – never mind an entire society. See where I’m going with this? I hope you’re still smiling. We’re still friends, so don’t sweat it. I believe your hearts are in the right place. I know that this whole genocide and colonization thing causes all of us lots of confusion sometimes. It just seems to me that you’re unknowingly doing the same thing to us that all the colonizers before you have done: you want to do stuff on our land without asking our permission.
But, fear not my friends. We indigenous people have a sense of humor. So, I thought I might make a few friendly suggestions which may help to “fix” the pro-colonialism position in which you now (hopefully, unintentionally) find yourselves. (Please note my use of the word “fix” in the previous sentence. That’s an attempt at a joke. You can refer to the third paragraph if you’d like an explanation.)
By the way, I’m just one indigenous person. I represent no one except myself. I’m acting alone in writing this letter. Perhaps none of my own Nishnaabe people will support me in having written this. Perhaps some will. I respect their opinions either way. I love my Nishnaabe people always. I am simply trying to do something good – same as all of you at the Occupy Wall Street protest in what is now called New York.
So, here goes. (You’re still smiling, right?)
1) Acknowledge that the United States of America is a colonial country, a country of settlers, built upon the land of indigenous nations; and/or…
2) Demand immediate freedom for indigenous political prisoner Leonard Peltier; and/or…
3) Demand that the colonial government of the United States of America honor all treaties signed with all indigenous nations whose lands are now collectively referred to as the “United States of America”; and/or…
4) Make some kind of mention that you are indeed aware that you are settlers and that you are not intending to repeat the mistakes of all of the settler do-gooders that have come before you. In other words, that you are willing to obtain the consent of indigenous people before you do anything on indigenous land.
I hope you find this list useful. I eagerly await your response, my friends.
Miigwech! ( ~”Thank you!” )
JohnPaul Montano
Ken Knabb : « Il ne s’agit pas d’une série de protestations, mais d’un mouvement »
Entretien de Ken Knabb sur le mouvement des occupations aux Etats-Unis : par Serge Quadruppani
Anecdotique ? Ou, au contraire, l’un des mouvements politiques les plus importants de l’après-guerre ? Depuis la France, il est difficile de prendre l’exacte mesure du mouvement Occupy Wall Street, qui touche désormais des centaines de villes étatsuniennes. Pour s’en faire une idée, voici une interview de Ken Knabb, figure de la gauche révolutionnaire investi dans le mouvement Occupy Oakland.
Pour beaucoup de vieux radicaux français, Ken Knabb, grand connaisseur des situationnistes et actif révolutionnaire depuis les années 1960, est de longue date « notre correspondant aux States ». Son activité inépuisable – notamment à travers son site web – pour faire circuler informations et théories radicales entre les États-Unis et le reste du monde en ont depuis longtemps fait une référence1.
À Oakland, où le port a été bloqué pour la première fois depuis 1946 par la grève générale du 2 novembre, décrétée après les graves blessures infligées par une grenade policière à un ancien de la guerre d’Irak participant au mouvement des occupations, Ken est à présent plongé dans le maelström du mouvement Occupy Wall Street, qui touche désormais des centaines de villes étatsuniennes. Une interview s’imposait, pour comprendre l’ampleur et la profondeur inouïes d’un mouvement qui reste encore largement invisible de ce côté-ci de l’Atlantique.
Durant la journée, plus de 50 000 personnes sont passées par la Frank Ogawa Plaza (lieu où s’est installé Occupy Oakland depuis trois semaines), certaines par simple curiosité, mais la majeure partie manifestant une vive sympathie pour le mouvement. Entre 20 et 30 000 personnes ont pris part aux marches vers le port (il y a eu deux marches séparées, l’un commençant à 16 h, la seconde à 17 h), qui a été bloqué jusqu’au lendemain. Durant la journée, il y a aussi eu plusieurs petites marches dans les quartiers proches pour faire des blocages ou tenir des piquets devant des bâtiments (notamment des banques) ; à ces occasions, un petit nombre de personnes ont provoqué un peu de casse. Enfin, tard dans la soirée, des gens ont occupé un immeuble vide des environs – dans le but de le transformer en bibliothèque et lieu de rencontre de Occupy Oakland. La police a attaqué, a pris l’immeuble, et a arrêté environ 100 personnes – dont beaucoup n’étaient pas impliquées.
Y a-t-il des dissensions internes au sujet de la casse des vitrines ?
Le « vandalisme », ainsi que les actes de quelques dizaines de personnes tentant d’édifier des barricades dans la rue, a provoqué un large débat à l’intérieur du mouvement. Une grande majorité des manifestants estime que de telles tactiques ne sont pas avisées, qu’elles ne réalisent rien, qu’elles sont dans certains cas l’œuvre de provocateurs et que, dans tous les cas, elles semblent avoir le même résultat que si elles étaient l’œuvre de provocateurs (discréditer le mouvement, distraire l’attention d’actions en cours beaucoup plus significatives). En même temps, beaucoup de gens ont de la sympathie pour les émotions qui sont derrière de telles actions, et ne souhaitent pas dénoncer en tant que telle la simple casse des biens. Ils ne sont donc pas très sûr de ce qu’il faut faire.
Est-ce que le campement perdure ? Combien de personnes sont impliquées de manière permanente ?
À Oakland, des assemblées générales se tiennent presque chaque jour, et Occupy Oakland est plus vaste que jamais. Le campement a été rétabli moins de 48 heures après sa destruction par la police (le 25 octobre). Il y a peut-être deux cents personnes qui y vivent en permanence. Beaucoup d’autres viennent en visite, interviennent aux assemblées ou participent de diverses manières.
Comment analyses-tu la composition sociale du mouvement ? Est-ce qu’il y a un noyau qu’on peut situer socialement ?
C’est très varié. Occupy Oakland comporte peut-être 50 % de Noirs et de Latinos, alors que des occupations dans d’autres régions du pays peuvent être principalement le fait de Blancs. Certaines occupations sont avant tout le fait de gens très pauvres, de SDF, etc., d’autres incluent des employés. Il est certain que les jeunes précaires sont parmi les participants les plus répandus.
En France, on ne se rend pas compte de l’importance et de la profondeur du mouvement. Peux-tu nous dire où il en est aujourd’hui dans l’ensemble des États-Unis ?
Il y a des occupations effectives dans plusieurs centaines de villes, et des occupations en projets dans mille autres, y compris dans des régions considérées comme plutôt réactionnaires. Ces occupations rassemblent de quelques dizaines à plusieurs centaines de personnes, mais elles sont aussi soutenues par des centaines d’autres qui apportent de la nourriture, du matériel, etc., et qui prennent part aux assemblées et aux manifestations. Ce mouvement ne cesse de grandir. Les mois d’hiver pourraient rendre les choses plus difficiles, mais les occupations vont certainement continuer, même si elle devront, dans certaines régions, se déplacer dans des bâtiments. Il y a un esprit et une détermination qui font penser au mouvement des Droits civiques il y a cinquante ans : peu importe le harcèlement de la police, nous sommes en train de gagner. Nos opposants réagissent, mais ne comprennent pas du tout ce qui arrive. Ils ne comprennent pas qu’il ne s’agit pas d’une série de protestations, mais d’un mouvement. Et au risque de sembler extravagant, je dirais que c’est le début d’un mouvement implicitement révolutionnaire.
Peux-tu nous donner une idée de ce qui est discuté dans les assemblées ou en dehors des assemblées, des idées générales qui circulent ?
Les gens discutent de toute sorte de choses. Par dessus tout : 1) de questions pratiques particulières concernant les occupations. C’est-à-dire comment s’organiser pour les tentes, la nourriture, le reste du matériel ; comment organiser les assemblées (généralement avec un facilitateur, avec consensus, ou « consensus modifié » : le soutien de 90 % de l’assemblée est nécessaire pour passer une proposition) ; comment réagir face à la répression ou harcèlement policier ; comment réagir face aux exigences de la municipalité sur le respect de différents règlements, etc. 2) des questions externes de politique : est-ce qu’il faut manifester ou tenir des piquets devant telle banque ou telle entreprise, est-ce qu’il faut intervenir en soutien sur certaines questions (concernant l’économie, les SDF ou prisonniers, l’environnement, les guerres et une centaine d’autres questions) ?
Est-ce que l’idée d’une autre société possible se précise ? Est-ce que des propositions sont avancées sur les moyens d’y arriver ?
L’idée d’un autre type de société est implicite dans tout cela. La plupart du temps, les gens n’en parlent pas parce qu’ils comprennent qu’il est beaucoup plus important de prêter attention à ce qu’ils font maintenant. Ils saisissent que ce processus est la partie principale de toute solution ultime. Selon moi, il est à peu près sans importance que les gens disent qu’ils sont pour ou contre le « capitalisme » ou « l’État » ; il est beaucoup plus important qu’ils soient dès maintenant engagés dans un processus non-hiérarchique et non-capitaliste. Je crois qu’ils développeront ainsi des projets bien plus efficaces que s’ils se préoccupaient de débattre entre diverses nuances du radicalisme.
Le reste de la population est-il hostile, indifférent ou sympathisant ?
Une bonne partie du reste de la population se montre relativement sympathisante, en partie parce que – justement – la plupart des occupations évitent la rhétorique radicale (Oakland est un peu exceptionnel à cet égard), se présentant plutôt comme une façon simple et de bon sens de s’attaquer à des problèmes dont chacun a conscience, d’une manière qui correspond bien aux premières traditions américaines (se rassembler dans des assemblées de ville pour débattre de ce qui est peut être fait pour résoudre divers problèmes pratiques). Presque tous ceux que je connais éprouvent beaucoup de sympathie pour le mouvement, même s’ils n’ont pas encore commencé à y participer.
D’après ce que j’ai compris, les médias ont d’abord été hostiles ou indifférents, mais une certaine sympathie s’y exprime maintenant. Qu’en est-il exactement ? Et quelle est l’attitude du mouvement vis-à-vis des médias ?
Il cherche surtout à construire ses propres canaux. De façon générale, les médias restent relativement hostiles, mais le mouvement est si étendu et suscite tant de sympathies qu’ils sont obligés de ne pas trop le montrer. Quant à l’attitude des occupations envers les médias, elle varie. Certaines les rejettent, d’autres s’efforcent d’être amicales, d’accueillir les médias et de leur organiser des visites.
Il faut surtout souligner que ce mouvement ne dépend plus des médias dominants parce qu’il s’est d’abord répandu par le moyen de médias interactifs, participatifs, tels que les sites web, les blogs, les mails, Facebook, Twitter, les vidéos YouTube, etc. De même, une grande partie de la population s’informe sur le sujet à partir des vidéos qui circulent sur le web ou via facebook.
Es-tu heureux comme en 1968 ? Ou comme dans d’autres grands moments de rupture que tu as pu vivre ?
Ces six dernières semaines ont été de loin les jours les plus heureux de ma vie ! J’ai vécu tous les événements des années 1960, mais rien de ce qui s’est déroulé alors n’est comparable à ce qui est en train de se passer ici et maintenant. La propagation de ce mouvement a été absolument stupéfiante, cela dépasse mes rêves les plus fous. Chaque jour, il y a des développements nouveaux et étonnants, la plupart positifs.
Par exemple, ce matin-même, un énorme rassemblement s’est tenu à l’université de Berkeley, suite a quelques violences policières au campus hier soir, et les étudiants parlent déjà de la possibilité d’une grève dans les universités…
Est-ce que la référence aux mouvements arabes est présente ?
Bien sûr, le Printemps arabe est vu comme l’une des inspirations majeures, ainsi que certaines des occupations menées en Europe, notamment en Grèce et en Espagne. Mais le mouvement s’appuie principalement sur ses propres expériences : l’exemple d’une occupation conduite dans une ville américaine, une fois propagé presque instantanément via Facebook et YouTube, peut être imité dans cent autres. Cela concerne aussi bien les slogans et les pancartes, qui font preuve d’une créativité comparable aux graffitis de mai 1968, que les tactiques et stratégies.
* The Awakening in America (« Le Réveil en Amérique », vue générale du mouvement).
Ce texte a été traduit en français, à lire ici.
* Yesterday in Oakland (« Hier à Oakland » sur le raid policier du 25 octobre et ses suites)
* Welcome to the Oakland General Strike (« Bienvenue dans la Grève générale d’Oakland »)
The Situationists and the Occupation Movements (1968/2011) (« Les situationnistes et les mouvements d’occupation » – comparaison avec le mouvement des occupations de mai 1968).
“Si la mine empoisonne notre eau, ce sera la fin de mon people.”
Carletta Tilousi, membre du Conseil Tribal Havasupai
Depuis plus de 25 ans, les compagnies internationales ont agressivement cherché à s’emparer de l’uranium dans le Grand Canyon (du Colorado – NdT). Les citoyens de l’Arizona doivent être informés des dangers et des effets définitifs sur la santé causés par l’exploitation des mines d’uranium. Cette activité a par le passé affecté directement la santé des Tribus Indiennes locales vivant dans et autour de la région du Grand Canyon. Par exemple, on a diagnostiqué dans beaucoup de familles Navajo de nombreuses formes de cancer causées par les mines d’uranium abandonnées un peu partout dans la Réserve Navajo.
De plus, la Tribu Havasupai a combattu depuis des années contre le projet d’ouvrir au bord du Grand Canyon des mines d’uranium situées juste au dessus de leurs sources d’eau et près de la montagne sacrée Red Butte. La Tribu a appris a connaître les effets de la contamination irréversible que l’exploitation de mines d’uranium peut causer à l’Havasu Creek.
Les compagnies minières se proposent de transporter l’uranium en passant directement par le territoire où résident nos communautés dans le Nord de l’Arizona.
Extrait de la page d’accueil du site Stop Uranium Mining :
http://www.stopuraniummining.org
Traduction Christine Prat
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L’EPLOITATION DE MINES D’URANIUM MENACE A NOUVEAU LE GRAND CANYON
Par Christine Prat
Depuis des années déjà, les grandes compagnies minières, en particulier la compagnie Canadienne Denison Mines (mais aussi AREVA et d’autres), cherchent à obtenir l’autorisation d’ouvrir des mines d’uranium aux abords du Grand Canyon du Colorado, un site classé, une région en principe protégée, et surtout le territoire de plusieurs Tribus Autochtones. (Voir l’article de Klee Benally publié sur ce site en mars dernier)
En juin dernier, le Ministre de l’Intérieur Ken Salazar a étendu le moratoire qui protégeait la région pour les 20 années à venir.
Les habitants de la région et les adversaires du nucléaire ont cru pouvoir être tranquilles pour un moment. Le 20 juin 2011, le site Stop Uranium Mining a publié un article annonçant la victoire. (Voir http://www.stopuraniummining.org/2011/06/1-million-acres-of-grand-canyon-watershed-protected-from-uranium-mining/ )
Cependant, le 13 octobre dernier, le Today’s News Herald a publié un article annonçant que les « Législateurs » des Etats-Unis avaient présenté une proposition au Congrès visant à bloquer les mesures de protection prises par le Ministère de l’Intérieur. Pour le district [équivalent d’une circonscription électorale] concerné, le Représentant est le Républicain Paul Gosar.
Le journal en question – qui n’a visiblement rien contre la radioactivité – annonce que « Les Législateurs U.S. ont ranimé l’espoir de disqualifier la désinformation et la controverse concernant la fermeture de terres riches en uranium et le droit d’exploiter un million d’acres près du Grand Canyon et dans le Nord du pays Mohave ». L’’ auteur de l’article ajoute que cette loi « empêchera le Ministère de l’Intérieur d’interdire l’exploitation minière dans une vaste région d’Arizona – une mesure qui pourrait tuer la promesse de centaines d’emplois dans l’industrie minière de la région. »
Toujours d’après le même article, « le Représentant Républicain d’Arizona Jeff Flake a déclaré qu’il s’attendait à l’opposition de certains membres du Congrès, mais qu’il est persuadé que mettre l’accent sur l’emploi serait l’hameçon. »
Le même bonhomme – Républicain – a dit aussi qu’il y avait beaucoup de désinformation de la part des groupes écolo quand il s’agissait d’uranium. Le Représentant – tout aussi Républicain – Paul Gosar prétend que les écolos ont usé de « tactiques de terreur » pour intimider le public et affirme que « c’est un procédé très, très sûr » qui doit être utilisé désormais dans les mines d’uranium, et que la « tâche est d’éduquer le public ». (Voir aussi le site US d’Areva, qui explique comment embobiner les indigènes qui se méfient de l’uranium http://us.arevablog.com/2011/08/03/whats-sustainable-uranium-production-in-indian-country-an-exercise-in-branding/#more-4654).
L’article dit aussi que le Sénateur – Républicain – d’Arizona John McCain (vous vous rappelez ? ex-candidat à la présidentielle) se réclame de l’Arizona Wilderness Act de 1984 – qui désigne certaines parties de l’état comme « zone sauvage » (protégée) et d’autres comme pouvant être utilisées pour une exploitation de l’uranium ‘raisonnable et sans danger’ – pour affirmer que l’interdiction d’exploiter l’uranium en Arizona n’est pas autorisée.
Un autre Représentant – Républicain – d’Arizona cité dans l’article, Trent Franks, déclare que le Président Obama est à côté de la plaque en « plaçant des écologistes forcenés au-dessus de l’indépendance énergétique à long terme et de la sécurité nationale de l’Amérique… »
Le Représentant David Schweikert prétend que refuser la proposition de loi serait « tuer l’emploi ». Etc… Tous affirment que l’uranium peut créer des centaines d’emplois, et surtout, rapporter des milliards à l’Arizona. Y en aura-t-il aussi un peu réservé aux Havasupai pour soigner leurs cancers à venir ?
***
Les Havasupai vivent dans le Grand Canyon, en contrebas du Cataract Canyon dont les eaux arrivent dans leur village, Supai. Le village n’est accessible qu’en hélicoptère, par des chevaux de charge, ou à pied (près de 30 km de descente ou d’escalade). Les Havasupai y ont été déportés en 1882 par le gouvernement des Etats-Unis. A l’origine, ils vivaient dans un lieu aujourd’hui appelé Red Butte. Le site de Red Butte reste d’une grande importance spirituelle pour eux. Les êtres du Tonnerre et du Nuage de Pluie y apportent la pluie qui s’écoule dans le Cataract Canyon. Ils y vont en pèlerinage, y tiennent des cérémonies, y cueillent des plantes médicinales. Certains de leurs ancêtres y sont enterrés.
Les mines d’uranium menacent ce site sacré. L’une des mines prévues par Denison Mines n’est qu’à un peu plus de 3 km du pied de Red Butte.
Les Havasupai résistent à l’exploitation minière depuis plus de 20 ans. Cependant les compagnies ne lâchent pas. Elles promettent des emplois dans la région.
Mais les groupes écologistes et les tribus pensent que les dégâts causés par l’uranium dépasseront largement ces avantages. Malgré les dénégations des partisans de l’uranium, ils pensent que l’exploitation minière pourrait polluer (avec de l’uranium, du mercure et du cyanure) le bassin du Colorado et d’autres sources, qui fournissent l’eau potable à environ 25 millions d’habitants en aval.
De plus, les communautés indigènes de la région ont pu voir les dévastations causées par l’exploitation de mines d’uranium, en particulier dans la réserve Navajo. Voir article de Brenda Norrell sur la catastrophe de Church Rock
Le gouvernement Obama a prétendu vouloir protéger les communautés et les sources d’eau. C’est ce qu’a répété le Ministre de l’Intérieur Ken Salazar, lorsqu’il a proposé de prolonger le moratoire sur l’attribution de nouveaux permis d’exploitation. Cependant, le soutien de ce même gouvernement au développement du nucléaire – civil et militaire – contredit ces promesses et l’aidera probablement à céder une fois de plus aux Républicains.
Voir l’article de Christina Aanestad du 4 août 2009 sur le site http://www.stopuraniummining.org/2011/01/protect-mother-earth/
Par Brennan Lagasse
Article original en Anglais publié par Indigenous Action le 3 novembre 2011
Traduction Christine Prat
Le 12 octobre 2011, des Anciens et Hommes et Femmes Médecine Indigènes se sont rassemblés pour une conférence téléphonique avec plusieurs représentants du gouvernement fédéral. Le but de l’appel était de poursuivre le dialogue sur la protection des sites sacrés indigènes qui sont toujours sous l’autorité fédérale. Ce fut une expérience très appropriée pour voir où en est la culture de pouvoir du gouvernement fédéral à l’époque moderne, en ce qui concerne le respect du bien-être des Peuples Autochtones.
Bien que plusieurs représentants du gouvernement aient pris part à la téléconférence, le message clair et évident pour ceux qui ne faisaient pas partie du gouvernement fédéral fut, premièrement, que la protection des sites sacrés n’est pas suffisamment importante pour que le Ministre Tom Vilsack – celui sur la participation duquel comptaient tous les Anciens et Hommes et Femmes Médecine Indigènes – participe à la communication. Et deuxièmement, qu’il n’est pas suffisamment important d’honorer la demande de ceux pour qui ces lieux sont au centre de leur bien-être et de leur mode de vie, pour avoir cette conversation en personne.
Quels progrès ont été fait pendant toutes ces années de travail pour protéger les sites sacrés par des décrets, des règles, des lois, des règlements, des politiques et des actions judiciaires si la réalité d’aujourd’hui est toujours la même pour les Peuples Autochtones que lorsque tout travail de rapatriement a commencé ?
Quand le gouvernement fédéral admettra t-il que, pour trouver une solution à ce grave problème, il est nécessaire d’engager le dialogue en personne et que ceux qui prennent les décisions finales, comme le Ministre Tom Vilsack, doivent être présents et s’engager complètement pour qu’un travail durable soit accompli ? Sans une telle représentation, étant donné qu’on avait laissé entendre aux Anciens et Hommes et Femmes Médecine indigènes qu’il participerait au moins à cette conférence téléphonique, quel message cela exprime t-il finalement ? Que tout « progrès » sera distillé par d’autres représentants, continuera à n’engager à rien, et d’une manière générale, que cet épisode ne fait que maintenir le statuquo. Que peuvent les peuples indigènes faire de plus pour que les dirigeants non-indigènes comprennent leur point de vue ? Cela a été expliqué mainte et mainte fois, et ne s’écarte pas du système de croyances déjà expliqué en mars dernier :
« Le Créateur a donné au Peuple des Nations Autochtones et Aborigènes des Lois à suivre et des responsabilités concernant le devoir de prendre soin de toute la Création. Ces instructions ont été transmises de génération en génération depuis l’origine de la Création. La Loi est que personne n’est au-dessus de la Loi du Créateur, vous faites partie de la Création, donc si vous brisez la Loi, vous vous détruisez vous-même.
Nous parlons au nom de toute la Création : ceux à quatre pattes/ceux qui nagent/ceux qui rampent/ceux qui volent/ceux qui font leur terrier dans la terre/les Nations des plantes et des arbres. Ce système de vie unique inclut les quatre éléments, le feu, l’eau, la terre et l’air, l’environnement vivant de ‘Notre Mère la Terre’.
Le Sacré de la Loi du Créateur a été brisé. L’équilibre de la vie a été rompu. Vous venez à la vie en tant qu’être sacré. Si vous malmenez le caractère sacré de votre vie, cela a des conséquences pour toute la Création. L’avenir de la vie est actuellement menacé. Nous avons atteint le croisement des voies possibles. En tant que Peuple Autochtone et Aborigène, nous vous demandons de collaborer avec nous pour sauver le futur de toute la Création. »
– Message du Peuple des Nations Autochtones et Aborigènes (11 mars 2011).
Le point de vue de ceux qui se battent pour sauver leurs sites sacrés, les lieux les plus saints sur terre, est clair et succinct. Il l’a été depuis le premier jour. C’est la voie qu’il faut suivre, comme méthode pour essayer d’aider des institutions comme le Service des Fôrets à comprendre la sincérité et l’importance de ce dialogue, et pour prévenir la profanation future de ces sites qui ont été compromis pour des années sur les plans spirituels et environnental.
Les Anciens et Hommes et Femmes Médecine indigènes ont demandé que la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones soit désormais incluse dans tous les documents officiels. Comment se fait-il que ce ne soit pas encore clair à ce moment de l’histoire ? De plus, si on ne mentionne pas la Loi du Créateur dans de tels documents, une Loi qui s’impose aux Peuples Autochtones et déclare toute vie et création sacrées, l’oppression continue. Cette Loi ne peut être altérée ou manipulée et est immuable du point de vue des peuples autochtones. Encore une fois, on ne peut être plus clair.
Le gouvernement fédéral continue à réagir aux préoccupations des Indigènes d’une façon qui ne reconnaît pas la valeur du respect des peuples indigènes pour leurs sites sacrés et de ce qui les y relie. On ne peut dire plus simplement qu’il n’y a pas de garanties durables et sérieuses mises en place pour protéger les lieux sacrés. Même, un style de développement non-durable continue sous le nom de « règlement progressiste des conflits. »
L’harmonie peut et doit être réalisée, mais le respect du point de vue [des indigènes], de la tradition et de la spiritualité doit être admis dans sa nature profonde et durable pour atteindre un équilibre réel entre « territoire publique » et sites sacrés.
Si les institutions fédérales acceptent sincèrement de reconnaître les torts du passé, mais cessent de prendre des mesures significatives pour avancer, comment les peuples autochtones pourraient-ils non seulement avoir confiance en leur rôle, mais aussi croire enfin que le génocide par la destruction de la langue, des modes de vie traditionnels et des sites sacrés ne va pas continuer comme ce fut le cas pendant des centaines d’années ?
Beaucoup d’efforts ont été faits pour effacer les blessures du passé, mais si vous écoutez les peuples autochtones, ils vous diront que non seulement ils ressentent encore le poids du passé, mais que leur mode de vie est toujours miné par l’activité actuelle, vue par les institutions fédérales comme une « progression ». C’est un problème majeur, criant, sur lequel on passe systématiquement.
Il y a encore beaucoup à faire, et malgré tout ce qui s’est passé sur les terres sacrées indigènes dans le passé, les Anciens, les Hommes et Femmes Médecine et tous les dépositaires de valeurs institutionnelles sont toujours prêts à essayer de trouver une solution durable pour maintenant et pour les générations futures. C’est une préoccupation majeure et reflète directement la Loi du Créateur, qui si elle était admise et respectée par les institutions fédérales, pourrait permettre une solution.
Le plus étonnant dans ce problème interminable est sans doute le fait que les peuples indigènes continuent à être prêts à discuter et travailler à des solutions, malgré un continuel manque de respect, encore exprimé par le fait que le Ministre Vilsack ait négligé une conférence téléphonique d’importance vitale. Cependant, aucun progrès futur n’est possible sans entendre ces paroles. Une réunion doit être organisée, pour un dialogue face à face et en personne entre les nations indigènes et les dirigeants d’institutions fédérales comme le Ministère de l’Agriculture, qui ont le pouvoir de faire passer une législation respectant les préoccupations, les traditions et les croyances des peuples indigènes.
La culture moderne du gouvernement fédéral ne respecte toujours pas la culture indigène. Les gens de culture moderne, même ceux qui ont du pouvoir, n’ont pas à être si oppressifs et méprisants pour défendre leur point de vue « moderniste » vis-à-vis de ceux qui vivent différemment. La seule question reste : le Ministère de l’Agriculture et les autres institutions concernées accepteront ils cette invitation, et viendront ils effectivement à la table des négociations avec l’esprit et le cœur ouverts, prêts à écouter et à effectuer les changements que toutes les parties savent nécessaires pour qu’ils soient ressentis sur le terrain par les gens les plus concernés ?
Brennan Lagasse est écrivain et consultant en écologie vivant à Lake Tahoe, Californie. Il est aussi correspondant sur place de Unofficial Networks (Réseaux Non-Officiels – NdT), www.unofficialnetworks.com . Brennan peut être contacté à l’adresse brennanlagasse@hotmail.com .
Le mouvement “Occupez Albuquerque” (Nouveau Mexique) a changé son nom pour “Désoccupez Albuquerque” par respect pour l’objection des Indigènes qui ont fait remarquer qu’ils ne voyaient pas comment on pourrait occuper des territoires qui étaient déjà occupés depuis des siècles.
26 octobre: la police a attaqué violemment le camp d'”Occupez Oakland” mardi soir
Vidéos et photos de l’attaque de la police sur: http://www.occupytogether.org/
Voir aussi:
YESTERDAY IN OAKLAND
(Aftermath of the police raid on Occupy Oakland)
http://www.bopsecrets.org/recent/occupy-oakland-raid.htm
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Extrait de l’article de Brenda Norrell
Censored News
Dimanche 23 octobre 2011 (consultez les mises à jour)
Traduction Christine Prat
La police de Melbourne a violemment attaqué des membres du Mouvement Occupez qui manifestaient pacifiquement, causant de nombreuses blessures. A Portland, dans le Maine, une bombe artisanale a été jetée en direction des membres du Mouvement, ne faisant heureusement pas de victime. A Chicago, il y a des infirmières parmi les personnes arrêtées. Les manifestants d’Occupez Chicago ont dit s’être vu refuser des médicaments, de la nourriture et la libération sous caution, alors qu’ils risquent de passer une 2ème nuit en prison. Des infirmières doivent manifester pour protester ce lundi à Chicago.
A Denver la police a fait des descentes aux domiciles de membres d’Occupez Denver et arrêté quatre personnes.
[…]
Voir :
http://bsnorrell.blogspot.com/2011/10/occupy-maine-hit-with-homemade-bomb.html
http://bsnorrell.blogspot.com/2011/10/national-nurses-condemn-arrest-of.html
http://www.wgntv.com/wgntv-protesters-spend-2nd-night-in-jail-20111023,0,6580042.story
http://occupysydney.visibli.com/share/9pVaY3
http://bsnorrell.blogspot.com/2011/10/occupy-wall-street-canadian-special.html
Le Mouvement Brise les Frontières
Par Frontera NorteSur (Université d’Etat du Nouveau Mexique)
Article original en Anglais publié par Censored News: ‘Occupy’ Movement Breaks Borders
Traduction Christine Prat
Dimanche 16 octobre 2011
Une vague de protestation sans précédent contre l’élite financière internationale et les politiques économiques dominantes a balayé la planète le 15 octobre. Et le Nouveau Mexique, le Mexique et les régions frontalières des Etats-Unis n’ont pas fait exception. Des actions de protestations ont été organisées à San Diego, Tijuana, Las Cruces, Ciudad Juarez et Mexico, et dans beaucoup d’autres endroits. A El Paso, l’installation d’un camp pour lundi 17 octobre, sur la Plaza San Jacinto au centre ville, a été annoncé.
Dans la ville voisine de Ciudad Juarez, des manifestants issus de plusieurs groupes ont commencé leurs actions sur la place au centre ville mais elles ont culminé au Consulat des Etats-Unis où les participants ont conspué la domination économique des Etats-Unis. Selon l’activiste Julian Contreras, l’économie mondiale « laisse les gens abandonnés tout en privilégiant les banques et les grands hommes d’affaires et en ne créant pas d’emplois et n’offrant pas aux jeunes la possibilité de poursuivre des études… »
Les manifestants ont aussi critiqué les propositions visant à autoriser légalement les soldats à fouiller les domiciles privés sans mandat de perquisition d’un juge. La manifestation de Ciudad Juarez s’est tenue à un moment où la ville est en plein gala, un événement de deux semaines organisé par le gouvernement et le secteur privé pour améliorer l’image de la ville et attirer plus d’investissements.
A Mexico, diverses manifestations auxquelles ont participé des centaines de jeunes ont également fait le lien entre les problèmes de violence liés à la soi-disant guerre de la drogue et les injustices économiques.
« Nous devons unir tous les jeunes, utiliser les réseaux sociaux pour faire une nouvelle révolution, et construire une nouvelle démocratie sans violence et sans inégalités, » dit un étudiant d’un nouveau camp de protestation installé près du Monument à la Révolution.
D’autres actions de protestation ont eu lieu ou sont prévues à Guadalajara, Morelia, San Cristobal de las Casas, Oaxaca City, Cancun et plus d’une douzaine d’autres villes.
« De l’Amérique à l’Asie, de l’Afrique à l’Europe, les gens se lèvent pour recouvrer leurs droits et demander une démocratie authentique », ont scandé des dizaines de manifestants frappant sur des casseroles, à Monterrey, la vieille ville industrielle du Nord du Mexique déchirée par la violence.
Deux jours avant le 15 octobre, plus de 100 étudiants se sont rassemblés à l’Université de l’Etat du Nouveau Mexique à Las Cruces pour une manifestation locale du nouveau mouvement étudiant national qui s’est étendu à partir de la première occupation, celle du Parc Zuccotti à New York, maintenant rebaptisé Place de la Liberté, en bordure de Wall Street. D’autres villes du Nouveau Mexique ont connu des mouvements de protestations le 15 octobre, entre autres Carlsbad, Roswell, Farmington, Taos, Santa Fe et, bien sûr, la plus grande ville de l’état, Albuquerque.
Le 15 octobre, la manifestation de Duke City était une fusion d’Americana, d’iconographie du Tiers Monde et d’histoire de la classe ouvrière.
Des membres de l’AFSCME et de 1199 syndicats étaient visiblement en train d’exprimer fougueusement une indignation longtemps refoulée contre les pouvoirs économiques constitués. Une foule de manifestants plus jeunes a défilé sur Central Avenue du camp Occupez/Libérez Albuquerque à l’Université du Nouveau Mexique (UNM) pour rejoindre un groupe plus âgé brandissant des pancartes qui avait pris position devant la Wells Fargo Bank dans le quartier Nob Hill. Au milieu des drapeaux américains, une banderole représentant Che Guevara a été accrochée à la grille de la banque tandis qu’une autre pancarte citait de feu l’acteur George Carlin sur le Rêve Américain.
Un tract distribué pendant la manifestation et représentant une énorme truie, critiquait les pratiques de prêts de la Wells Fargo et soulignait le contraste entre les gains moyens des caissiers de banque et ceux du PDG de la compagnie, Richard Kovacevich, pour 2007-2008, qui d’après les auteurs du tract aurait gagné 662 fois le salaire d’un caissier.
Un échantillonnage visuel des pancartes brandies montrait tout de suite les sentiments politiques de la foule : « Personne n’a élu les Frères Koch, » « Mettez fin à la ploutocratie, » « Rendez nous Sherman Tillman et Glass Stegall, » « Mon fils mérite un Futur, » « Arrêtez les Guerres, » « Nous sommes la Vraie Tea Party, » « Faites du bruit si vous êtes Sous-payé. »
Et de nombreux automobilistes klaxonnaient en retour, tappant sur leurs klaxons dans un tel crescendo qu’il était parfois difficile d’entendre les slogans. « Nous sommes les 99%, » « Ceci est ce à quoi ressemble la Démocratie » et « Pouvoir du Peuple » scandait une foule de personnes âgées, de jeunes et de moins jeunes. On a entendu un homme demander le retour du FDR.
Une femme, couverte d’affiches et armée d’une liste de sites web relatifs au mouvement qui se propage à travers les continents contre les politiciens établis du nord au sud et d’est en ouest, et qui se disait Tami de Mountainair, dit que le 15 octobre était « contre la mondialisation et la privatisation dont les banques ont pris la tête avec leur masse d’argent… » et ajoutait « nous avons payé leur caution, nous en sommes propriétaires. »
Des femmes ont découvert un usage créatif des tonneaux orange qui balisent les travaux sans fin qui rendent cauchemardesque la circulation automobile autour d’Albuquerque ces temps-ci, en les transformant en tambour, tandis que le chœur des Grand-Mères Enragées offrait une version a capella de succès populaires, comme « Where Have all Our Taxes Gone, » (« Que sont devenus nos impôts »), sur l’air du classique « Where Have all the Flowers Gone » (« Que sont devenues les fleurs »).
Un message adressé aux maires et chefs de la police protestait contre l’évacuation des manifestants du Mouvement ‘Occupez’ dans des villes comme Denver et rappelait aux autorités l’existence de quelque chose appelé Premier Amendement (Premier Amendement de la Constitution Américaine, qui garantit la liberté d’expression – NdT).
Le message précisait que « quand les gens à travers le Moyen Orient occupaient les places publiques, les dirigeants à Washington acclamaient généralement les protestataires et prévenaient les gouvernements Moyen Orientaux de ne pas avoir recours à la force pour les évacuer ».
[…]
Les revendications des manifestants et les avertissements contre la répression d’Etat frappaient par leur similitude avec ceux des manifestations mexicaines qui éclatèrent après la crise économique et la recapitalisation des banques en 1994/95, évènements qui ont conduit à une ère d’austérité et une dette publique qui continue à être remboursée des années plus tard.
Comme ailleurs, les mouvements Occupez/Libérez du Nouveau Mexique ne se terminent pas le 15 octobre. Un séminaire est prévu à l’Université du Nouveau Mexique cette semaine, et le Conseil Municipal d’Albuquerque est sur le point de publier une proclamation soutenant les protestations ce lundi 17 octobre.
Soutenue par le Vice-président du Conseil Municipal Rey Garduno, la proclamation place le mouvement actuel dans un contexte historique, déclarant que les « Albuquerquois savent que faire partie des 99% signifie aussi remettre en question un héritage historique d’occupation par des pouvoirs étrangers se livrant à la course au profit ; être la cible d’industries polluantes ; et voir les dollars de leurs impôts aller recapitaliser de riches corporations alors que les jeunes n’ont pas les moyens d’aller à l’université…
En plus, la proclamation déclare que les ouvriers, les gens de couleur, les immigrés et les Nations Indigènes « ne savent que trop bien ce que l’occupation signifie vraiment, » et que le 1% de privilégiés et « leurs protecteurs au gouvernement » menacent de couper les filets de sécurité et les programmes économiques bénéficiant à tous.
La proclamation se termine par « Nous sommes les 99% et nous sommes avec le Mouvement Occupez Wall Street. »
D’après le site www.occupytogether.org , au dimanche 16 octobre, moins d’un mois après que la première étincelle ait jailli à New York, près de 2 000 villes dans le monde sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans le nouveau mouvement qui commence à ébranler la politique mondiale.
Autres sources : Lapolaka.com, 15 octobre 2011. El Diario de Juarez, 15 octobre 2011, articles de Martha Elba Figueroa et Abigail Arredondo. El Paso Times, 15 octobre 2011, article de Alejandro Martinez-Cabrera. El Universal, 15 octobre 2011, articles de Patricia Salazar Martinez et Silvia Otero. La Jornada/AFP, 15 octobre 2011. KOAT.com, 15 octobre 2011. KOB.com, 15 octobre 2011.
Frontera NorteSur : online U.S.-Mexico border news
Center for Latin American and Border Studies (Centre d’études Latines Américaines et Frontalières)
New Mexico State University
Las Cruces, New Mexico
Abonnement électronique gratuit: fnsnews@nmsu.edu
A LIRE D’URGENCE:
THE AWAKENING IN AMERICA
(Analysis of the “Occupy Wall Street” movement)
http://www.bopsecrets.org/recent/awakening.htm
Traduction Française autorisée par Gedicus et Ken Knabb parue entretemps:
http://www.bopsecrets.org/French/awakening.htm
Pour des infos sur les mouvements voir aussi:
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LE REVEIL EN AMERIQUE
(Une analyse du mouvement « Occupez Wall Street »)
Article original en Anglais : http://www.bopsecrets.org/recent/awakening.htm
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LE REVEIL EN AMERIQUE
« Une situation radicale est un réveil collectif… Dans de telles situation les gens sont de plus en plus ouverts à de nouvelles perspectives, de plus en plus prêts à remettre en question les hypothèses précédentes, plus prestes à voir à travers les litanies habituelles… Les gens en apprennent plus sur la société en une semaine qu’en plusieurs années d’ ‘études sociales’ universitaires ou d’incitation gauchiste à la ‘prise de conscience’. … Tout semble possible – et beaucoup plus EST possible. Les gens ont peine à croire qu’ils ont pu tant supporter dans les ‘vieux jours’. … La consommation passive est remplacée par la communication active. Des inconnus entament des discussions passionnées au coin des rues. Les débats continuent nuit et jour, de nouveaux arrivants remplaçant constamment ceux qui partent vers d’autres activités ou essaient d’aller dormir quelques heures, bien qu’ils soient généralement trop excités pour dormir longtemps. Alors que des gens succombent aux appels des démagogues, d’autres commencent à faire leurs propres propositions et à prendre leurs propres initiatives. Ceux qui y assistent sont entrainés dans le tourbillon et se mettent à changer avec une étonnante rapidité… Les situations radicales sont les rares moments où un changement qualitatif devient réellement possible. Loin d’être anormales, elles révèlent combien nous sommes habituellement anormalement réprimés ; elles font apparaître notre vie ‘normale’ comme du somnambulisme. »
— Ken Knabb, LA JOIE DE LA REVOLUTION
Texte en Anglais : http://www.bopsecrets.org/PS/joyrev3.htm#situation
* * *
Le mouvement « Occupez » qui a balayé le pays depuis les quatre dernières semaines est déjà l’avancée la plus radicale en Amérique depuis les années 60. Et ce n’est qu’un début.
Çà a commencé le 17 septembre, quand quelque 2000 personnes se sont rassemblées à New York pour « Occuper Wall Street » pour protester contre la domination de plus en plus évidente d’une petite minorité économique sur les « autres 99% ». Les participants ont commencé par une occupation, genre cité de toile, d’un parc près de Wall Street (rebaptisé Place de la Liberté en hommage 1a l’occupation de la Place Tahrir en Egypte) et formé une assemblée générale qui s’est réunie quotidiennement depuis. Bien qu’au départ totalement passée sous silence par les médias dominants, cette action a commencé à inspirer des occupations similaires dans des centaines de villes à travers le pays, et beaucoup d’autres dans le reste du monde.
L’élite au pouvoir ne sait pas d’où sont venus les coups et se retrouve soudain sur la défensive, tandis que les pontifes des médias, qui n’y comprennent goutte, tentent de balayer le mouvement d’un revers de la main, au prétexte qu’il n’arrive pas à présenter un programme cohérent ou une liste de revendications. Les participants au mouvement ont bien entendu exprimé de nombreux griefs, des griefs suffisamment évidents pour quiconque prêtait attention à ce qui se passait dans le monde. Mais il ont judicieusement évité de se limiter à une seule revendication, ou même à quelques revendications, parce qu’il est devenu de plus en plus clair que tous les aspects du système posent problème et que tous les problèmes sont interconnectés. Alors, reconnaissant que LA PARTICIPATION POPULAIRE EST EN ELLE-MEME UNE PART ESSENTIELLE DE TOUTE VRAIE SOLUTION, l’assemblée de New York a fait une proposition désarmante de simplicité et pourtant éminemment subversive, demandant au peuple du monde d’ « Exercer votre droit de vous rassembler pacifiquement ; d’occuper l’espace publique ; de créer un processus capable de traiter les problèmes auxquels nous faisons face ; et d’engendrer des solutions accessibles à tous. … Rejoignez nous et faites entendre vos voix ! »
Presqu’aussi incapables d’y comprendre quelque chose, les radicaux doctrinaires restent sur la touche, prédisant lugubrement que le mouvement va être récupéré ou se plaignant de ce qu’il n’a pas adopté dans l’instant les positions les plus radicales. Ceux-là plus que n’importe qui devraient savoir que la DYNAMIQUE des mouvements sociaux est beaucoup plus importante que les positions idéologiques affichées de manière ostentatoire. Les révolutions émergent de processus complexes de débat social et d’interaction qui se trouvent atteindre un point critique et déclencher une réaction en chaîne – des processus très semblables à ce que nous sommes en train de voir en ce moment. Le slogan des « 99% » peut bien ne pas être une « analyse de classe » très précise, mais c’est une approximation suffisante pour débuter, et un mème excellent pour dépasser tout un jargon sociologique traditionnel et signifier que l’immense majorité des gens sont subordonnés à un système géré par une minuscule élite au pouvoir. Et cela met à juste titre l’accent sur les institutions économiques plutôt que sur les politiciens qui ne sont que leurs laquais. Les innombrables griefs ne constituent peut être pas un programme cohérent, mais pris dans leur totalité ils impliquent déjà une transformation fondamentale du système. La nature de cette transformation deviendra de plus en plus claire au fur et à mesure que la lutte se développera. Si le mouvement force finalement le système à adopter des réformes plus ou moins significatives, style New Deal, tant mieux – cela allègera pour un temps les conditions existantes ce qui nous permettra d’avancer plus facilement. Si le système se révèle incapable d’introduire des réformes significatives, cela obligera les gens à se tourner vers des alternatives plus radicales.
Quant à la possible récupération, il y aura bien entendu de nombreuses tentatives de s’emparer du mouvement ou de le manipuler. Mais je ne pense pas que çà leur sera facile. Depuis le début le mouvement d’occupation a été résolument antihiérarchique et participatif. Les décisions des assemblées générales sont scrupuleusement démocratiques et la plupart des décisions sont prises par consensus – un procédé qui peut parfois être infructueux, mais qui a l’avantage de rendre les manipulations pratiquement impossibles. En fait, LA MENACE REELLE EST EXACTEMENT LE CONTRAIRE : l’exemple de démocratie directe menace finalement toutes les hiérarchies et toutes les divisions sociales, y compris celles entre les travailleurs de base et leurs bureaucraties syndicales, et entre les partis politiques et leurs électeurs. C’est pourquoi tant de politiciens et de bureaucrates syndicaux tentent de prendre le train en marche. Cela reflète notre force, pas notre faiblesse. (La récupération se produit quand nous tombons dans le piège de prendre LEUR train.) Les assemblées peuvent évidemment accepter de collaborer avec un groupe politique pour une manifestation, ou avec un syndicat pour une grève, mais la plupart s’arrangent pour que les distinctions restent claires, et pratiquement toutes se sont profondément distanciées des deux grands partis politiques.
Alors que le mouvement est éclectique et ouvert à tous, on peut dire sans beaucoup de risques de se tromper que l’esprit qui l’anime est fortement anti autoritaire, et qu’il tire son inspiration non seulement des mouvements populaires récents en Argentine, en Tunisie, en Egypte, en Grèce, en Espagne et bien d’autres pays, mais aussi des théories et des tactiques anarchistes et situationnistes. Comme le rédacteur de Adbusters (un des groupes qui ont aidé à démarrer le mouvement) l’a noté :
« Nous ne sommes pas seulement inspirés par ce qui est arrivé pendant le Printemps Arabe récemment, nous avons étudié le mouvement Situationniste. Ce sont les gens qui ont donné naissance à ce que beaucoup pensent être la première révolution globale, en 1968, quand des émeutes dans Paris ont soudain inspiré des émeutes partout dans le monde. Tout d’un coup, les universités et les villes explosaient. Çà a été le fait d’un petit groupe de gens, les Situationnistes, qui étaient en quelque sorte l’armature philosophique du mouvement. L’un des personnages-clef était Guy Debord, qui avait écrit LA SOCIETE DU SPECTACLE. L’idée de base est que si vous avez un mème puissant – une idée très puissante – et que la situation est mûre, c’est suffisant pour déclencher une révolution. C’est le fond dont nous venons. »
La révolte de mai 1968 en France était en fait aussi un « mouvement d’occupation » – un de ses aspects les plus notoires était l’occupation de la Sorbonne et d’autres bâtiments publiques, qui a inspiré l’occupation d’usines dans tout le pays par plus de 10 millions d’ouvriers. (Il va sans dire que nous sommes encore très loin de cela, qui ne risque pas d’arriver avant que les travailleurs Américains ne se passent de leurs bureaucraties syndicales et entreprennent leur propre action collective, comme ils firent en France à l’époque.)
Alors que le mouvement s’étend à des centaines de villes, il est important de noter que chaque nouvelle occupation et assemblée demeure TOTALEMENT AUTONOME. Bien qu’inspirées par l’occupation initiale de Wall Street, elles ont toutes été créées par les gens dans leurs propres communautés. Aucune personne ou groupe extérieur n’a le moindre contrôle sur l’une de ces assemblées. Ce qui est exactement comme çà doit être. Lorsque les assemblées locales verront une nécessité pratique de se coordonner, elles se coordonneront ; en attendant, la prolifération de groupes et d’actions autonomes est plus sûre et plus fructueuse que l’ « unité » proclamée d’en-haut, à laquelle les bureaucrates appellent toujours. Plus sûre, car elle va à l’encontre de la répression : si l’occupation dans une ville est écrasée (ou récupérée), le mouvement sera toujours vivant et en pleine forme dans des centaines d’autres. Plus fructueuse, parce que cette diversité permet aux gens de partager et de comparer plus de tactiques et d’idées.
Chaque assemblée met au point ses propres procédures. Certaines opèrent sur le mode d’un consensus strict, d’autres par le vote à la majorité, d’autres avec diverses combinaisons des deux (par exemple, une politique de « consensus modifié » exigeant seulement 90% des voix). Certaines restent strictement dans les limites de la loi, d’autres entreprennent diverses actions de désobéissance civile. Elles établissent divers comités ou « groupes de travail » pour traiter des questions particulières, et emploient diverses méthodes pour s’assurer de la responsabilité des délégués ou des porte-parole. Elles prennent des décisions diverses sur la manière de se comporter avec les médias, la police et les provocateurs, et adoptent des façons différentes de collaborer avec d’autres groupes ou d’autres causes. De nombreux types d’organisation sont possibles ; ce qui est essentiel est que çà reste transparent, démocratique et participatif, et que toute tendance à la hiérarchisation ou la manipulation soit immédiatement dénoncée et rejetée.
Une autre caractéristique de ce mouvement est que, contrairement à des mouvements radicaux précédents qui tendaient à se rejoindre sur une question particulière, un jour particulier, puis à se disperser, les occupations actuelles s’installent localement sans qu’un terme soit annoncé. Elles sont là à long terme, avec assez de temps pour prendre racine et expérimenter toutes sortes de nouvelles possibilités.
VOUS DEVEZ PARTICIPER POUR COMPRENDRE CE QUI SE PASSE REELLEMENT. Tout le monde ne peut pas rejoindre les occupations instantanées, mais pratiquement tout le monde peut participer aux assemblées générales. Vous trouverez sur http://occupytogether.org des informations sur les occupations (ayant lieu ou prévues) dans plus de 1000 villes aux Etats-Unis et dans plusieurs centaines dans le reste du monde.
Les occupations rapprochent toutes sortes de gens issus de toutes sortes de milieux. Ceci peut être nouveau et même constituer une expérience déstabilisante pour certains, mais c’est incroyable de voir la rapidité à laquelle les barrières sont rompues quand on travaille ensemble à un projet collectif passionnant. La méthode du consensus peut sembler pénible au départ, surtout si l’assemblée recourt au système de « micro populaire » (l’assemblée répète en écho chaque phrase de l’orateur afin que tout le monde entende). Mais çà a l’avantage d’encourager les gens à parler à propos, et très vite on prend le rythme et on commence à apprécier l’effet produit, qui est de faire que les gens se concentrent sur chaque phrase ensemble, et que chacun ait une chance de dire quelque chose et de voir que ses préoccupations ont l’attention respectueuse de tous les autres.
Au cours de ce processus, on a déjà un avant-goût d’une nouvelle sorte de vie, de la vie comme elle pourrait être si nous n’étions pas coincés dans un système social absurde et anachronique. Il se passe tant de choses si vite que nous avons du mal à l’exprimer. Des sentiments tels que « Je ne peux pas y croire ! Çà y’est ! Ou au moins çà POURRAIT l’être – ce que nous avons attendu depuis si longtemps, le genre de réveil de l’humanité dont nous avons rêvé mais dont nous ne savions pas que çà pourrait arriver au cours de notre vie. » Maintenant, c’est là et je sais que je ne suis pas seul à verser des larmes de joie. Une femme qui a pris la parole à la première assemblée générale d’Occupez Oakland a dit « Je suis venue ici aujourd’hui pas seulement pour changer le monde, mais pour me changer moi-même. » Je pense que tout le monde là-bas savait ce qu’elle voulait dire. Dans ce brave nouveau monde, nous sommes tous des débutants. Nous allons tous faire des tas d’erreurs. On peut s’y attendre et c’est bien commme çà. C’est nouveau pour nous. Mais dans ces conditions, nous apprendrons vite.
Au cours de la même assemblée quelqu’un portait une pancarte disant : « Il y a plus de raisons d’être enthousiasmé que d’avoir peur. »
BUREAU DES SECRETS PUBLIQUES
15 octobre 2011
BUREAU OF PUBLIC SECRETS
P.O. Box 1044, Berkeley CA 94701
Etats-Unis
http://www.bopsecrets.org
« Faire danser les conditions pétrifiées en leur chantant leur propre refrain »
Texte original en Anglais, transmis par Klee Benally, plus bas
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Communiqué de presse :
Le Conseil Tribal Hopi ne Soutient Pas la Proposition Navajo d’Utiliser les Eaux Souterraines pour Faire de la Neige sur Nuvatukyaovi (Pics San Francisco en Hopi)
11 octobre 2011
Traduction Christine Prat
Kykotsmovi, Arizona – Le Conseil Tribal Hopi ne se joint pas et ne soutient pas une Résolution récente du Conseil de la Nation Navajo recommandant d’utiliser des eaux souterraines pour faire de la neige sur Nuvatukyaovi (les Pics San Francisco à Flagstaff).
Le membre du Conseil de la Nation Navajo Walter Phelps a présenté une proposition de loi qui engagerait la Nation Navajo à soutenir l’utilisation d’eaux souterraines pour faire de la neige sur les Pics San Francisco.
L’eau – quelque soit son origine – est une ressource limitée et cruciale dans le Sud-ouest et la Tribu Hopi continue à s’opposer à toute fabrication de neige artificielle par ces moyens. Ainsi qu’il est exposé dans la plainte de la Tribu Hopi contre la ville de Flagstaff, cette ville utilise déjà bien plus d’eau que ce qu’il serait juste de lui attribuer, et tous projets de vente d’eau à la compagnie Snowbowl ne fera qu’aggraver ce problème. De plus, la vente d’eau pour faire de la neige dont seule une minorité privilégiée peut bénéficier enfreint l’intérêt publique d’utiliser raisonnablement l’eau de notre région.
Nuvatukyaovi (Pics San Francisco en langue Hopi – NdT) est un lieu important et sacré pour les Hopis, un lieu qui joue un rôle central et essentiel dans la culture, les traditions et le mode de vie Hopi. La Tribu Hopi s’est opposée inlassablement à l’émission d’un Permis d’Utilisation Spéciale à la compagnie Arizona Snowbowl, qui autorise l’installation d’équipement pour fabriquer de la neige artificielle. La Tribu Hopi a maintenu une opposition inébranlable à tout type de neige artificielle sur les Pics San Francisco, que ce soit à partir d’eaux usées recyclées ou d’eau des nappes souterraines. La seule eau appropriée pour Nuvatukyaovi (Pics San Francisco) est l’eau naturelle fournie par la pluie et la neige, et il ne peut pas y avoir d’exceptions.
La proposition Navajo n’est pas une solution aux problèmes auxquels les tribus sont confrontées par l’expansion de la station Arizona Snowbowl sur Nuvatukyaovi. Le Président Tribal Hopi LeRoy N. Shingoitewa affirme que « le Conseil Tribal Hopi, tous les religieux Hopi connus, la Tribu Hopi et son peuple sont toujours, et seront toujours, opposés à toutes opérations de fabrication de neige sur Nuvatukyaovi. »
La Tribu continue à affirmer que la seule solution est d’empêcher toute forme de fabrication de neige artificielle sur les Pics et d’annuler le contrat entre la Ville de Flagstaff et la firme Arizona Snowbowl.
Pour plus d’information sur la Tribu Hopi visitez le site www.hopi-nsn.gov
Contacts : Public Information Office, tel. (00 1 928 734 3104), fax. (00 1 928 734 6665)
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The Hopi Tribal Council Does Not Support Navajo’s Proposal to Use Groundwater for Snowmaking on Nuvatukyaovi
Kykotsmovi, Ariz. – The Hopi Tribal Council does not join or support a recently proposed Navajo Nation Council Resolution recommending the use of groundwater for snowmaking on Nuvatukyaovi (the San Francisco Peaks in Flagstaff).
Navajo Nation Councilman Walter Phelps has introduced a bill that would have the Navajo Nation support the use of groundwater for snowmaking on the San Francisco Peaks.
Water – regardless of its source – is a limited and critical natural resource in the Southwest and the Hopi Tribe continues to oppose any artificial snowmaking by these means. As set forth in the Hopi Tribe’s complaint against the city of Flagstaff, the city is already using more than its fair share of water, and any plans to sell water to the Snowbowl will only worsen this problem. In addition, the sale of water for snowmaking so that a select few can benefit, violates the public interest in wise water use for our region.
Nuvatukyaovi is an important, sacred place for the Hopi which holds a central and essential role in Hopi culture, traditions and way of life. The Hopi Tribe has tirelessly opposed the issuance of the Special Use Permit to the Arizona Snowbowl, which allows for the installation of artificial snowmaking equipment. The Hopi Tribe has maintained unwavering opposition to any type of artificial snowmaking on the San Francisco Peaks, whether from reclaimed wastewater, recovered reclaimed water or groundwater. The only water appropriate for Nuvatukyaovi is natural water as provided by rain and snow, and there can be no exceptions.
The Navajo proposal is not a solution to the issues facing the tribes with respect to Arizona Snowbowl’s expansions on Nuvatukyaovi. Hopi Tribal Chairman LeRoy N. Shingoitewa affirms, “The Hopi Tribal Council, all known Hopi religious practitioners, the Hopi Tribe and its people are still, and always will be, opposed to the use of any snowmaking operations on Nuvatukyaovi.”
The Tribe continues to declare that the only solution is to prevent any and all artificial snowmaking on the Peaks and to void the contract between the city of Flagstaff and Arizona Snowbowl.
For more information on the Hopi Tribe visit www.hopi-nsn.gov.
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Klee Benally
www.indigenousaction.org – Independent Indigenous Media
Par un retournement surprenant, le Conseil de la Nation Navajo a présenté un projet de loi autorisant la station de ski Snowbowl à utiliser de l’eau des nappes souterraines pour faire de la neige artificielle. Cette alternative à l’usage d’eaux usées – peut-être contaminées par des médicaments et des hormones – avait déjà été proposée, mais rejetée par les défenseurs de la Montagne Sacrée et de l’environnement, vu que la région a un climat désertique et qu’il est déjà difficile de garantir l’eau potable à la population.
Les Navajos n’avaient que queques jours pour présenter des commentaires.
Vous trouverez ci-dessous une traduction du commentaire présenté par Klee Benally et le texte original en Anglais à la suite..
Christine Prat
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RE: Projet de Loi de la Nation Navajo 0420-11 – Soutenant l’Utilisation d’Eaux Souterraines Pour Faire de la Neige Sur Dook’o’oosliid (Pics San Francisco).
Salutations,
La Nation Navajo a jusqu’à maintenant pris des positions très sérieuses pour protéger les Pics Sacrés San Francisco par de nombreuses résolutions dont une en 1998 appelait au démantèlement de la station de ski et à mettre fin au litige. Soutenir maintenant l’utilisation d’eaux souterraines pour faire de la neige sur les Pics Sacrés San Francisco serait contraire à toutes les positions prises précédemment par la Nation Navajo.
Le projet de Loi laisse entendre que la profanation de Dook’o’oosliid est approuvée par la Nation Navajo.
De plus, soutenir la fabrication de neige avec de l’eau des nappes souterraines en ce moment menace de SAPER deux affaires juridiques en cours ; la Coalition Save the Peaks contre le Service des Forêts et la Tribu Hopi contre la Ville de Flagstaff. Ceci constitue une conséquence possible grave que la Nation Navajo devrait prendre en compte avant toutes décisions concernant le projet de loi.
Les rédacteurs de ce projet n’ont ni consulté ni dialogué avec les plaignants, les ONG ou les individus engagés activement depuis longtemps dans cette affaire.
Le Conseil de la Nation Navajo devrait au minimum organiser une réunion avec ces personnes concernées avant d’envisager une action de cette nature.
Ce projet de loi démontre aussi que les parrains et les rédacteurs ont perdu le contact avec les gens de la base qui ont travaillé sur cette question depuis plus d’une décennie.Il existe un bon nombre d’autres moyens que le Conseil de la Nation Navajo peut utiliser pour faire face efficacement à la profanation de Dook’o’oosliid qui n’impliquent pas de soutenir un projet de loi qui : 1. soutient la continuation de la profanation de Dook’o’oosliid par Snowbowl. 2. sape deux affaires en cours. 3. ne tient aucun compte et sabote le travail et les stratégies des associations de la base. 4. trahit des positions jusque là affirmées de manière unitaire avec d’autres entités tribales.
Ahe’hee’ (Merci – NdT),
Klee Benally – Activiste du mouvement Protect the Peaks
Circonscription de Forest Lake
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RE: Navajo Nation Legislation 0420-11 – Supporting The Use Of Groundwater For Snowmaking On Dook’o’oosliid (San Francisco Peaks).
Greetings,
The Navajo Nation has previously taken very serious stands to protect the Holy San Francisco Peaks with numerous resolutions including one in 1998 calling for the dismantling of the ski area and litigation.
It would be contrary to all previous positions that the Navajo Nation has taken to now support use of groundwater for snowmaking on the Holy San Francisco Peaks.
The proposed legislation sends the message that desecration of Dook’o’oosliid is approved by the Navajo Nation.
Additionally, supporting groundwater snowmaking at this time would threaten to UNDERMINE two current legal cases; the Save the Peaks Coaltion v. Forest Service and the Hopi Tribe v. City of Flagstaff.
This is a serious consequence that the Navajo Nation should consider prior to any decisions regarding this proposed legislation.
The writers of this legislation did not consult or engage in dialogue with litigants, NGOs and individuals who have long been actively engaged in the issue.
At minimum the Navajo Nation Council should convene a meeting with these stakeholders prior to considering an action of this nature.
This proposed legislation further demonstrates that the sponsors and writers are out of touch with the grassroots people who have been working on this issue for more than a decade.
There are a number of alternative means that the Navajo Nation Council can use to effectively address desecration of Dook’o’oosliid that do not include supporting a piece of legislation that: 1. supports Snowbowl’s further desecration of Dook’o’oosliid. 2. undermines two current legal cases. 3. ignores and undermines grassroots work and strategies. 4. betrays previously held unified positions with other tribal entities.
Ahe’ hee’,
Klee Benally – Protect the Peaks Activist
Forest Lake Chapter
Legislation 0420-11 An Action Relating To Resources And Development And NAABIK’IYATI’; Supporting The Use Of Groundwater For Snowmaking On Dook’o’oosliid (San Francisco Peaks).
Projet de loi 0420-11 Une Action Concernant les Ressources Et le Développement et NAABIK’IYATI’ ; Soutenant l’Utilisation d’Eaux Souterraines Pour Faire de la Neige sur Dook’o’oosliid (Pics San Francisco)
http://www.navajonationcouncil.org/Legislations/2011/Oct/0420-11.pdf