L’Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis – EPA – aurait l’intention de commencer à décontaminer une mine d’uranium abandonnée à Cameron, dans la Réserve Navajo. Pour le moment, elle entreprend des consultations et des commentaires publiques. Ça va encore prendre du temps. Ça fait des décennies que la population et l’eau sont empoisonnées par la radioactivité.
Dans le rapport de l’EPA, il est affirmé que le site est clôturé et ne présente pas de danger immédiat pour la population. En 2014, il n’y avait pas encore de clôture ni de panneaux pour prévenir les gens. J’y suis allée en septembre 2017 avec Klee Benally et un autre Navajo, la clôture était faite de simple fils de fer barbelés, avec des panneaux « danger… ». Cependant, dans un climat désertique, une telle clôture n’empêche pas le vent de transporter la poussière très sèche au-delà de la clôture. Donc, en septembre 2017, mes compagnons ont mesuré le taux de radioactivité à travers la clôture et à l’extérieur. À au moins 100 mètres à l’extérieur, ils ont mesuré un taux de radioactivité bien supérieur à celui mesuré à l’intérieur.
Il y a plus de 500 mines d’uranium abandonnées dans la Réserve Navajo, dont 111 dans la région de Cameron.

L’article ci-dessous est une réaction de Klee Benally, publiée sur Facebook, après l’annonce de l’intention de décontaminer.

Christine Prat

Par Klee Benally,
Réaction à un article du Navajo Times*
Publié sur Facebook
10 mars 2023
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Les mines d’uranium abandonnées sont l’héritage mortel de l’énergie nucléaire (ce que nous appelons le Colonialisme Nucléaire) et ce pourquoi l’énergie « nucléaire verte » est un mensonge mortel. Nos communautés sont empoisonnées de façon permanente par la pollution radioactive et il n’y a pas de moyen sûr à 100% à long terme (nous parlons de milliers d’années) de décontaminer l’uranium quand il a été sorti du sol.

Étant donné que nos communautés ne devraient pas continuer à risquer d’être exposées par ces sites abandonnés extrêmement dangereux, l’Alternative 3** de l’EPA [Agence de Protection de l’Environnement] ne ferait que déplacer le problème dans une autre communauté et mettre en danger d’autres communautés le long du trajet de transport. L’Usine de White Mesa, en soi-disant Utah, où les matériaux radioactifs serait transportés de Cameron, empoisonne déjà la communauté Ute de Ute Mountain. Ils veulent que l’usine ferme et que le site soit également décontaminé. Nous ne devrions pas être complices de l’empoisonnement d’autres communautés Autochtones pour « décontaminer ».

L’Alternative 3** livre aussi des déchets d’uranium pour la production à l’Usine de White Mesa. Energy Fuels, propriétaire du site, en ferait des profits. Energy Fuels est aussi la compagnie qui se prépare à extraire de l’uranium de la mine rebaptisée Pinyon Plain (ex-Mine du Canyon) près du Grand Canyon. L’exploitation de cette mine entrainerait le transport de minerai d’uranium à travers des communautés déjà dévastées par la pollution radioactive de l’Usine de White Mesa (avec des risques d’accidents et de fuites).

 L’action recommandée par l’EPA est l’Alternative 2**, un « confinement sur place renforcé ». Si c’est fait de manière complète (pas seulement en rajoutant une couche sur ce qui existe déjà), c’est la seule option qui peut assurer une sécurité relative aux communautés.

La réalité désastreuse de la fuite du train de l’ « Ohio » [fuite très grave de dioxine suite à un déraillement le 3 février 2023], avec la négligence des services gouvernementaux et les entreprises écocidaires, est la réalité continuelle à laquelle nous faisons face dans le Sud-ouest occupé. C’est l’héritage du colonialisme nucléaire du Sud-ouest, de la catastrophe de Church Rock de 1979 à la lixiviation radioactive toujours en cours à l’Usine de Shiprock.

Il y a plus de 100 mines d’uranium abandonnées dans la région de Cameron. Les Diné exigent la décontamination depuis des décennies. L’EPA a organisé ce genre de sessions par le passé et connait les risques auxquels les communautés de cette région sont exposées, mais vu qu’elle dépend de la Loi du Super Fonds [P.L. 96-510 adoptée par le Congrès en 1980, réactualisée en 1986***], elle attend que les poursuites en justice des « parties responsables » soient réglées avant de prendre la responsabilité de décontaminer.

La santé de nos communautés n’est pas une priorité pour les fédéraux, quand il s’agit de prendre la responsabilité d’engager les ressources nécessaires pour une décontamination significative et complète.

Les plus de 500 mines d’uranium abandonnées dans le Pays Diné doivent être décontaminées, mais pas en se contentant de « déplacer le problème » et d’empoisonner d’autres communautés Autochtones.

En tout, il y a plus de 15000 mines d’uranium abandonnées dans 15 états de l’ouest. Le nombre réel, les lieux, les risques existants et le déplacement potentiel des matériaux radioactifs de ces sites n’ont pas encore été déterminés de façon adéquate.

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* L’article du Navajo Times rappelle que les mines abandonnées ont été laissées en l’état jusque dans les années 1990, et c’est le Service Navajo de Remise en Etat des Sols de Mines Abandonnées qui a remis les déchets dans le puits principal et les a couverts de terre non-contaminée.

** Selon le même article, les Alternatives sont :
Alternative 1 : Ne rien faire.

Alternative 2 : Confinement sur Place Renforcé.

Alternative 3 : Transporter les déchets à l’usine de White Mesa déjà très polluante pour la Réserve de Ute Mountain. Et le coût serait beaucoup plus élevé que pour l’Alternative 2.

*** Des travaux avaient été commencés, mais ont été abandonnés quand le montant non-révisé du Super Fonds a été épuisé.

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Pour plus d’infos (en anglais), voir https://cleanupthemines.org/facts/ et www.Haulno.com

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