Lithium Americas Corporation essaie de se distancer des violations des droits humains de son Projet « Cauchari Oloroz »

Par Max Wilbert
12 août 2023
Photos Susi Maresca
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Je m’appelle Max Wilbert, co-auteur de Bright Green Lies, fondateur de Protect Thacker Pass, et organisateur d’une communauté bio-centrée avec Deep Green Resistance. Cette lettre d’information se concentre sur la durabilité, le dépassement écologique et le ‘laver plus vert’. Si vous voulez me suivre, vous pouvez vous inscrire. Presque tout est gratuit, et les inscriptions payantes soutiennent mon travail.

Cet article a été publié dans The Nevada Independent aujourd’hui. Les photos ont été prises par Susi Maresca.

La récente couverture médiatique de la mine de lithium de Thacker Pass dans la presse du Nevada, néglige la controverse autour de ce projet.

Lithium Americas Corporation (LAC) fait face à quatre poursuites en justice, trois camps de protestation, des barrages non-violents et des critiques dans la presse, à propos des impacts sur des sites culturels sacrés, comme le site du massacre de Thacker Pass en 1865, la destruction de l’habitat de la vie sauvage et l’utilisation de 19 millions de litres d’eau par jour. Le Nevada n’a pas connu de telle controverse à propos d’une mine depuis le Mont Tenabo et les sœurs Dann.

[Les lecteurs de notre site savent déjà que moi-même, quatre protecteurs de l’eau Autochtones et deux alliés, ainsi que l’organisation que j’ai aidé à créer – Protect Thacker Pass – sont poursuivis par Lithium Americas Corporation.]

Mais ce que la plupart des lecteurs ne savent pas, c’est que l’opposition à laquelle Lithium Americas est confronté, n’existe pas seulement dans le Nevada. Son projet de lithium en Argentine (en copropriété avec la compagnie chinoise d’Etat Ganfeng Lithium) se heurte aussi à une opposition déterminée.

Depuis plus d’un mois, des protestations conduites par des femmes autochtones ont eu lieu près de la mine de Lithium Americas de Cauchari-Olaroz. Des autochtones Kolla et Guarani disent qu’un nouveau changement de la constitution « donne le pouvoir aux propriétaires privés de les chasser… dans un contexte de conflits qui augmentent à propos des droits sur le sol en ce qui concerne l’extraction de lithium par des multinationales. »

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Amnesty International et une douzaine d’organisations des droits humains ont demandé la suspension de ces nouvelles lois, notant que la police avait attaqué les manifestants avec « un usage excessif de la force, utilisant indifféremment des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène et de la violence physique. » Malgré la violence, les communautés ont continué à s’organiser ; la semaine dernière, une caravane de protestation de milliers de gens est arrivée à Buenos Aires.

Dans un article récent de Mark Robinson dans le Reno Gazette-Journal, un représentant de la LAC, Tim Crowley, déclare qu’ « il ignore si la compagnie a eu des problèmes de manifestations dans d’autres pays. » Je suppose que c’est un mensonge – parmi beaucoup d’autres que Crowley et Lithium Americas répètent depuis des années. Minera Exar, la compagnie écran de Lithium Americas en Argentine, a été citée dans un rapport du Centre de Ressources pour les Affaires et les Droits Humains [Business and Human Rights Resource Center] sur les compagnies minières commettant des violations des droits humains.

Extrêmement soucieux de se distancer des problèmes gênants de droits humains, de protestations, de décès de travailleurs [2 à Jujuy – NdT] et de connexion avec la Chine, qui pourraient empêcher l’accès aux fonds gouvernementaux, Lithium Americas a décidé de se diviser en deux compagnies – l’une centrée sur l’Argentine, l’autre en Amérique du Nord. C’est le script des grandes compagnies : limiter la responsabilité et protéger les profits à tout prix.

Un chercheur Argentin a dit au Washington Post « C’est comme une plaisanterie… [les compagnies minières] pensent vraiment que les autochtones sont comme des pierres sur la route. S’il y a un problème, elles doivent le dégager d’un coup de pied. » L’article du Washington Post fait observer qu’un slogan peint à la main en Argentine dit « Nous ne mangeons pas de batteries. Elles prennent l’eau, et la vie disparait. »

Les gens d’ici devraient faire attention. Le Nevada est l’état le plus sec du pays et, selon la Division des Minéraux du Nevada, on estime qu’il y a 20127 demandes de permis miniers dans l’état au 30 avril de cette année.

Pendant ce temps, un article récent du magazine Time dit : « Il y a de bonnes raisons pour les communautés des Etats-Unis d’être sceptiques à propos de projets de mines … Il y a plus de 50 000 mines abandonnées rien que dans l’ouest des Etats-Unis, dont 80% doivent encore être assainies. »

Thacker Pass implique les mêmes risques. Pendant la conférence annuelle du Réseau d’Action Minière de l’Ouest, à Reno, l’an dernier, le Professeur H. Emmerman, un hydrologue indépendant, a appelé le plan de stockage des déchets toxiques de Lithium Americas « une créativité irresponsable » non basée sur la science, et il croit qu’il y a une possibilité importante soit d’une défaillance catastrophique (comme la catastrophe du Mont Polley, en Colombie Britannique) soit d’une fuite graduelle de polluants dans la nappe phréatique pour des milliers d’années.

Et qu’en est-il du changement climatique ? Alors que Lithium Americas prétend que le lithium est nécessaire pour remédier au changement climatique, sa mine va y contribuer directement avec des milliers de tonnes d’émissions de carbone et de polluants par an, dans une atmosphère déjà surchargée. Sans compter ce qui est déjà relâché maintenant, du fait que la compagnie déchire des buissons d’armoise anciens et la délicate terre de surface.

Les véhicules électriques sont peut-être moins destructifs pour le climat que les moteurs à combustion interne, mais ils ne sont certainement pas bons pour la planète. À mesure que les véhicules électriques sont plus gros, l’économie de carbone devient moindre. Une étude a trouvé que la prolifération de SUV ne « contribuerait probablement pas à réduire les émissions des véhicules » si le lithium et d’autres matériaux essentiels sont limités (ils le sont). Entretemps, Lithium Americas a signé un accord avec General Motors, qui produit le véhicule électrique Hummer, le plus grand de tous les véhicules électriques.

Toute réduction d’émission de gaz à effet de serre par les véhicules électriques ne sera qu’une petite goutte dans un seau. L’accroissement de la taille des véhicules et de tout le secteur automobile, signifie que les émissions de gaz carbonique par les transports vont probablement continuer à augmenter.

Un vol de territoire au niveau mondial est en train de se produire. L’extractivisme commence ou s’étend au Portugal, au Royaume-Uni, en Bolivie, au Chili, en Argentine, en Australie, au Tibet et en Chine. Tous ces projets causent des dégâts et les communautés se défendent. En Serbie, par exemple, une opposition massive a empêché Rio Tinto d’extraire du lithium dans l’une des vallées agricoles les plus productives du pays.

Ce n’est pas « vert » de détruire le territoire, que ce soit pour du charbon ou du lithium. Si on veut arrêter le réchauffement climatique, changer ce qu’il y a sous le capot de nos voitures n’est pas suffisant. Réduire les émissions et sauver notre planète implique de remettre en cause notre culture de consommation et de croissance.

C’est la nouvelle vérité inconfortable.