Democracy NOW! (média indépendant qui émet sur le web) a enregistré son émission du vendredi 14 mars 2014, présentée et animée par Amy Goodman, à l’Université du Nord de l’Arizona, à Flagstaff. La vidéo ci-dessous (sous-titrée en français) est un extrait de l’émission. C’est une interview de Klee Benally – activiste Navajo – et de Taylor McKinnon, du Grand Canyon Trust (qui tente de préserver le Grand Canyon du Colorado), sur les dégâts causés par les mines d’uranium dans la région. Vous trouverez aussi plus bas la transcription en français de l’interview. Voir la vidéo pour des extraits d’un documentaire sur les dégâts de l’uranium dans la Réserve Navajo. Sur la question de l’uranium dans le Grand Canyon du Colorado, voir aussi l‘interview de Carletta Tilousi, Havasupai (les Havasupai vivent au fond du Grand Canyon et sont totalement dépendants des eaux qui ruissellent le long des parois).
Vidéo: Uranium, contamination, pollution, changement climatique en Arizona, une interview de Klee Benally et Taylor McKinnon
Voir un autre extrait de l’émission: interview d’Alex Soto sur la situation à la frontière mexicaine
ARIZONA : “UN LENT GENOCIDE”: L’EXTRACTION D’URANIUM LAISSE UN HERITAGE NUCLEAIRE TOXIQUE EN TERRE AUTOCHTONE
Democracy NOW ! Vendredi 14 mars 2014
Transcription par Brenda Norrell
Publiée sur Censored News
See transcription in English on Censored News
Traduction et sous-titres Christine Prat
Le site monumental du Grand Canyon est le théâtre d’une bataille autour de l’extraction toxique d’uranium. L’an dernier, une compagnie nommée Energy Fuels Resources a obtenu une approbation des autorités fédérales pour rouvrir une mine à 10 km de l’entrée sud très fréquentée du Grand Canyon. Une coalition d’Autochtones et de groupes écologistes ont protesté contre cette décision, disant que l’extraction d’uranium pourrait affecter les rares sources d’eau et poser de graves problèmes de santé. Les terres tribales Diné (Navajo) sont jonchées de mines d’uranium abandonnées. De 1944 à 1986, 3,9 millions de tonnes d’uranium ont été extraites ou obtenues par explosion des montagnes et des plaines de la région. Plus de 1000 mines ont été fermées, mais les compagnies minières n’ont pas enlevé de manière satisfaisante leurs tas de déchets radioactifs, ce qui a conduit à une augmentation en flèche du taux de cancers et d’autres problèmes de santé. L’émission Democracy NOW ! du 14 mars 2014 a été enregistrée à Flagstaff, Arizona, et a diffusé une interview de Taylor McKinnon, directeur de l’énergie au Grand Canyon Trust, et Klee Benally, Diné (Navajo), activiste et musicien. « C’est vraiment un lent génocide de la population, pas seulement les Autochtones de cette région, il est estimé qu’il y a plus de 10 millions de gens qui résident à moins de 80 km de mines d’uranium abandonnées », dit Klee Benally. Il a aussi décrit la lutte pour la préservation des San Francisco Peaks, une zone considérée comme sacrée par 13 tribus Autochtones, où la station de ski Snowbowl utilise des eaux usées recyclées pour faire de la neige.
L’HERITAGE TOXIQUE DE L’URANIUM EN TERRE AUTOCHTONE
Après avoir souhaité à Amy Goodman et son équipe la « bienvenue dans l’état raciste d’Arizona et la ville légèrement moins raciste de Flagstaff », Klee Benally a décrit la situation des Autochtones face à la colonisation énergétique de leur territoire.
« Nous faisons face à la colonisation des ressources dans cette région depuis de nombreuses années. C’est une véritable bataille – ici la géopolitique est enracinée dans le racisme. Elle est enracinée dans l’avidité des grandes compagnies à laquelle nous sommes encore confrontés jusqu’à aujourd’hui. Plus de 20 000 Diné, ou Navajo, ont été déportés de force de nos terres ancestrales à cause des activités de Peabody Coal sur Black Mesa, et il est estimé que nous avons plus de 1000 mines d’uranium abandonnées sur nos terres. En 2005, la Nation Diné , ou Navajo, a décidé d’interdire toutes les activités d’extraction d’uranium sur nos terres. Mais aujourd’hui, nous avons des représentants au Conseil Tribal qui sont en train de brader notre avenir et essaient de lever cette interdiction. Et à ce jour, nous sommes dans une situation où nous n’avons pas d’études sanitaires significatives sur les effets de l’extraction d’uranium dans notre communauté. »
« En fait je viens d’aller à Cameron, à environs 40 mn en voiture d’ici, hier, avec Taylor McKinnon, pour une conférence. Et à 15 m du siège du Chapitre – c’est l’autorité locale dans cette région – il y a une mine d’uranium abandonnée, qui a l’air d’une colline. Je veux dire, la boue radioactive ressemble à la boue ordinaire. C’est une menace invisible. Mais il y avait des jouets. Il y avait – d’après ce que j’ai compris, des signes indiquant que des enfants jouent sur cette colline, et il y a des maisons juste au pied. Mais l’un de ces rochers, quand on y a posé un compteur Geiger, çà a crevé le plafond ! Donc, ces mines d’uranium abandonnées ressemblent au reste du paysage naturel ».
« On estime qu’il y en a plus de mille sur nos territoires. Mais on estime aussi qu’il y a plus de 10 000 mines d’uranium abandonnées dans l’ensemble des Etats-Unis, essentiellement dans 15 états de l’ouest. Mais l’EPA [Agence de Protection de l’Environnement] n’a jamais fait d’inventaire sérieux de ces menaces qui sont vraiment un héritage toxique qui nous affecte encore aujourd’hui. C’est vraiment un lent génocide de la population, et pas seulement les Autochtones de cette région, il est estimé que plus de 10 millions de gens résident à moins de 80 km de mines d’uranium abandonnées. »
« L’EPA a implémenté un plan quinquennal pour le nettoyage de ces mines abandonnées. Mais en réalité, ces mines ne sont pas décontaminées. L’EPA transforme ces sites abandonnés en sites de confinement ou en décharges toxiques, dangereuses, qui laissent toujours échapper des produits toxiques dans nos conduites d’eau, qui affectent toujours nos pâturages et nos moutons etc. Et nous avons des mines abandonnées et des menaces de nouveaux projets de mines à proximité de nos sites sacrés, qui sont vitaux pour notre mode de vie, pour notre identité culturelle. Ainsi, ce qu’on nous dit – c’est l’essence de ce qu’on nous fait comprendre – c’est que les effets sur notre santé, notre bien-être et qui nous sommes sur nos terres sacrées n’est pas assez important pour effectuer une décontamination sérieuse. »
« La décontamination est un processus lent. C’est un processus complexe. Et je pense que c’est très compliqué dans le cadre de la législation actuelle de la Réserve, mais nous devons voir la réalité en face, comme je l’ai dit, il y a plus de 10 000 mines abandonnées aux Etats-Unis. Il y a des zones où les mines abandonnées ou les nouvelles mines projetées sont situées très près du territoire de notre Réserve. Elles sont sur des terres publiques ou privées, et elles laissent échapper des produits toxiques. La poussière, les particules toxiques sont amenées par le vent dans nos communautés. Et nous n’avons aucun contrôle. Nous ne pouvons pas établir de règlements. Par exemple, à Church Rock, au Nouveau-Mexique, où a eu lieu en 1979 une des plus graves fuites radioactives de l’histoire des Etats-Unis, rien de sérieux n’a encore été fait pour décontaminer. Il y a des nouveaux projets de mines à l’extérieur de nos terres tribales, mais juste à la frontière. Donc, c’est un problème complexe. De multiples administrations sont impliquées. Et ce à quoi on assiste finalement, c’est que notre futur est dirigé dans le sens des intérêts et de l’avidité des entreprises. »
Taylor McKinnon a décrit l’action du Grand Canyon Trust dans la lutte contre l’ouverture de nouvelles mines d’uranium : « Nous nous sommes surtout concentrés sur l’activité de l’industrie de l’uranium pour développer de nouvelles mines sur des terres publiques. Et depuis le milieu des années 2000, où le prix de l’uranium est monté en flèche, nous avons assisté à une résurgence des activités d’extraction d’uranium dans le nord de l’Arizona. Alors nous avons pris la tête de la poursuite en justice – avec différents partenaires tribaux, environnementaux et issus de la communauté – pour obliger le gouvernement Obama à promulguer une interdiction de toute nouvelle extraction dans le bassin aquifère du Grand Canyon. C’est entré en application en 2012. Cependant, çà ne s’appliquait pas aux vieilles mines, qui avaient été ouvertes dans les années 1980. Et nous avons vu des administrations fédérales – le Bureau de l’Aménagement du Territoire et le Service des Forêts – autoriser trois de ces mines à rouvrir, sans entreprendre de nouvelles consultations publiques ou de nouveaux rapports environnementaux. Ils se fondent sur leurs études des années 1980, et donc laissent de côté les nouvelles connaissances sur les effets potentiels des ces mines sur les eaux souterraines, les nappes aquifères qui alimentent des sources dans le Grand Canyon qui sont vitales pour la vie sauvage et sont considérées comme sacrées par les Autochtones, et qui forment, à part le fleuve Colorado, les eaux de surface pérennes du Grand Canyon. »
Voir articles précédents sur le problème de l’uranium dans le sud-ouest des U.S.A.
LES SAN FRANCISCO PEAKS
Klee Benally a brièvement résumé la lutte de plusieurs décennies, engagée par 13 tribus Autochtones et des défenseurs de l’environnement, pour protéger les Pics Sacrés San Francisco, profanés et endommagés pour le plus grand profit d’une station de ski privée.
« Dook’o’oosliid, ou Pics Sacrés San Francisco, sont sacrés pour plus de 13 Nations Autochtones. Ils sont au centre de notre survie culturelle. »
« Ils se trouvent juste à la sortie de Flagstaff, ils sont le point culminant du nord de l’Arizona. De leurs sommets, on peut voir le Grand Canyon. On peut voir un paysage si beau ! Et ils ne sont pas seulement vitaux pour nos pratiques culturelles, ils constituent une île écologique, qui abrite des espèces locales comme le séneçon jacobée [ou packera franciscana, photo Wikipédia] des San Francisco Peaks, qu’on ne trouve que sur les San Francisco Peaks et nulle part ailleurs dans le monde. »
« Actuellement – depuis 30 ans – surtout depuis les 20 dernières années, la bataille fait rage pour protéger cette montagne de l’extraction minière et du développement, et il n’est pas seulement question de charbon, d’uranium, de pétrole, de gaz naturel, mais aussi des loisirs comme ressource à extraire de ces terres sacrées. Les San Francisco Peaks sont gérés, en tant que terres publiques, par le Service des Forêts des Etats-Unis, qui actuellement les loue à une station de ski, appelée Arizona Snowbowl. »
« Et ils les ont autorisés à s’étendre dans une forêt alpine rare, abattant plus de 30 000 arbres, dont beaucoup étaient anciens. Et le côté le plus controversé de l’affaire est que la station a signé un contrat avec la Ville de Flagstaff. Les politiciens de Flagstaff ont vendu près de 700 millions de litres d’eaux usées recyclées par an, pour faire de la neige. »
« C’est considéré comme de l’eau d’égouts traitée, ou eau recyclée. Et dans ce cas, il y a des produits nocifs qui ne sont ni testés ni traités par l’EPA et sont autorisés dans cette eau, et c’est vaporisé sur notre ‘église’ sacrée. Actuellement, nous avons derrière nous plus de 10 ans de batailles juridiques qui sont allées jusqu’à la Cour Suprême, et la situation est que nous n’avons pas de protections garanties de notre liberté religieuse en tant qu’Autochtones. Et Snowbowl est devenue en 2011, la première station de ski au monde à faire de la neige constituée à 100% d’eau d’égouts recyclée. »
« Nous avions une coalition de 14 Nations Autochtones travaillant ensemble sur cette question, avec six groupes écologistes, qui avait engagé des poursuites pour défendre cette montagne sacrée sur la base de problèmes culturels et environnementaux. Mais ces actions ont échoué devant la Cour Suprême. Ce qui constitue une réaffirmation du fait qu’en tant qu’Autochtones nous n’avons pas de protection garantie de notre liberté religieuse. Et c’est la situation dans laquelle nous sommes toujours. J’ai été arrêté à de nombreuses reprises en essayant de bloquer les excavatrices sur la montagne, et il semble que ce soit le seul moyen que nous ayons de nous défendre. »
Voir de nombreux articles sur la lutte pour les San Francisco Peaks, et résumé de l’histoire de la station de ski
L’ENVIRONNEMENT, LE CHANGEMENT CLIMATIQUE
Klee Benally fait remarquer que « le thème de cette émission, si je comprend bien, c’est les gagnants et les perdants dans ces luttes. Mais il n’y a pas de gagnants quand on détruit Notre Mère la Terre. Quand on détruit l’eau dont nous avons besoin pour boire, quand on détruit l’air dont nous avons besoin pour respirer, et les terres dont nous avons besoin pour nous nourrir. Et actuellement, l’EPA a fermé 22 puits dont il a été établi qu’ils contenaient des niveaux trop élevés de produits toxiques, rien que sur le territoire de la Nation Navajo. Mais beaucoup d’entre nous n’ont pas l’eau courante ; ils n’ont pas l’électricité. Cependant, nos terres ont été exploitées. Nous avons trois centrales au charbon qui polluent notre air. Nous avons ces mines d’uranium abandonnées et de nouvelles mines qui menacent la région. Nous avons la fracturation hydraulique qui menace notre terre aussi. Mais ce n’est pas seulement un problème ici. Partout où il y a une crise environnementale, il y a une crise culturelle, parce que nous sommes des gens de la Terre. C’est une crise sociale qui touche chacun à un certain degré, parce que, quand on considère le problème global du réchauffement climatique, le réchauffement climatique, d’un point de vue Autochtone, n’est qu’un symptôme du fait que nous ayons rompu l’équilibre avec notre Mère la Terre. Donc le problème est partout. »
« Nous constatons la menace de déplacement de peuples Autochtones à cause de la montée des eaux et la dépopulation de villages qui se trouvaient sur des îles. Nous voyons la menace de migrations des caribous et ce genre d’effets. Et nous voyons ces stations de ski qui pensent avoir besoin de faire de la neige parce qu’ils n’ont pas assez de neige naturelle, et ils profanent des montagnes sacrées comme celle-ci. Je veux dire – nous sommes tous Autochtones, dans ce pays, ou quelque part, sur notre Mère, la Terre. Donc ces effets nous touchent tous. »
Taylor McKinnon conclut en indiquant que « des chercheurs ont fait des projections indiquant une baisse du débit [du Colorado – NdT] pouvant aller jusqu’à 30% au cours du siècle à venir, à cause du changement climatique et d’autres facteurs. Donc, à une époque où, le Plateau du Colorado, le fleuve Colorado et ses consommateurs d’eau sont ceux qui ont le plus à perdre, il est temps que cette région fasse très attention aux choix énergétiques en train d’être faits. »
Par Don Yellowman, Président de Forgotten People (Gens Oubliés)
Publié par Censored News
13 novembre 2012
See original article in English
Traduction Christine Prat
Yah ah teh à tous :
Mon nom est Don Yellowman, Président de Forgotten People (Gens Oubliés), je suis Diné (Navajo), avec des Droits Inaliénables à l’Air Pur, l’Eau Pure et celui de vivre et prospérer sur nos Terres Maternelles.
Je suis là aujourd’hui pour partager avec vous la Résolution de Forgotten People sur le problème de la contamination par l’uranium de Diné Be Keh Yah (le pays des Navajos).
Je suis ici devant vous, au pied de Window Rock (un rocher percé d’un trou, dans la capitale de la réserve navajo qui porte son nom), qui symbolise notre force unifiée en tant que Diné. Je crois que nous sommes des Gens Sacrés chargés par notre Créateur d’être les Gardiens de nos territoires et de protéger notre mode de vie traditionnel.
Nous faisons face à de nombreux problèmes sur le territoire de la Nation Navajo, les gens se battent pour leurs droits à l’eau et contre les intérêts des non-Navajo sur nos ressources naturelles et nos sites sacrés.
Notre Nation Navajo soutient la production d’énergie sale qui pollue notre air, notre eau et nos terres ; et ironiquement, nous qui vivons à l’ouest de la Nation Navajo nous sommes vu refuser l’accès à l’électricité et à l’eau potable à cause de ces intérêts et politiques extérieurs (comme le ‘Gel de Bennett’ et la liste est longue) qui font obstacle à notre droit de prospérer.
Aujourd’hui, beaucoup de nos dirigeants élus sont ouverts à l’exploitation d’uranium sur le territoire de la Nation Navajo et on dit qu’ils la soutiennent.
A nos dirigeants : Ne plaçons pas le profit au dessus des gens, ni ne soyons aveuglés par l’ignorance et la cupidité ; n’oublions pas que le plus grave accident nucléaire aux Etats-Unis s’est produit sur le territoire de la Nation Navajo, lorsqu’un barrage retenant des déchets radioactifs s’est rompu, les laissant se déverser dans le Rio Puerco.
L’Histoire est condamnée à se répéter si elle est ignorée, cela s’est produit le 16 juillet 1979, à 5 heures du matin, sur le territoire Navajo, moins de 12 heures après que le Président Carter ait avancé des projets d’utiliser plus d’énergie nucléaire et de carburants fossiles. Ce matin-là plus de 1100 tonnes de déchets d’uranium se sont engouffrées à travers un barrage de boue près de Church Rock, Nouveau Mexique. Avec les déchets, près de 400 millions de litres d’eau radioactive ont traversé le barrage avant que la brèche ne soit réparée.
Pratiquement pas un mot de ce désastre n’est parvenu aux médias nationaux, et même aujourd’hui, peu de Navajos et d’Américains ont entendu parlé de cette effroyable catastrophe.
J’ai l’honneur, en tant que Président de Forgotten People, de présenter leur Résolution appelant la Nation Navajo et le Gouvernement des Etats-Unis à financer l’Assainissement de la Contamination à l’Uranium ; à respecter l’esprit du Moratoire sur l’Exploitation de Mines d’Uranium ; et à soutenir l’installation d’un Système de Surveillance des Radiations sur le territoire de la Nation Navajo.
Forgotten People appelle les Gouvernements de la Nation Navajo et des Etats-Unis à assurer que notre peuple, comme tous les peuples, a un droit inaliénable à de l’air pur, de l’eau pure et à la préservation de leurs terres sacrées.
Au cours des soixante-dix dernières années, même avant la catastrophe nucléaire de 1979 sur nos terres, en fait depuis les premiers jours où des membres de notre communauté ont commencé à travailler dans les mines d’uranium pour fabriquer les armes atomiques utilisées pour mettre un terme à la Seconde Guerre Mondiale, les gens de la Nation Navajo ont été induits en erreur, trompés et ignorés par le Gouvernement quant aux dangers auxquels ils avaient été exposés et les dégâts à venir pour nos enfants, pour l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons et les terres que nous avons travaillées et chéries depuis de nombreuses générations.
Près de 30000 d’entre nous ont déposé des requêtes auprès du Gouvernement des Etats-Unis, conformément à la loi, pour demander des indemnités et des soins pour leurs cancers et leur souffrance, pour la souffrance de nos enfants et de ceux qui ne sont pas nés à cause du vent, de l’eau et des terres empoisonnés.
Bien que l’exploitation minière ait cessé, les déchets radioactifs toxiques des mines ont été emportés par le vent et sont tombés là où il les a portés. Ces lieus incluent nos maisons, nos cours d’eau, notre nappe aquifère, nos poumons et les corps de nos enfants. Les produits toxiques resteront potentiellement mortels pour les 4,5 milliards d’années à venir et le fléau continuera jusqu’à ce nous, en tant que peuple, nous engagions à y mettre un terme.
Ce fléau nucléaire sur notre Nation est le Chernobyl Américain et ne sera ni ignoré ni marginalisé. Pour le Peuple Navajo, le combat contre le fléau n’est pas une question idéologique, c’est une question de vie ou de mort et c’est un combat que nous ne perdrons pas.
Une fois encore, nos terres sont à vendre pour du pétrole et du gaz de schistes. D’énormes richesses pour les non-autochtones, que des investisseurs avides et des grandes compagnies ne manqueront pas d’exploiter. Dans ce processus, encore une fois, nos Terres Maternelles qui entretiennent la Vie sont asservies.
Le gaz Radon, mortellement radioactif, sera émis, comme il l’était par les mines d’uranium dans les décennies passées. Notre eau sera de nouveau menacée, alors que nous devons encore nettoyer la pollution de l’exploitation précédente.
Cette fois-ci, la menace viendra des traceurs radioactifs utilisés dans la fracturation hydraulique afin que les investisseurs puissent prévoir où l’huile et le gaz de schistes couleront lorsqu’ils injecteront sous haute pression des fluides toxiques sous nos terres sacrées.
Si nous n’agissons pas maintenant, avant que des accords soient signés derrière des portes closes, au cours de discussions d’où les gens de la base sont exclus, un nouveau fléau semant la mort et la souffrance nous sera infligé, tout comme il y a 70 ans, quand le gouvernement ne pensait pas que nous avions le droit de savoir.
Nous, de Forgotten People (Nous, les Gens Oubliés) aujourd’hui et pour toujours, demandons la fin des souffrances inutiles de notre peuple. Les tromperies de nos gouvernements ne peuvent être admises plus longtemps. Nous souffrons en conséquence des politiques et des pratiques commerciales approuvées et agréées par les officiels élus de la Nation Navajo, de l’état d’Arizona et du Gouvernement Fédéral.
Nous appelons les Elus de la Nation Navajo et des Etats-Unis à mettre un terme à toutes les pratiques politiques et commerciales qui nous affectent sans avoir d’abord consulté les gens selon une procédure universelle et transparente.
Aujourd’hui « Forgotten People » a signifié officiellement à nos gouvernements que les gens savent qu’il y a une meilleure solution et sont déterminés à ce que les Diné construisent un futur viable qui apporte la justice sociale, économique et environnementale.
Les Diné ont des droits inaliénables selon les Traités, les Droits de l’Homme, les Droits Civiques et les Droits des Peuples Autochtones, non seulement d’exister mais de vivre dans la prospérité.
Il peut y avoir la Prospérité. Il peut y avoir des lendemains meilleurs pour tous. Mais ces jours ne viendront pas si nous répétons les erreurs d’hier et si nous laissons l’exploitation de nos territoires reprendre sans avoir d’abord nettoyé l’air, l’eau et les Terres Maternelles pollués.
En tant que nation et en tant que monde, nous savons qu’il est possible et nécessaire de nous protéger des vents radioactifs. Nous avons le droit d’être informés et conscients des vents empoisonnés qui peuvent nous entourer.
Les Gouvernements de la Nation Navajo et des Etats-Unis peuvent et doivent installer un réseau Populaire de Détection de la Radioactivité, similaire à celui que les gens ont demandé au Japon il y a tout juste un an suite à la catastrophe nucléaire de Fukushima. Trente jours plus tard il a été répondu à leurs demandes. Ils n’ont pas eu besoin d’attendre soixante-dix ans pour obtenir les informations pouvant sauver la vie. Nous le peuple Navajo, aujourd’hui et dans l’esprit de nos anciens et pour les générations futures qui dépendent de ceux qui vivent aujourd’hui, nous n’attendrons pas un moment de plus.
Les Navajos ne sont pas étrangers au combat. Nos gens ont une longue et glorieuse tradition de service en Première Ligne dans les forces armées des Etats-Unis et nos codeurs (Code Talkers) sont responsables du résultat de la Deuxième Guerre Mondiale. N’oublions pas non plus que nos mineurs ont aidé à construire l’arsenal nucléaire qui a protégé l’Amérique d’attaques pendant la Guerre Froide.
Nous devons nous mobiliser devant ces défis comme des guerriers pour la bataille. Si nécessaire, nous irons à Washington, DC, montés sur nos chevaux. Il est impératif pour notre survie que nous le peuple Diné soyons à nouveau maîtres de notre destiné et imposions nos droits pour décider de la destinée de nos enfants.
Il doit y avoir un Système Populaire de Détection de la Radioactivité sur le territoire de la Nation Navajo et nous n’attendrons pas qu’il soit installé. Nous avons déjà commencé à collecter des fonds pour commencer nous-mêmes.
TOUTES les victimes de la contamination à l’uranium doivent avoir droit à une indemnisation selon la Loi sur l’Exposition au Rayonnement et l’Indemnisation de 1990 et ses amendements.
Le programme d’assainissement de l’Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis doit continuer jusqu’à ce que le travail soit entièrement accompli, et non pas à la date d’expiration.
Le moratoire sur l’ouverture de nouvelles mines doit être maintenu jusqu’à ce que l’assainissement soit entièrement accompli.
Le Peuple doit obtenir le pouvoir d’instaurer des règles et des standards pour toute nouvelle mine sur nos terres.
Qu’il soit établi qu’en tant que peuple Diné, il nous a été accordé, non par le gouvernement mais par notre Créateur, des droits inaliénables à l’air pur, l’eau pure et la préservation des Terres Sacrées.
Que tous ceux qui cherchent à obtenir notre consentement pour avoir accès à ces précieuses ressources et à notre Mère, viennent d’abord nous trouver, nous les Diné, afin que nous puissions demander la bénédiction du Peuple.
Pour terminer, je voudrais dédier cette action à Florabell Paddock , décédée récemment. Au cours de sa vie elle a souffert, puis s’est éteinte en conséquence directe de la contamination par l’uranium près de sa maison à Black Falls.
Ake he,
Don Yellowman, Président de « Forgotten People »