LE MONT TAYLOR RISQUE DE SUBIR DES DEGRADATIONS CULTURELLES ‘PERMANENTES ET GRAVES’

Par Klee Benally @eelk
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23 avril 2013
Traduction Christine Prat

 

LE PROJET DE DECLARATION D’IMPACT SUR L’ENVIRONNEMENT REVELE QUE LE SERVICE DES FORETS A L’INTENTION DE ‘DEVIER’ DES LOIS EXISTANTES

GALLUP, Nouveau-Mexique – Le Service des Forêts Nationales de Cibola (CNFS) a publié un Projet de Déclaration d’Impact sur l’Environnement [Draft Environmental Impact Statement – DEIS] pour un projet de mine sur le Mont Taylor qui enfreint le Plan de Gestion des Forêts existant.

Au lieu de s’en tenir à ses normes actuelles concernant le patrimoine historique et culturel, le CNFS a l’intention d’en ‘dévier’ pour autoriser la profanation du Mont Taylor par un « Amendement, Spécifique au Projet, du Plan de Gestion des Forêts ».

La mine d’uranium est un projet de Roca Honda Resources (RHR) et menace le Mont Taylor, situé près de Grants, au Nouveau-Mexique, qui est considéré comme sacré par de nombreuses Nations Autochtones du Sud-ouest, dont les Diné [Navajo], Hopi, Acoma, Laguna et Zuni.

RHR est un partenariat entre Strathmore Minerals (Canada) et Sumitomo (Japon). Le projet de RHR est d’ouvrir une des plus grandes mines d’uranium des Etats-Unis pour les trente années à venir. Strathmore estime que la production annuelle d’uranium devrait être de plus d’un million de kilos.

Le Projet de Déclaration d’Impact sur l’Environnement indique que l’extraction d’uranium sur le Mont Taylor « … aurait pour effet l’interruption, l’altération et le déplacement d’activités culturelles traditionnelles cruciales pour la continuité des croyances et des pratiques de ces tribus ».

Le Mont Taylor a été classé définitivement Patrimoine Culturel Traditionnel. Lorsque des représentants de Strathmore ont été questionnés sur ce classement, Juan Velasquez, vice-président pour les affaires gouvernementales, environnementales et de réglementation, a déclaré que le classement PCT n’était qu’ « une tentative d’empêcher toute extraction d’uranium ».

« Chacune des alternatives aurait un effet adverse sur ce patrimoine historique car elle occasionnerait un changement des caractéristiques qui lui permette d’être inclus au Registre National des Sites Historiques [NRHP] à un point qui diminuerait son intégrité quant à sa relation à l’ensemble, son état et sa situation. Ces effets… seraient permanents et graves ». Page 352

« Le bien-être spirituel de la montagne, et la relation spirituelle entre les gens et les Etres Spirituels de la montagne seraient affectés par les changements de l’écosystème et on ne sait pas si ces dégâts seraient réparables. L’effet pourrait être permanent ». Page 354

Le Service des Forêts examine trois alternatives dans le Projet de Déclaration, l’ « Alternative 1 » est l’ « Alternative Ne Rien Faire » c’est-à-dire pas de mine d’uranium, l’ « Alternative 2 » est la totalité du projet de RHR et l’ « Alternative 3 » est une version réduite de la mine projetée.

AMENDEMENT SPECIFIQUE AU PROJET DU PLAN DE GESTION DES FORETS

D’après le Projet de Déclaration d’Impact sur l’Environnement, « … le Service des Forêts approuverait un amendement spécifique au projet du plan de gestion des forêts, pour permettre au projet de Roca Honda de dévier des normes du plan de gestion concernant le patrimoine historique… L’amendement permettrait des atteintes au patrimoine historique résultant de ce projet, en accord avec la loi applicable normalement… »

Les normes actuelles du plan de gestion du Service des Forêts indiquent que le patrimoine historique « sera géré durant la réalisation d’activités de manière à arriver à une conclusion de ‘non effet’ [sic] après consultation de l’Office d’Etat de Préservation Historique [SHPO – State Historic Preservation Office] et du Conseil Consultatif de Préservation Historique » (Réglementation du Service des Forêts – USFS, 1985:63) . Le Projet de Déclaration d’Impact sur l’Environnement indique que « La Norme n. 5 concerne les cas de conflits dans la gestion des ressources. Elle comprend une liste de conditions dans lesquelles ‘la préservation des ressources culturelles en place doit être l’option préférentielle’ ».

Le Projet de Déclaration révèle que ces conditions s’appliquent entre autres:

« Lorsque la valeur culturelle vient essentiellement de qualités autres qu’un potentiel pour la recherche et que cette valeur ne peut exister pleinement que si les vestiges culturels sont laissés intacts dans leur contexte d’origine (par exemple, associés à des personnages ou évènements historiques importants, à des valeurs religieuses ou ethniques spéciales ou des valeurs interprétatives uniques). (USFS, 1985:63) (Dans le Projet de Déclaration, pages 354-355).

‘ACCORD PROGRAMMATIQUE’

Le Service des Forêts de Cibola n’indique aucune mesure claire pour atténuer les effets culturels négatifs, mais au lieu de cela propose un « accord programmatique » visant à établir une relation de travail continue avec les Nations Autochtones touchées.

« Conformément à la Section 106 de la Loi Nationale sur la Préservation Historique, le Service des Forêts développerait un accord programmatique après consultation du Conseil Consultatif sur la Préservation Historique et des parties ayant un rôle consultatif. Cet accord programmatique définirait des mesures à prendre pour éviter, minimiser et atténuer les effets négatifs causés au patrimoine historique et prendre en considération les effets sur d’autres ressources et pratiques culturelles. Bien que ces effets négatifs soient toujours là, les mesures d’atténuation les résoudraient selon 36 CFR Paragraphe 800. Cependant, l’impact sur les ressources culturelles en générale et les pratiques culturelles traditionnelles resterait important ».

Les seules mesures d’atténuation mentionnées dans le Projet de Déclaration sont citées comme « exemples à prendre en considération… » Le Projet de Déclaration cite ces exemples :

. Effectuer des excavations de récupération de données sur les sites archéologiques ;

. Effectuer des recherches sur divers sujets concernant les questions de ressources culturelles pertinentes ;

. Mettre en place des pratiques spécifiques durant les activités de construction et d’exploitation pour contrôler l’érosion et les changements dans les schémas d’érosion ;

. Formation des personnels de RHR impliqués dans la construction, l’exploitation et la restauration du site, et des personnels des sous-traitants, à reconnaître la découverte de ressources archéologiques ou de restes humains, à reconnaître quand des dommages accidentels ont été causés, à arrêter les activités susceptibles de perturber le sol, et à prévenir le personnel qualifié ; et

. Inculquer au personnel de RHR et des sous-traitants l’importance des ressources culturelles, leur apprendre les lois et réglementations protégeant les ressources culturelles, la nécessité de rester dans des zones de travail définies et les implications légales du vandalisme et du pillage.

‘ASSECHEMENT’

Page 354, le Projet de Déclaration révèle que « …l’exploitation de la mine et l’assèchement qui y est associé entraîneraient la baisse du niveau des nappes aquifères, le transfère de l’eau d’un bassin à un autre et la contamination de l’eau. Ces changements sont considérés comme conduisant à des conséquences négatives sur l’approvisionnement en eau dont les tribus dépendent pour leurs usages religieux et de subsistance ».

Le Projet de Déclaration poursuit :

« Pendant la construction de la Mine Roca Honda, les puits traverseraient deux nappes aquifères qui contiennent assez d’eau pour qu’un assèchement partiel soit nécessaire : les couches calcaires Gallup et Dakota. Au cours des opérations d’extraction, il faudrait assécher l’unité exploitée, la Branche Westwater Canyon de la Formation Morrison. Sur la durée de vie de la mine, on estime que 1,5 millions de m³ seraient pompés de la nappe aquifère Gallup, 286000 m³ de la nappe Dakota et 97 millions de m³ de la nappe Westwater ». Page 353

« Les pratiques culturelles traditionnelles seraient affectées par la perturbation physique de toutes les ressources culturelles et naturelles dans le secteur pendant la construction, l’exploitation et la restauration. Les pratiques en question seraient également affectées par l’extraction du minerai, l’assèchement et les activités de surface. Ces effets seraient importants et les deux alternatives entraîneraient des conséquences négatives pour le patrimoine historique ». Page 358

QUELQUES ELEMENTS DE LA PROPOSITION DE ROCA HONDA RESOURCES (RHR)

. RHR propose un permis d’extraction pour une surface de 8 km², comprenant 0,2 km² de routes de transport, un couloir de service et un pipeline pour évacuer les eaux d’assèchement.

. Ils estiment que le site serait perturbé sur une largeur de 6 m et une distance de près de 9 km pour l’installation du pipeline, Page 34 du Projet de Déclaration.

. RHR voudrait extraire du minerai situé à environs 500-800 mètres de profondeur.

. RHR voudrait exploiter la mine pendant une période d’environs 18-19 ans.

Le Projet de Déclaration indique que « cependant, la durée d’activité de la Mine Roca Honda dépendrait du marché de l’uranium et de la découverte potentielle de plus de minerai. Donc, la période d’exploitation pourrait très bien dépasser les 18-19 ans ».

Le Projet de Déclaration répond prématurément à d’éventuels litiges en citant le précédent de l’affaire des San Francisco Peaks :

« La Loi sur la Restauration de la Liberté Religieuse est souvent citée comme protection des sites religieux et sacrés. La loi, adoptée en 1993, stipule que le gouvernement ne peut pas créer d’obstacles significatifs à la pratique religieuse d’une personne, même si les obstacles sont le résultat d’une règle généralement applicable… La loi limite la capacité du gouvernement Fédéral à imposer des obstacles significatifs à la libre pratique de la religion. Pour imposer des obstacles significatifs à la libre pratique de la religion, il doit y avoir une pression coercitive du gouvernement à agir contrairement aux croyances religieuses sous la menace de sanction civile ou criminelle, ou une condition pour recevoir des prestations du gouvernement fondée sur une conduite qui violerait les croyances religieuses (Navajo Nation v. USFS, 535 F.3d 1058, 9th Circuit 2008). Des telles conditions n’existent pas dans ce projet ».

D’après le Service des Forêts de Cibola, la Déclaration Finale d’Impact sur l’Environnement devrait être publiée fin 2013.

 

Le texte intégral du Projet de Déclaration d’Impact sur l’Environnement (DEIS) est sur :
www.fs.fed.us/nepa/nepa_project_exp.php?project=18431

Plus d’infos (en anglais) : www.masecoalition.org

Traduction française de l’article précédent sur le projet de mine

 

Vidéo de Klee enchaîné, filmé par M.T. Garcia, sous-titres Ch. Prat

 

KLEE BENALLY S’ENCHAINE A UNE EXCAVATRICE

Par Brenda Norrell, Censored News

Traduction Christine Prat

Original article in English : Censored News photos-klee-benally-chained

Dimanche 14 août 2011

FLAGSTAFF, Arizona – Le Navajo Klee Benally s’est enchaîné à une excavatrice sur la Route de Snowbowl samedi 13 août, après qu’une machine ait interrompu une assemblée de prières sur les Pics San Francisco. Rudy Preston, agent de liaison avec la police de Protect the Peaks, et Mary Sojourner, écrivain, ont été arrêtés. Ils ont tous deux été libéré sous caution de la prison du comté de Coconino, d’après un message envoyé à Censored News à 1h30 du matin, dans la nuit de samedi à dimanche.

Enchaîné à une excavatrice, Klee déclara « C’est ici que nous traçons une ligne rouge, c’est ici que nons disons çà suffit ! »

« Vous êtes des criminels. Vous autorisez la profanation de ce qui nous est sacré. Vous menacez notre survie culturelle. »

« Quelle part de la notion de sacré ne comprenez-vous pas ? » poursuivit Benally. Ses mots furent répétés par des supporters rassemblés sur le site lorsque la police arriva et qu’un agent du Service des Forêts surgit des bois d’où il les avait filmés.

Benally, toujours enchaîné à l’excavatrice, ajouta « Ceci n’est pas un jeu. Ce n’est pas du spectacle. Ce n’est pas pour les média. C’est pour empêcher cette profanation de continuer. »

Ces mots furent répétés en écho par les autres Amérindiens rassemblés pour bloquer la destruction.

L’écrivain de Flagstaff Mary Sojourner et l’agent de liaison avec la police de Protect the Peaks Rudy Preston furent arrêtés sur place. Preston a été inculpé de deux chefs de trouble à l’ordre publique et d’intrusion illicite. Sojourner a été inculpée tard dans la soirée de dimanche. Klee Benally a été cité à comparaître pour trouble à l’ordre publique puis relâché.

Klee Benally a une réputation internationale comme chanteur du groupe de frères et sœur Navajo Blackfire et comme organisateur d’efforts de défense des San Francisco Peaks contre la destruction.

Mary Sojourner est auteur de deux romans, Sisters of the Dream et Going Through Ghosts ; d’un recueil de nouvelles, Delicate ; d’un recueil d’essais, Bonelight : ruin and grace in the New Southwest ; de mémoirs, Solace : rituals of loss and desire et She Bets Her Life.

Avant l’action de ce dimanche, 17 personnes avaient été arrêtées au cours des huit derniers jours, alors que des Navajos, des Hualapais, des Hopis, des O’odham et d’autres Amérindiens protestaient contre la destruction des montagnes sacrées.

Il est demandé aux touristes de boycotter la station Arizona Snowbowl, propriété d’Eric Borowsky de Scottdale (Arizona).

Pendant la semaine d’action, Protect the Peaks a manifesté devant le siège du Service des Forêts, l’Hôtel de Ville de Flagstaff, et le siège de High Desert Investment Company. High Desert Investment Company, responsable de l’abattage massif d’arbres sur les Pics San Francisco, est la propriété de G. Allen Ribelin, qui possède aussi High Investment Logging à Flagstaff.

La station Arizona Snowbowl a l’intention de fabriquer de la neige pour les touristes à partir d’eaux usées recyclées. Treize Nations Amérindiennes considèrent les montagnes comme sacrées. Les « medicine men » y cueillent des plantes médicinales et y organisent des cérémonies.

L’abattage d’arbres plusieurs fois centenaires a déjà commencé, pour faire passer le pipeline (qui doit amener les eaux usées) et autres projets de l’industrie du tourisme.

Les jeunes Amérindiens sont prêts à se faire arrêter pour mettre un terme à la destruction.

 

Plus d’infos en Anglais :
www.indigenousaction.org
www.truesnow.org

Plus de photos sur Censored News

 

BLACKFIRE dans la lutte : alors que le chanteur et guitariste Klee s’enchaînait sur le site des travaux, Jeneda et Clayson transmettaient le message au festival où le groupe devait se produire. Voir la vidéo sur youtube :

http://www.youtube.com/watch?v=yOnsbc97kk8

 

Lettres et courriels de soutien ou de protestation
Voir Page SAVE THE PEAKS / SAUVEZ LES PICS