Photo Shannonlynn Chester

Par Shannonlynn Chester, Diné
Publié sur Censored News
8 mai 2025
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan

Il y a actuellement un camion transportant de l’uranium, couvert d’une simple toile cirée, derrière le Mary’s Cafe à Flagstaff, Arizona, sur l’autoroute 89.

Le chauffeur avait besoin d’une ambulance. Quand je suis arrivée, on m’a dit qu’il était garé là depuis déjà quelques heures. Il est maintenant 11h07 et le camion y est toujours. C’est une situation qui fait peur. Ça cause de nouvelles menaces pour la communauté, à différents égards. J’ai vu des centaines d’individus passer en voiture depuis que je suis là. À moins que quelqu’un sache à quoi ressemblent ces camions qui transportent des matériaux radioactifs, tous, aux alentours, ont couru un risque sans le savoir.

Le chauffeur a reçu des soins médicaux d’urgence, puis est retourné en titubant à son camion et a été aidé à y remonter. Même de loin, il ne semblait pas aller bien! C’est très préoccupant, car il continuera probablement à rouler vers le nord à travers de nombreuses communautés, jusqu’à l’Usine de White Mesa, en Utah.

JE VOUS PRIE d’être vigilant et de rouler sur l’autoroute 89 très prudemment, à partir de Flagstaff sur le trajet de transport.

MISE À JOUR de Censored News

Aujourd’hui, la Nation Navajo, les forces de l’ordre et les médias dominants ont minimisé les risques pour les Navajos et tous ceux qui se trouvent sur le trajet. Ceci arrive après que le Président Navajo Buu Nygren ait passé un accord secret avec Energy Fuels pour que les camions de transport d’uranium passent à travers la Nation Navajo.

Nygren a publié une déclaration à propos du chauffeur malade. Nygren dit que l’Agence de Protection de l’Environnement de la Nation Navajo s’était coordonnée avec le bureau du Sheriff de Coconino et les Pompiers de Flagstaff. Les pompiers ont mesuré les doses de radiation sur le camion et dit que les niveaux de radiations sur place étaient dans des limites non dangereuses.

Trois autres camions de minerai d’uranium, sur le site de l’inspection, ont été autorisés à passer et continuer jusqu’à l’Usine de White Mesa, dit Nygren.

Energy Fuels a fait savoir à l’Agence de Protection de L’Environnement de la Nation Navajo à 11h40, que le quatrième camion – dont le chauffeur était malade – était retourné à la mine, dit Nygren.

 Le Sheriff du Comté de Coconino, Bret Axlund, dit que le chauffeur du camion avait des « symptômes ressemblant à la grippe » et refusa un transport médical. Une ambulance fut appelée sur les lieux, juste au nord de Flagstaff, dans la zone où l’autoroute 89 croise la route Townsend Winona.

Auparavant, le Conseil de la Nation Navajo avait dit que le Président Nygren avait conclu un accord secret avec Energy Fuels, sans que le Conseil en ait eu connaissance ou ne l’ait approuvé, pour autoriser les camions de minerai d’uranium à traverser la Nation Navajo de la mine du Grand Canyon jusqu’en Utah.

Plus de 500 mines d’uranium et de déchets radioactifs éparpillés, que les États-Unis n’ont jamais nettoyé après la Guerre froide, sont toujours dans la Nation Navajo et causent de nombreux cancers aux Diné.

 

Sur les problèmes causés par l’usine de traitement de White Mesa, voir l’interview de Yolanda Badback, Ute.

 


Des canons à eau vaporisent dans l’air l’eau du puits de Canyon Mine. Photo Alicyn Gitlin

 

La Compagnie minière Energy Fuels enfreint le Plan d’Opération pour éliminer l’excès d’eau ; le forage continue, bien que les permis environnementaux aient expirés

 

POUR PUBLICATION, 20 mars 2017
Sur le site de Haul No!
Contact :
Alicyn Gitlin, Sierra Club Grand Canyon Chapter, alicyn.gitlin@sierraclub.org
Leona Morgan, Haul No!, stopcanyonmine@gmail.com
Traduction Christine Prat

 

TUSAYAN, Arizona – La mine très controversée Canyon Mine, située à environs dix kilomètre de la Rive Sud du Grand Canyon, se remplit d’un excès d’eau, après un hiver très pluvieux. Pour se débarrasser de l’eau au fond du puits de mine, le propriétaire, Energy Fuels Resources (USA), fait transporter l’eau radioactive à l’usine de retraitement d’uranium de White Mesa, près de Blanding, dans l’Utah et la vaporise dans l’air et sur la toute proche Forêt Nationale de Kaibab, pour essayer de la faire évaporer. Le Plan d’Opérations exige que tout excès d’eau soit maintenu dans des bassins et traité sur place.

En même temps, Energy Fuels a laissé expirer les permis environnementaux visant à protéger l’eau du sous-sol.

Les communautés de la Nation Navajo habitant le long du trajet allant de Canyon Mine à l’usine de White Mesa n’ont pas été prévenues officiellement de la nature des matériaux dangereux devant être transportés. Le trajet couvre environs 500 km, dont approximativement 290 km à travers la Nation Navajo et la communauté Ute de Ute Mountain, au sud de l’usine. La Nation Navajo a une loi qui limite le transport de matériaux radioactifs, y compris le minerai d’uranium, « sur, sous ou à travers le Pays Indien de la Nation Navajo »[1] ; cependant, les Navajo n’ont pas juridiction sur les routes d’état [Arizona et Utah] du trajet. Sur les camions, il est juste indiqué « eau non-potable » et au moins un des camions observé avait un panneau trompeur indiquant comme contenu « produits pétroliers ».

Les peuples Autochtones ne sont pas seulement inquiets à cause du transport, mais aussi pour Red Butte, classée comme Propriété Culturelle Traditionnelle et site sacré, à proximité de la mine, ainsi que pour les risques posés aux précieuses ressources en eau, la possibilité d’accidents, l’absence de plans d’urgence, et les effets sur la santé humaine, les plantes et la vie sauvage.

« En tant que Nation Navajo, nous avons été confrontés à l’uranium depuis la guerre froide et nous sommes toujours confrontés au problème des mines abandonnées par des gens irresponsables… la dernière chose dont nous avons besoin, c’est d’une autre mine opérant des transports à travers nos communautés… Pas de Transport! [No Haul! » dit Milton Tso, Président du Chapitre de Cameron.

Le Service des Forêts des Etats-Unis n’a pas exigé qu’Energy Fuels mette à jour le Plan d’Opérations de 1986 afin de refléter toute nouvelle information ou technologie, quand ils ont recommencé à forer après près de 30 ans de ‘standby’, au cours desquels la mine était non-opérationnelle. Maintenant, avant même que du minerai d’uranium n’ait été sorti de la mine, il semble qu’ils ne se conforment déjà plus à leur Plan.

De plus, Energy Fuels a laissé ses permis pour le stockage sur place de matériau retiré du puits de mine expirer en août 2016.[2] Le Service de la Qualité de l’Environnement d’Arizona n’a reçu aucun document de la compagnie pour le renouvellement des permis.

« C’est inacceptable et ne fait que confirmer nos inquiétudes à propos de cette mine. L’industrie minière a dit que l’extraction est plus propre et plus sûre que par le passé, mais maintenant le puits a été inondé et ils ont dû recourir à de l’improvisation avant d’avoir même commencé à extraire du minerai. Nous ne devons pas faire confiance à cette mine ni à cette compagnie minière, si près d’une des Merveilles du Monde naturelles. Ils mettent en danger les eaux du Grand Canyon » dit Alicyn Gitlin, du Sierra Club.

Energy Fuels a foré le puits jusqu’à environs 450 m et a intercepté du minerai d’uranium de haute teneur, bien que l’extraction n’ait pas encore commencé.[3] L’eau du bassin de la mine, transportée en camion et vaporisée dans l’air, contient trois fois la limite de sécurité d’uranium dissous dans l’eau potable.[4] Mais on ne sait quelle quantité d’eau est partie du site de la mine. Compte tenu de l’hydrologie complexe du Grand Canyon, on ne sait pas si l’eau contaminée s’infiltre du puits de mine non achevé dans les eaux souterraines de la région, qui alimentent des ruissellements et des sources du Grand Canyon.

Vaporisation d’eau dans la Forêt de Kaibab. Photo Klee Benally

« C’est encore un bon exemple de racisme environnemental, que d’autoriser le transport de liquides radioactifs dans des camions non-signalés à travers des communautés et sans avertir le public ni les nations autochtones environnantes. Nous avons le droit de savoir, au grand minimum, afin que des mesures adéquates et des plans d’urgence soient mis en place en cas de fuite ou d’accident » dit Leona Morgan, de Haul No!, une initiative conduite par des autochtones inquiets du transport d’uranium.

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Contexte

En 2012, le gouvernement Obama a publié un « retrait minier » interdisant toute nouvelle concession minière ainsi que le développement de concessions n’ayant pas de droits en cours de validité sur plus de 4000 km² de terres publiques autour de Parc National du Grand Canyon. En dépit des protestations du public et des poursuites en justice de tribus Indiennes locales et de groupes écologistes, les agences fédérales ont autorisé trois mines d’uranium à enfreindre le « retrait » et à reprendre leurs opérations.

Une de ces mines, Canyon Mine, a été approuvée en 1986, mais les propriétaires ont cessé l’exploitation en 1992, quand le prix de l’uranium a chuté. En 2010, Red Butte, près de la Canyon Mine, a été classée Propriété Culturelle Traditionnelle. En 2012, la Forêt Nationale de Kaibab a décidé que Canyon Mine pouvait reprendre l’exploitation sans mettre à jour la Déclaration d’Impact Environnemental ni le Plan d’Opérations. La Tribu Havasupai combat la décision du Service des Forêts à la Cour d’Appel du 9ème Circuit pour obliger le Service des Forêts à prendre en considération les nouvelles informations et technologies, et pour exiger la consultation de la tribu selon la Loi de Préservation Historique Nationale.

Dans une lettre datée du 17 mars 2008, concernant la « Notification de la Décision de l’ADEQ [Service de la Qualité de l’Environnement d’Arizona] de Refuser un Permis Général de Protection des Nappes Aquifères de Type 3.04 au Site Canyon Mine de Denison Mines (USA), » l’ADEQ écrivait « … il a été déterminé que votre site n’était pas conforme aux exigences quant au plan, à la construction et à l’installation, pour l’obtention d’un Permis Général de Type 3.04, selon les articles A.A.C. R18-9-D304(A) et A.A.C. R18-9-D304(C). » Dans un article de l’Arizona Daily Sun, le Directeur de l’ADEQ, Steve Owens, dit « C’est à eux de nous prouver qu’il n’y aura pas d’impact sur les eaux souterraines. »[5] Pourtant, en une volte-face complète, en 2009 un Permis Général de Protection des Nappes Aquifères a été accordé pour Canyon Mine.

Lorsqu’ Energy Fuels Resources (USA) a acheté Canyon Mine, elle a fait transférer à son nom le Permis Général de Protection des Nappes Aquifères de Type 3.04 pour le stockage d’eau non pluviale, et deux Permis de Type 2.02, qui permettent le stockage intermédiaire de minerai. Le permis de Type 3.04 expire le 31 août 2019, et les permis de Type 2.02 expiraient le 30 août 2016.[6] L’ADEQ n’a aucun nouveau document à examiner ou enregistré pour renouveler les permis Type 2.02, cependant Canyon Mine continue de construire son puits de mine et d’empiler les déchets sur place.

En 2010 des échantillons d’eau prélevés par les Etudes Géologiques des Etats-Unis [USGS] ont montré que quinze sources et cinq puits contenaient des concentrations d’uranium dissous excédent les standards de l’Agence de Protection de l’Environnement pour l’eau potable. Le rapport de l’USGS concluait que ces sites contaminés « étaient liés aux opérations minières. » En 2013, le Service des Parcs Nationaux dit que « les puits d’eaux souterraines régionales près des mines Canyon, Pinenut et Hermit ainsi que les puisards à la base des mines Pigeon et Hermit avaient révélé des concentrations d’uranium dissous excédant les standards pour l’eau potable (30 microgrammes par litre), les concentration au puisard d’Hermit Mine excédant 36000 microgrammes par litre. »

D’après le Plan d’Opérations pour Canyon Mine de 1984, « tout drainage de surface de la cour devra aller dans le ou les bassins de rétention. De plus, si un excès d’eau est découvert au cours de l’extraction, il sera stocké et traité dans ce secteur avant d’être évacué… Toute eau rencontrée au cours de l’extraction qui ne peut pas être utilisée en lien avec l’extraction, devra être évacuée dans ces bassins de rétention et y être retenue jusqu’à évaporation ou traitée jusqu’à ce qu’elle soit conforme aux standards d’évacuation applicable selon le permis NPDES [Système National d’Elimination de Polluants Evacués][7]. »

La Déclaration Finale d’Impact Environnemental pour Canyon Mine exige que « le(s) bassin(s) de rétention dans la cour de la mine doivent pouvoir recevoir les eaux tombées localement au cours de l’orage du siècle, plus les précipitations annuelles normales, et l’eau qui pourrait être pompée de la mine. Le volume d’eau dans le(s) bassin(s) doit être maintenu à un niveau qui permette une capacité en réserve pour recevoir l’eau résultant d’évènements imprévisibles et ceux normalement attendus. »[8] Le bassin de rétention n’était clairement pas suffisant pour recueillir l’eau pompée de la mine cette année.

 

[1] http://www.navajonationcouncil.org/Navajo%20Nation%20Codes/Title%2018/CF-18-12.PDF

[2] Numéros et dates des permis: Arizona Department of Environmental Quality Transfer Notice of Recording for a Type 2.02 General Aquifer Protection Permit. LTF # 56663. Dated August 21, 2012; Arizona Department of Environmental Quality Transfer Notice of Recording for a Type 2.02 General Aquifer Protection Permit. LTF # 56664. Dated August 21, 2012.

[3] Energy Fuels, 1016. Encore du minerai d’uranium de haute teneur trouvé à la mine d’Energy Fuels, Canyon Mine, ce qui fait progresser l’expansion de la zone du minerai. Original en Anglais : http://www.energyfuels.com/news-pr/high-grade-uranium-intercepts-energy-fuels-canyon-mine-continue-expand-mineralized-zone/

[4] Mine d’uranium doit faire face à un excès d’eau, article de l’Arizona Daily Sun, en anglais sur : http://azdailysun.com/news/local/uranium-mine-deals-with-excess-water/article_1f35d10b-3802-5083-a5bd-1c3f255363fc.html

[5] Permis miniers refusés, Arizona Daily Sun, 14 mai 2008.

[6] Spécification des permis et dates d’attribution: Arizona Department of Environmental Quality Discharge Authorization Type 3.04 General Aquifer Protection Permit. LTF # 60849. Issued to Energy Fuels Resources (USA) Inc. based on Renewal Form dated 7/16/2014; Arizona Department of Environmental Quality Transfer Notice of Recording for a Type 2.02 General Aquifer Protection Permit. LTF # 56663. Dated August 21, 2012; Arizona Department of Environmental Quality Transfer Notice of Recording for a Type 2.02 General Aquifer Protection Permit. LTF # 56664. Dated August 21, 2012.

[7] Energy Fuels Nuclear, Inc. 1984. Plan d’Opérations, Déclaration d’Intentions, Canyon Mine, 1984, pp 14, 19. En anglais sur : https://www.fs.usda.gov/Internet/FSE_DOCUMENTS/fseprd475369.pdf

[8] USDA [Ministère de l’Agriculture US], 1986, Déclaration Finale d’Impact Environnemental pour Canyon Mine, p. 2.33. En anglais sur : https://www.fs.usda.gov/Internet/FSE_DOCUMENTS/stelprdb5346657.pdf