Four Corners Power Plant – Photo Christine Prat
ROBYN JACKSON, NAVAJO : ‘UNE MINE DE CHARBON PRODUIT DU POISON, PAS DE LA SOUVERAINETE
Par Robyn Jackson
Publié par Censored News
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Traduction Christine Prat
Jeudi 17 janvier 2013
Si nous considérons la proposition de transfère de propriété de la Mine Navajo de BHP, nous devrions commencer par nous demander pourquoi BHP offre de vendre en ce moment. Si nous examinions la question en profondeur, nous verrions que les mines de charbons dans tout le pays sont en train d’être démantelées progressivement. En 2012, Alpha Natural Resources a fermé 8 mines. En fait, le charbon est en déclin. La Californie et d’autres états et municipalités travaillent à la transition vers des sources d’énergie renouvelables.
En prenant tout cela en considération, on pourrait penser que les dirigeants de BHP sont en train de se débarrasser d’une mine qui n’est plus rentable et implique d’innombrables aspects négatifs flagrants qui conduiront sans aucun doute à des milliard de dollars de réparations et de remises en état. Par exemple, il y a le problème des cendres de charbon. Après que les centrales aient brûlé du charbon, elles se retrouvent avec de la cendre dont on se débarrasse souvent dans des sites d’enfouissement ou en les mélangeant avec de l’eau conservée dans des bassins de rétention. Certains diront « ce n’est que de la cendre, ce n’est pas dangereux ». La vérité est que la cendre de charbon contient souvent dix-sept toxines, si ce n’est plus, parmi lesquelles des métaux lourds et des éléments radioactifs comme le radon, le thorium et l’uranium. Un rapport des Médecins pour la Responsabilité Sociale a montré que l’ingestion de ces produits, que ce soit en les avalant, les buvant ou les respirant, peut provoquer des cancers et affecter le système nerveux, provoquant des déficiences cognitives, des retards de développement et des troubles comportementaux. Des informations de l’Agence pour la Protection de l’Environnement des Etats-Unis (EPA) révèlent aussi que le fait d’habiter à proximité d’un dépôt de cendre de charbon peut accroître le risque de cancers et d’autres maladies.
Navajo Mine, la Mine Navajo, près de la centrale Four Corners – photo Christine Prat
Alors que fait la centrale de Four Corners (FCPP – Four Corners Power Plant) avec les cendres de charbon ? Nous savons que de 1971 à 2008, la cendre était déversée dans des puits de mine non isolés et juste recouverte d’une couche de terre à la Mine Navajo. Oui, pendant près de 40 ans BHP a accepté des déchets toxiques comme remblai. En 2008, BHP a cessé d’accepter la cendre de charbon et la centrale de Four Corners a maintenant des bassins de rétention à l’ouest du site pour entreposer les cendres. Vu la hauteur et la largeur de ces bassins, le terme ‘bassin’ semble inadéquat. En 2009, l’une de ces constructions mesurait près de 52m de haut. C’est la hauteur d’un immeuble de 17 étages et ce n’est qu’une partie du site de rétention pour la cendre humide. Une activité qui a brulé du charbon pendant 50 ans doit produire une grande quantité de déchets. En fait, la centrale de Four Corners a engendré 100 millions de tonnes de cendre et la plus grande partie se trouve sur le site de la Mine Navajo.
Comme il a été dit plus haut, la cendre de charbon déchargée à la Mine Navajo n’est pas isolée. Cela fait que les toxines contenues dans la cendre sont beaucoup plus susceptibles de fuir dans les voies d’eau, rivières, nappes aquifères et puits d’eau potable situés au-dessus et en dessous. De plus, ces produits toxiques peuvent se répandre dans l’environnement par érosion et écoulement et sous forme de fines particules et de poussière. Il y a des exemples de communautés affectées par la cendre de charbon et la contamination de leurs réserves d’eau. Des décharges de cendre de charbon ont été mises en quarantaine à cause des dangers pour la population dus au fort taux de produits toxiques. Le cas le plus connu de catastrophe due à la cendre de charbon s’est produit en 2008 lorsque de la cendre de la Tennessee Valley Authority à Kingston, Tennessee, s’est déversée accidentellement. Un bassin de rétention de cendre a lâché, et le contenu s’est déversé dans une vallée où il y avait des habitations. Maintenant la région a deux rivières polluées et des maisons que les habitants ont été forcés de vendre à la Tennessee Valley Authority, propriétaire de la centrale. En 2011, la TVA a estimé le coût total du nettoyage à 1,2 milliard de dollars. Il faut noter que la TVA peut largement payer grâce à une augmentation de la facture d’électricité de ses clients. Bel exemple du sens de la responsabilité de ces compagnies.
Et puis, comme l’a dit le Président de BHP Nouveau-Mexique, Pat Risner, dans une lettre de décembre 2012 au Durango Herald, « Il y a des points de vue divergents sur ce qu’implique la responsabilité des entreprises. » Ce que BHP considère précisément comment étant de sa responsabilité demande à être clarifié. Actuellement, BHP n’a pas de plan de réparation ou de compensation pour les déchets de la combustion de charbon. Ce qui signifie : qui, précisément, doit payer le nettoyage ? Que se passerait-il si le puits non isolé sur le site de la Mine Navajo fuyait ? La direction de BHP pense-t-elle que la Nation Navajo devrait se charger elle-même du nettoyage ? Après que les Navajos aient fourni de l’électricité bon marché à d’autres et permis à BHP de faire d’énormes bénéfices, est-ce vraiment tout ce qu’ils ont à nous dire ? Réfléchissez-y. En 2011 ils ont fait 15 milliards de bénéfice sur un chiffre d’affaire total de 70 milliards. Après tout, c’est la plus grande compagnie minière du monde.
Le gouvernement Navajo n’a pas les moyens de prendre à sa charge des coûts qui s’élèvent à plus d’un milliard de dollars. Un rapport de 2010 a montré que le taux de bore et de sélénium en aval des bassins de cendre de charbon de la centrale de Four Corners était plus élevé qu’en amont. Les taux relevés en aval sont deux fois plus élevés que ce qui est considéré comme étant sans danger pour la vie aquatique. Il est aussi prouvé que la cendre de charbon a saturé le sol de la zone I de la Mine Navajo, parallèle à la rivière San Juan. Une autre étude a montré que des éléments constitutifs de la cendre de charbon, entre autres du sélénium, s’infiltrent dans l’écosystème de la rivière San Juan. Les preuves sont indéniables et effrayantes.
Bien entendu, tout ce que veut BHP, c’est laisser ce gâchis derrière elle. Avons-nous oublié que BHP est une affaire, avec pour seul but le profit ? Mais pour nos communautés et notre nation, c’est beaucoup plus qu’une simple zone d’où tirer de l’argent. Nous avons une relation profonde et une longue histoire nous reliant à cet endroit. C’est chez nous. C’est notre terre, notre air et notre eau.
Comme l’expliquent nos histoires, nous avons été mis là par les Gens Sacrés. Il nous a été dit que ce serait notre foyer et que nous devrions en prendre soin. La plupart des gens savent que nous avons des montagnes sacrées qui indiquent les limites de notre territoire, mais les rivières principales qui l’entoure sont aussi sacrées et servent de limites : ainsi la rivière San Juan, qui représente l’eau mâle dont il est dit qu’elle protège notre peuple et en prend soin. Dans la vision Navajo traditionnelle, les rivières servent de sources d’énergie auxquelles nos cérémonies, nos prières et nos chants sont liés. Sont également mêlés à ces cérémonies, prières et chants les nombreuses plantes et animaux qui constituent le paysage du sud-ouest et l’univers des Navajo. On nous a enseigné que le bien-être de toutes ces créatures et des écosystèmes qui les font vivre, tout comme notre Mère (la terre) et notre Père (le ciel), est lié à notre prospérité générale et à notre santé spirituelle, en tant que Diné [Navajo].
Précisément comment pourraient 50 ans de pollution de l’eau, de l’air et de la terre s’inscrire dans notre vision traditionnelle ? Est-ce vraiment justifiable que l’extraction et la combustion de charbon aient saccagé tant de vies ? J’aimerais savoir comment cela se traduit en terme de souveraineté tribale, comme le gouvernement Shelly l’a déclaré dans un article du Farmington Daily Times le mois dernier. Quel est précisément le plan à long terme du gouvernement Shelly et des délégués du conseil ? Des centrales ferment dans tout le pays. Celle de Four Corners est une des plus vieilles. Les ingénieurs vous diront qu’ils doivent sans arrêt relancer la machine qui n’arrête pas de s’effondrer. Si le gouvernement tribal pense vraiment pouvoir vendre du charbon de la Mine Navajo aux gestionnaires de la centrale de Four Corners, c’est indubitablement un agenda très limité. APS a annoncé récemment qu’ils allaient fermer trois unités, ce qui implique une réduction immédiate de la demande de charbon pour ce site. De plus, est-ce vraiment tout ce que notre gouvernement tribal est capable de proposer ? Pourquoi nous enfermer dans une voie qui a si mal servi l’ensemble de notre peuple ? Il y a d’autres alternatives, comme le solaire et l’éolien. Il y a un potentiel, comme l’a décrit un rapport de 2008 intitulé ‘Energie et Alternatives Economiques pour Desert Rock. N’est-ce pas un devoir envers nous-mêmes que de suivre une voie beaucoup plus en accord avec nos croyances traditionnelles de durabilité, respect et réciprocité ? Ou allons nous continuer à nous enfoncer dans la voie de l’augmentation de la pollution et de l’injustice sociale et environnementale ?