Par Brenda Norrell
Censored News
28 novembre 2021
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan
LES PÈLERINS SONT VENUS ET ONT IMMÉDIATEMENT COMMENCÉ À TUER LES WAMPANOAG – KISHA JAMES
PLYMOUTH, Massachussetts – Des Autochtones se sont rassemblés à Plymouth, pour commémorer un Jour National de Deuil, le jour de Thanksgiving pour les Etats-Unis. Le Jour de Thanksgiving rappelle le génocide de millions d’Autochtones, le vol de leurs terres et l’effacement de leurs cultures.
Les participants au Jour National de Deuil rendent hommage aux Ancêtres et à la résilience Autochtones. C’est un jour de souvenir et de connexion spirituelle, autant qu’une protestation contre le racisme et l’oppression que les Peuples Autochtones continuent de subir dans le monde entier.
« Nous, Autochtones, n’avons aucune raison de célébrer l’arrivée des Pèlerins », dit Kisha James, membre des tribus Aquinnah Wampanoag et Oglala Lakota, et petite-fille de Wamsutta Frank James, le fondateur de la commémoration.
« Nous voulons éduquer les gens afin qu’ils comprennent que les histoires que nous avons apprises à l’école sur le premier Thanksgiving, ne sont que des mensonges. Les Wampanoag et autres Autochtones n’ont certainement pas vécu heureux pour toujours, depuis l’arrivée des Pèlerins », dit Kisha James.
« Pour nous, Thanksgiving est un jour de deuil, parce que nous nous souvenons des millions de nos ancêtres qui ont été assassinés par des colonisateurs Européens, qui n’étaient pas invités, comme les Pèlerins. Aujourd’hui, nous et beaucoup d’autres Autochtones dans tout le pays disent ‘No Thanks, No Giving’ [Pas de Remerciements, Pas de Dons]. »
Des Autochtones ont décrit des siècles d’atrocités commises contre les Autochtones et corrigé les mythes courants dans les textes historiques.
Le rassemblement annuel sur Cole’s Hill, dans la ville côtière du Massachussetts, a commencé en 1970, quand Wamsutta Frank James y est allé pour faire un discours écrit pour le 350ème anniversaire de la célébration de l’arrivée des Pèlerins. Des officiels de l’état avaient rejeté son discours pour une cérémonie officielle à Boston, le trouvant trop « incendiaire », selon WGBH News.
Au cours de la 52ème cérémonie, jeudi dernier, subventionnée par United American Indians of New England, la principale oratrice était la petite-fille de James, Kisha James.
« Le premier Thanksgiving officiel n’a pas eu lieu en 1621, quand les Pèlerins ont reçu un repas largement fourni par les Wampanoag, » dit-elle. « En fait, le premier Thanksgiving a été décrété en 1637 par le Gouverneur de la Colonie de la Baie du Massachussetts, John Winthrop, pour célébrer le massacre de 700 Pequots, hommes, femmes et enfants, sur les rives de la rivière Mystic, dans le Connecticut. »
Kisha James dit qu’elle ne s’opposait pas à ce que les gens se rassemblent, mangent de la dinde et offrent des remerciements, mais elle ne veut pas qu’ils célèbrent ce qu’elle appelle le mythe de Thanksgiving selon lequel les Pèlerins et les Wampanoag s’étaient bien entendu, selon WCB News.
« Nous savons que ce n’est pas vrai, que les Pèlerins sont venus et ont immédiatement commencé à tuer les Wampanoag » dit-elle.
Les Autochtones ont aussi appelé à prêter plus d’attention aux affaires de femmes Autochtones disparues et à rendre toute terre colonisée dans les Amériques.
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Dédié à Moonanum James, Bert Waters, et d’autres qui ont rejoint les ancêtres.
LE DISCOURS INTERDIT DE WAMSUTTA (FRANK B.) JAMES, WAMPANOAG
Discours qui aurait dû être lu à Plymouth, Massachussetts, en 1970.
SUR LE DOCUMENT : Trois cent cinquante ans après que les Pèlerins n’entreprennent leur invasion du territoire Wampanoag, leurs descendants « Américains » ont organisé une célébration d’anniversaire. Toujours accrochés au mythe des livres scolaires blancs, de relations amicales entre leurs aïeux et les Wampanoag, les organisateurs de l’anniversaire ont pensé qu’il serait bon d’avoir un Indien pour faire un discours de reconnaissance et de compliment à leur diner d’état. On a demandé à Frank James de s’exprimer au cours de la célébration. Il a accepté. Cependant, les organisateurs demandèrent à voir son discours à l’avance, mais il s’est avéré que les vues de Frank James – fondées sur l’histoire plutôt que sur la mythologie – n’étaient pas ce que les descendants des Pèlerins voulaient entendre. Frank James refusa de lire un discours écrit par un ‘spécialiste’ des relations publiques. Frank James n’a pas parlé au cours de la célébration. S’il avait parlé, voici ce qu’il aurait dit :
Je m’adresse à vous en tant qu’homme – homme Wampanoag. Je suis un homme fier, fier de mes ancêtres, de mes succès obtenus grâce à une direction parentale stricte (« Tu dois réussir – tu es de couleur différente, dans cette petite communauté de Cape Cod ! »). Je suis un produit de la pauvreté et de la discrimination, de ces deux maladies sociales et économiques. Moi-même, et mes frères et sœurs, les avons surmontées douloureusement, et, dans une certaine mesure, nous avons gagné le respect de notre communauté. Nous sommes d’abord Indiens – mais on nous dit « bons citoyens ». Parfois, nous sommes arrogants, mais seulement parce que la société nous a mis la pression pour le devenir.
C’est avec des émotions mêlées que je suis ici pour partager mes pensées. C’est un moment de célébration pour vous – célébrant l’anniversaire d’un commencement pour l’homme blanc en Amérique. Un moment pour repenser le passé, pour réfléchir. C’est le cœur lourd que je repense à ce qui est arrivé à mon Peuple.
Déjà avant l’arrivée des Pèlerins, c’était, pour les explorateurs, une pratique commune de capturer des Indiens, de les emmener en Europe, et de les vendre comme esclaves pour 220 shillings l’unité. Les Pèlerins avaient à peine exploré les plages de Cape Cod pendant quatre jours, qu’ils avaient déjà pillé les tombes de mes ancêtres et volé leur maïs et leurs haricots. Le Récit de Mourt décrit un groupe de pillards de seize hommes. Mourt dit que ce groupe avait pris tout ce qu’ils pouvaient porter des provisions pour l’hiver des Indiens.
Massasoit, le grand Sachem des Wampanoag, connaissait ces faits, et pourtant lui et son Peuple ont accueilli les colons de la Plantation de Plymouth et sont devenus leurs amis. Il avait peut-être fait cela parce que sa Tribu avait été décimée par une épidémie. Ou bien sa connaissance de la dureté de l’hiver à venir était la raison de son acceptation. Cette action de Massasoit a peut-être été notre plus grande erreur. Nous, les Wampanoag, nous vous avons accueillis, vous l’homme blanc, à bras ouverts, ne sachant pas que c’était le début de la fin ; et qu’avant 50 ans, les Wampanoag ne seraient plus un peuple libre.
Qu’est-il arrivé, pendant ces courtes 50 années ? Qu’est-il arrivé pendant les 300 dernières années ?
L’histoire nous livre des faits, et c’était des atrocités ; c’était des promesses trahies – et la plupart du temps, elles se concentraient autour de la propriété des terres. Entre nous, nous comprenions qu’il y avait des frontières, mais jamais auparavant, nous n’avions eu affaire à des clôtures et des murs de pierre. Mais l’homme blanc avait besoin de prouver sa valeur par la quantité de terre dont il était propriétaire. Seulement dix ans plus tard, quand les Puritains sont arrivés, ils ont traité les Wampanoag avec encore moins de sollicitude, pour convertir les âmes des soi-disant « sauvages ». Bien que les Puritains aient été durs envers les membres de leur propre société, l’Indien était écrasé sous des dalles de pierre et pendu aussi vite que n’importe quelle autre « sorcière ».
Ainsi, au cours des années, on trouve toujours des mentions de terres Indiennes conquises et, en gage, de création de réserves où l’Indien doit vivre. L’Indien, dépouillé de son pouvoir, ne pouvait que regarder l’homme blanc prendre sa terre et l’utiliser pour son gain personnel. Ça, l’Indien ne pouvait pas le comprendre ; pour lui, la terre était la survie, pour cultiver, chasser, en vivre. Elle n’était pas là pour en abuser. Nous constatons, incident après incident, que l’homme blanc cherchait à dompter le « sauvage » et le convertir aux modes de vie Chrétiens. Les premiers colons Pèlerins faisaient croire à l’Indien que s’il ne se conduisait pas bien, ils creuseraient la terre et déclencheraient à nouveau la grande épidémie.
L’homme blanc utilisait les capacités nautiques de l’Indien. Mais ils ne le laissaient être que marin – jamais capitaine. Encore et toujours, dans la société de l’homme blanc, nous les Indiens avons été taxés d’ « homme le plus bas sur le mât du totem. »
Les Wampanoag ont-ils réellement disparu ? Il y a toujours une aura de mystère. Nous savons qu’une épidémie a emporté beaucoup de vies Indiennes – des Wampanoag sont partis vers l’ouest et ont rejoint les Cherokee et les Cheyennes. Ils ont été forcés de partir. Certains sont même partis vers le nord, jusqu’au Canada ! Beaucoup de Wampanoag ont abandonné leur héritage Indien et accepté le mode de vie de l’homme blanc pour leur survie. Il y a encore des Wampanoag qui ne souhaitent pas qu’on sache qu’ils sont Indiens, pour des raisons sociales et économiques.
Qu’est-il arrivé à ces Wampanoag qui ont choisi de rester et de vivre parmi les premiers colons ? Quelle existence ont-ils vécu en tant que « civilisés » ? C’est vrai que la vie n’était pas aussi compliquée qu’aujourd’hui, mais ils étaient plongés dans la confusion et le changement. Honnêtement, la confiance, l’implication, la fierté et la politique se tissaient dans et en dehors de leur vie quotidienne. De là, l’Indien était taxé d’astucieux, malin, vorace et sale.
L’histoire veut que nous croyions que l’Indien était un animal sauvage, illettré et non civilisé. Une histoire écrite par un peuple organisé et discipliné, pour nous dénoncer comme une entité inorganisée et indisciplinée. Deux cultures très différentes se rencontraient. Celle de ceux qui pensaient qu’ils devaient contrôler la vie ; celle des autres qui croyaient que la vie était faite pour en jouir, parce que la nature l’a décidé. Rappelons-nous, l’Indien est et a toujours été un être humain comme l’homme blanc. L’Indien ressent la douleur, est blessé, peut être sur la défense, rêve, supporte la tragédie et l’échec, souffre de solitude, a besoin de pleurer et de rire. Souvent, il est incompris.
L’homme blanc se sent encore abasourdi en présence de l’Indien, par sa mystérieuse capacité à le faire se sentir gêné. C’est peut-être l’image que l’homme a créé de l’Indien ; sa « sauvagerie » a eu un effet boomerang et ce n’est pas un mystère ; c’est la peur ; la peur du tempérament Indien !
En haut d’une colline, dominant le célèbre Rocher de Plymouth, il y a la statue de notre grand Sachem, Massasoit. Massasoit s’y est tenu longtemps en silence. Nous, les descendants de ce grand Sachem, avons été un peuple silencieux. La nécessité de gagner sa vie dans cette société matérialiste de l’homme blanc, nous a réduits au silence. Aujourd’hui, moi et beaucoup de gens de mon peuple choisissent de voir la vérité en face. Nous SOMMES Indiens !
Bien que le temps ait épuisé notre culture, et que notre langue soit presque morte, nous, les Wampanoag, sommes toujours sur les terres du Massachussetts. Peu importe que nous soyons divisés, que nous soyons dans la confusion. Beaucoup d’années ont passé depuis que nous avons été un peuple ensemble. Nos terres ont été envahies. Nous avons combattu autant pour garder nos terres que vous, les blancs, l’avez fait pour nous les prendre. Nous avons été conquis, nous sommes devenus des prisonniers de guerre Américains, dans beaucoup de cas, et pupilles du Gouvernement des Etats-Unis jusqu’à très récemment.
Notre esprit refuse de mourir. Hier, nous parcourions les sentiers forestiers et les pistes sablonneuses. Aujourd’hui, nous devons parcourir les autoroutes et les routes goudronnées. Nous nous unissons. Nous ne sommes pas dans nos wigwams mais dans votre tente de béton. Nous sommes droits et fiers, et avant que beaucoup de lunes soient passées, nous redresserons les torts que nous avons laissé nous faire.
Nous avons perdu notre pays. Nos terres sont tombées dans les mains de l’agresseur. Nous avons laissé l’homme blanc nous mettre à genoux. Ce qui est arrivé ne peut pas être changé, mais aujourd’hui nous devons nous efforcer d’aller vers une Amérique plus humaine, une Amérique plus Indienne, où l’homme et la nature soient à nouveau importants ; où les valeurs Indiennes d’honneur, de vérité et de fraternité dominent.
Vous, l’homme blanc, célébrez un anniversaire. Nous, Wampanoag, vous aiderons à célébrer l’idée d’un commencement. C’était le commencement d’une nouvelle vie pour les Pèlerins. Maintenant, 350 ans plus tard, c’est le commencement d’une nouvelle détermination pour l’Américain d’origine : l’Amérindien.
Il y a des facteurs qui concernent les Wampanoag et d’autres Indiens à travers cette vaste nation. Nous avons maintenant 350 ans d’expérience de la vie dans la société de l’homme blanc. Maintenant nous parlons sa langue. Nous pouvons maintenant penser comme pense un homme blanc. Nous pouvons le concurrencer pour les bons emplois. On nous entend ; on nous écoute, maintenant. L’important est que, avec ces nécessités de la vie quotidienne, nous avons encore l’esprit, nous avons encore la culture unique, nous avons encore la volonté et, ce qui est le plus important, la détermination de rester Indiens. Nous sommes déterminés, notre présence ici ce soir est le témoignage vivant que ce n’est que le commencement de l’Amérindien, en particulier le Wampanoag, pour regagner sa position dans ce pays qui est légitimement le nôtre.
Wamsutta
Le 10 septembre 1970
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MESSAGE DE LEONARD PELTIER POUR LE JOUR DE DEUIL 2020
Salutations, mes parents, amis, bien aimés et soutiens.
Avant tout, je veux vous remercier pour le privilège de pouvoir exprimer mes sentiments sur ce « Jour de Deuil », comme nous l’appelons, et « Thanksgiving » comme le reste des Etats-Unis l’appelle. Quelquefois, j’ai du mal à trouver les mots pour exprimer toutes les pensées qui ont traversé ma tête après 45 ans d’emprisonnement.
Je veux certainement exprimer ma considération pour nos ancêtres, avant nous, qui ont tellement combattu pour que nous puissions vivre aujourd’hui. Je veux exprimer mes sentiments et ma mémoire de ceux qui ont été submergés par les armes de guerre venues d’Europe et les épidémies auxquelles ils ont dû faire face. Bien que nous ayons été attaqués par les envahisseurs venus d’Europe, encore et toujours de toutes les façons possibles, et malgré tout ce qui a été fait pour nous détruire et détruire notre culture et nos traditions, nous survivons encore jusqu’à ce jour parce que nous sommes une expression de la Volonté du Créateur et une expression de la Vérité du Créateur. Nous sommes la manifestation ce cette vérité, qui est que toute l’humanité devrait vivre dans les limites de ces règles.