Photo Multicultural Alliance for a safe environment
Par Kirena Tsosie
Centre de Recherche et d’Information du Sud-ouest Chris Shuey
Publié par Censored News
Le 14 juillet 2022
Traduction Christine Prat, CSIA-Nitassinan
Chaque année, ce jour-là, l’Association de la Communauté de la route de la Mare d’Eau Rouge (RWPRCA) de la Nation Navajo, dans le nord-ouest du Nouveau-Mexique, se rassemble pour commémorer les impacts de la plus grande fuite, en volume, de déchets radioactifs de l’histoire des Etats-Unis. Il a été estimé que plus de 430 millions de litre d’eau polluée d’une usine de traitement d’uranium, se sont déversés dans la Rivière Puerco, par une brèche dans une digue de l’usine de traitement d’uranium de la United Nuclear Corp. (UNC), le 16 juillet 1979.
Les familles de la RWPRCA vivent entre deux mines d’uranium abandonnées et l’usine et les déchets de l’UNC, dans le Chapitre [division administrative – Ch. P] de Coyote Canyon. Au sud, il y a encore la mine Nord-Est de Church Rock (NECR), située dans le Chapitre de Church Rock, qui a fonctionné de 1968 à 1982, produisant environ 3,5 millions de tonnes d’uranium, c’était une des plus grandes mines d’uranium dans la Nation Navajo. Le minerai d’uranium de la mine NECR était traité dans l’usine adjacente, UNC, dans le Chapitre de Pinedale. Les déchets d’usine sont ce qui reste après le traitement du minerai, pour extraire de l’oxyde d’uranium, une poudre métallique jaune. Les déchets étaient stockés dans des mares d’évaporation, en terre non recouverte d’un matériau imperméable, ce qui polluait l’eau souterraine locale.
A 5h30 du matin, le 16 juillet 1979, une brèche de 9 mètres s’est ouverte dans la digue qui fermait une mare de déchets, laissant couler de l’eau radioactive dans la Rivière Puerco. Les liquides échappés ont coulé à plus de 120 km en aval, jusqu’en Arizona, après avoir traversé de nombreuses communautés Navajo et la ville de Gallup, au Nouveau-Mexique. L’eau acide (pH=1.5) était tellement toxique qu’elle causait des brûlures aux pattes du bétail et aux pieds de gens qui, dans l’ignorance, pataugeaient dans la rivière juste après la fuite. Le bétail et les plantes mouraient le long des berges de la Rivière Puerco, et des niveaux d’uranium et de radium élevés étaient détectés jusqu’à 96 km en aval. La fuite de Church Rock est encore la troisième fuite de déchets radioactifs, après la catastrophe de Fukushima (2011) et la fusion de Tchernobyl (1986) et plus importante que la fusion partielle de Three Mile Island (1979).
Les effets de la fuite ont été exacerbés par près de 30 ans d’assèchement de mines souterraines, dans le district minier de Church Rock, situé à près de 20 km au nord-ouest de Gallup. Au fil des années, l’eau des mines a ajouté près de six fois plus de radioactivité au bassin de la Rivière Puerco que la fuite initiale. La pollution à l’uranium continue, dans l’eau alluviale, a été constatée dans des puits situés près de la Rivière Puerco, à Sanders, Arizona / région des Nouvelles Terres* de la Nation Navajo. On enquête toujours sur le rôle de l’eau des mines dans la pollution de l’eau souterraine, en-dessous de la Rivière Puerco, près de 50 ans plus tard.
Des recherches ont montré que les Autochtones sont touchés de manière disproportionnée par la pollution de la terre, de l’eau et de l’air, par les déchets de mines, étalés sur 15 états de l’ouest. La RWPRCA et d’autres communautés de la base, dans la Nation Navajo, tiennent les corporations et le Gouvernement Fédéral pour responsables de l’assainissement des mines d’uranium abandonnées, remontant aux débuts de l’extraction d’uranium, au début des années 1940. Les communautés Autochtones de trois ou quatre générations ont dû vivre avec les dangers des déchets d’uranium, qui affectent leurs familles, leurs domiciles, leurs moyens de vivre et leurs pratiques culturelles sacrées.
Ce jour-là, le 16 juillet, nous commémorons aussi la première détonation dans l’atmosphère d’une arme nucléaire, appelée l’Explosion de Trinity, dans le Bassin de Tularosa, dans le centre-sud du Nouveau-Mexique, le 16 juillet 1945. Comme les mineurs d’uranium de la Région des Quatre Coins, les gens du Bassin de Tularosa continuent de demander des compensations pour les maladies qu’ils relient à l’Explosion de Trinity. La bombe, développée au
Laboratoire National de Los Alamos (Nouveau-Mexique) pendant le Projet Manhattan, qui préparait les bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki, au Japon, les 6 et 9 août 1945.
Nous nous souvenons des évènements irresponsables et horrifiants qui ont fait l’histoire nucléaire des 80 années passées, afin de ne plus les répéter, ni maintenant ni dans le futur. Comme la pendule sur la couverture du Bulletin des Scientifiques Atomiques nous le rappelle, le monde est à seulement 100 minutes d’un conflit nucléaire cataclysmique. S’il vous plait, enseignez cette histoire à vos enfants, pour qu’ils deviennent l’avant-garde de la paix et la prospérité pour des générations futures.
Cliquer sur la carte pour pouvoir lire…
* Des terres initialement attribuées aux Navajos chassés de Big Mountain, pour faire place aux mines de charbon de Peabody Coal.
Christine Prat
28 décembre 2013
Des membres du Conseil de la Nation Navajo [le Gouvernement de la Réserve Navajo] soutiennent un projet de législation, présenté et défendu par le Délégué Leonard Tsosie, membre du Comité pour les Ressources et le Développement, visant à autoriser l’exploitation d’uranium et son transport sur les Terres Tribales, par la compagnie Uranium Resources Inc. (Voir ci-dessous l’appel de Jonathan Perry du 20 décembre, appelant les Navajo à envoyer des Commentaires au Conseil).
Autrefois, de nombreuses mines d’uranium ont été exploitées en territoire Navajo et autour. Les mesures de sécurité n’étaient pas vraiment appliquées, de nombreux mineurs Navajo sont morts de cancers (mais aussi des membres de leurs familles, des épouses qui lavaient des vêtements de travail contaminés, par exemple). Il y a actuellement 2000 mines d’uranium abandonnées (mais pas décontaminées) dans et autour de la Réserve Navajo. (Voir vidéo de Klee Benally).
Le projet actuellement discuté devrait se situer à Church Rock, au sud-est de la Réserve Navajo, qui fut le site de la plus grande catastrophe nucléaire de l’histoire des Etats-Unis : en 1979, une digue retenant un bassin de récupération des déchets d’uranium s’est rompue, le contenu radioactif du bassin s’est déversé dans le Rio Puerco, avec des effets dévastateurs sur la vie sauvage, le paysage et les gens. A l’époque, le Congrès Américain a déclaré la zone « Région de Sacrifice National ».
Le 23 décembre, une réunion Spéciale du Conseil a eu lieu au Chapitre de Chilchinbito, sous la présidence de Katherine Benally, déléguée du Chapitre de Chilchinbito.
D’après un article de Jennafer Waggoner-Yellow Horse (une non-Navajo qui réside dans la Réserve), publié sur Facebook le 24 décembre, le Délégué Leonard Tsosie s’est montré menaçant vis-à-vis des opposants. Pour justifier sa position, il est remonté jusqu’à 1492, indiquant que c’était la colonisation et la conquête des terres Autochtones qui obligeaient le Conseil Tribal actuel à passer des accords regrettables avec les grandes compagnies.
Le Département de la Justice de la Nation Navajo (NNDOJ) a exprimé son opposition à la résolution, citant divers problèmes et complications légaux opposés à l’adoption de la nouvelle législation. Ce à quoi M. Tsosie semble avoir répondu que le NNDOJ n’était pas habilité à s’opposer à la volonté du Conseil Tribal Navajo et que le BIA [Bureau des Affaires Indiennes, représentant le Gouvernement des Etats-Unis… Lors de sa création, il dépendait du Ministère de la Guerre !] avait déjà approuvé le transport d’uranium et dérivés par la firme URI [Uranium Resources Inc.] dans des camions entrant et sortant de la zone gérée par la Tribu. « Pas un mot n’a été dit par les membres du Conseil présents sur le taux élevé de décès causés par les véhicules heurtant des piétons, qui, ne disposant pas de transports en commun, doivent faire du stop pour se rendre à leurs rendez-vous… » écrit Jennafer Waggoner-Yellow Horse, qui ajoute que « les particuliers roulant trop vite sont la cible des agents de la circulation alors que les camions dévastent ces zones pour livrer à temps ». « Un problème souvent soulevé par les personnes âgées qui disent que ces camions manquent de les renverser quand ils tournent en direction de leurs domiciles, alors que les amendes pour excès de vitesse sont abondamment distribuées aux touristes et aux habitants ».
Alors qu’un membre du NNDOJ [« Ministère de la Justice » Navajo] expliquait les problèmes juridiques liés au transport de matériaux nucléaires, des membres du Service de Police Navajo sont entrés dans la salle de la réunion, des officiers ont expliqué qu’on leur avait dit qu’il y avait une manifestation dans les lieus. « Quand on leur dit que la réunion portait sur l’uranium, ils furent surpris, vu que le public était parfaitement calme et respectueux… ».
Après avoir justifié pendant des heures sa résolution en affirmant qu’un contrat avec URI donnerai plus de possibilités de contrôle sur les mesures de sécurité, M. Tsosie a violemment critiqué le site de l’activiste Jonathan Perry [Voir son appel ci-dessous].
D’après l’article de Jennafer Waggoner-Yellow Horse, il semble que des personnes aient été empêchées de s’exprimer et que celles qui ont pu le faire « disaient ce que le Comité souhaitait entendre ». Quelques personnes ont cependant pu défendre le point de vue de ceux qui s’opposent à l’uranium et affirmer que c’était la véritable volonté de la population (ce que nous voulons bien croire, vu leur histoire !).
Cependant, le Comité des Ressources et du Développement a voté en faveur de la proposition (3 pour, 2 abstentions), « Bien que le Département de la Justice de la Nation Navajo dise que cela enfreint la Loi Tribale ».
« Ce problème sera indubitablement le prochain camp retranché appelant à une opposition dans le style de Ward Valley, contre le transport, le stockage et le traitement de matériaux nucléaires au-dessus d’une vieille nappe aquifère du désert, sur des Terres Autochtones », conclut Jennafer Waggoner-Yellow Horse.
See article by Jennafer Waggoner-Yellow Horse on Facebook
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APPEL A L’ACTION: S’OPPOSER AU PROJET DE LOI DE LA NATION NAVAJO POUR AUTORISER L’EXTRACTION D’URANIUM
Par Jonathan Perry
20 décembre 2013
Publié par Indigenous Action Media
See original article in English
[…]
Le Délégué au Conseil de la Nation Navajo Leonard Tsosie, du Comité pour les Ressources et le Développement (RDC) soutient la Résolution 0373-13 qui autorise la firme URI à entamer sur des Terres Tribales, un projet d’EXTRACTION D’URANIUM à Church Rock, « Section 8 ». Uranium Resources Inc. ou « URI » est une compagnie du Texas, autrefois connue sous le nom d’Hydro Resources Inc. pour avoir contaminé les eaux souterraines sur les sites des ses autres projets et contaminera très certainement les eaux souterraines de l’Est de [la Réserve] Navajo si ce projet se réalise. De nombreuses communautés des environs de Church Rock seront en danger si les opérations commencent et nous devons donc répandre l’information.
Le RDC accepte les Commentaires Publiques et un meeting spécial doit avoir lieu lundi 23 décembre 2013 au Chapitre de Chilchinbeto, à Chilchinbeto, Arizona (au sud de Kayenta).
Cette action initiée par quelques officiels élus est INACCEPTABLE !! Cela mettra sans aucun doute en danger notre communauté, nos enfants et la région que nous appelons « chez nous ». L’uranium est un poison et l’extraire constitue un usage inapproprié de notre eau et de nos ressources naturelles ! l’uranium devrait être laissé dans le sol ! Nous ne pouvons pas le réguler et penser que nous avons le pouvoir sur la nature est présomptueux et dangereux. Je vous demande d’envoyer des Commentaires et de rejoindre beaucoup d’autres Diné [Navajo] pour dire NON ET BLOQUER UNE NOUVELLE CONTAMINATION A L’URANIUM au meeting Spécial du RDC lundi matin au Chapitre de Chilchinbeto.
[…]
Je vous demande de transmettre ceci à tous vos contacts afin qu’ils puissent aussi transmettre l’information et BLOQUER la résolution du Délégué Tsosie. Je vous en prie, soyez avec nous pour défendre nos foyers et notre santé. La vie humaine n’a pas de prix et nous devons parler au nom de la prochaine génération qui n’a pas encore la parole. Les jeunes enfants et les générations à venir devront vivre avec nos choix d’aujourd’hui.
Merci
Jonathan Perry
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Voir de nombreux articles traduits en français sur le problème de l’uranium dans le sud-ouest des Etats-Unis